SCPI, la fin du déni

L'éditorial d’Alexandre Garabedian, directeur de la rédaction de L’Agefi
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La hausse des taux fait baisser la valeur des parts de SCPI  -  (RK)

Gagner 3.000 euros par mois sans rien faire ? C’est possible grâce aux SCPI, à en croire les publicités qui fleurissent, en ce mois de juillet, sur certains sites internet dédiés à l’épargne. Les sociétés civiles de placement immobilier font figure de martingale chez les professionnels de la gestion patrimoniale. Un actif qui parle au cœur de tous les Français, des loyers qui montent, des promesses de rendement de 5% ou 6% par an, sans compter la revalorisation, forcément à la hausse, du prix des parts… Pas étonnant que les particuliers se soient bourré les poches de SCPI ces dernières années, en direct ou au travers de leur assurance-vie. Chacun y trouvait son compte : l’épargnant, assuré de toucher des rendements bien supérieurs à l’inflation jusqu’en 2022, les gérants et les distributeurs, grassement rémunérés sur un produit qui empile les couches de frais.

Le conte de fées est terminé. Le 24 juillet, Amundi, l’un des poids lourds du secteur, a tiré les conséquences de la hausse des taux en dépréciant les parts de trois de ses SCPI, jusqu’à -17% pour l’une d’elles. Sans même affecter le paiement des loyers, la remontée des taux d’intérêt fait mécaniquement diminuer la valeur des immeubles détenus en portefeuille.

C’est un coup de massue, et ce n’est qu’un début. Le numéro un français de la gestion d’actifs ne sera évidemment pas le seul à effectuer ce douloureux aggiornamento. Le segment de la pierre-papier s’apprête ainsi à sortir du déni collectif. Déni des années de taux zéro, lorsqu’il était plus simple de collecter à tout-va et d’investir coûte que coûte, comme si le soutien exceptionnel des banques centrales pouvait durer ad vitam aeternam. Déni face aux effets du resserrement monétaire le plus brutal qu’on ait connu depuis les années 90, une décennie de crise immobilière. Déni, enfin, devant les mutations structurelles du commerce et surtout du bureau, qui vident certains quartiers d’affaires en périphérie des villes. Dans leur communication, ces dernières semaines encore, nombre de professionnels, tout en se disant vigilants, minimisaient les impacts de ce changement de régime de croisière.

Rien ne sert en effet de faire fuir l’épargnant, alors que la collecte des SCPI plonge déjà. Sur ce marché de 93 milliards d’euros, qui reste petit et où un vendeur de parts doit trouver un acheteur, le risque de déstabilisation est élevé, au point d’inquiéter aujourd’hui l’Autorité des marchés financiers. Pour faire face aux sorties, certains acteurs pourraient être contraints de céder des actifs par nature illiquides, au prix de fortes moins-values, ou bien contraindre leurs clients à patienter longtemps dans la file d’attente.

Pour ceux, en revanche, qui ont eu la sagesse de ne pas investir massivement dans des actifs surcotés pendant les années d’euphorie, ce pourrait être l’occasion de saisir des bonnes affaires. D’autant que la SCPI reste un placement de long terme. C’est aussi le propre des crises que de permettre de trier le bon grain de l’ivraie.

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