
Les assureurs prônent plus de démocratie actionnariale sur l’ESG

Un nouveau partisan des résolutions climat. A l’occasion de la publication de son troisième livre blanc intitulé «Réussir la transition écologique et renforcer la résilience face aux défis climatiques», France Assureurs, nouveau nom d’usage de la Fédération française de l’assurance (FFA), a mis sur la table cinq propositions concrètes, dont la généralisation du «say on climate» consultatif chaque année. «Les assureurs, en tant qu’investisseurs institutionnels, pourraient ainsi se prononcer sur la stratégie climat des entreprises dans lesquelles ils investissent, créant les conditions d’un dialogue solide entre entreprises quel que soit leur secteur d’activité et leurs actionnaires sur les questions climatiques», explique à L’Agefi un porte-parole de France Assureurs.
Les assureurs, eux mêmes mis récemment sous pression par leur régulateur, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), sur l’impact de leurs engagements climatiques, vont encore plus loin. «Nous, assureurs, proposons que cette pratique soit, à terme, étendue aux autres questions ESG, comme par exemple la promotion de la biodiversité, la lutte contre la déforestation ou encore les questions sociales, pour lesquelles un vote consultatif pourrait également avoir lieu, ajoute France Assureurs. Cette recommandation s’applique à l’ensemble des entreprises qui disposent d’actionnaires, c’est-à-dire les sociétés anonymes d’un point de vue juridique. Il s’agit pour les assureurs de jouer pleinement leur rôle d’investisseurs institutionnels engagés dans la transition écologique en accompagnant et en accélérant la transition des entreprises de l’économie réelle.»
Dès avril 2021, le Forum pour l’investissement responsable (FIR) militait pour la généralisation de ce «say on climate», estimant que ce vote, pour l’heure consultatif, «permettrait de créer les conditions d’un dialogue permanent sur les questions environnementales». Et en septembre, l’association s’adressait aux présidents du SBF 120 leur demandant de soumettre des résolutions dès les assemblées générales 2022
Un plan climat rigoureux et exhaustif
Le FIR préconise un vote annuel sur deux résolutions distinctes présentées par le conseil d’administration. L’une sur la stratégie climat, l’autre sur la mise en œuvre de cette stratégie. Dans un souci de comparabilité et d’exigence, ces résolutions doivent au-moins comprendre des objectifs quantitatifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre couvrant les scopes 1, 2 et les émissions du scope 3 les plus matérielles de l’entreprise, en expliquant les hypothèses retenues et en visant la neutralité carbone d’ici 2050. Le FIR demande également des jalons de court et de moyen termes avec une mise en œuvre immédiates d’actions pour réduire rapidement et significativement les émissions. Un plan d’actions détaillé devra aussi être présenté, chiffrant notamment les investissements nécessaires à cette transition.
Toutefois, la résolution climat est loin de faire l’unanimité, tant parmi les sociétés, dont certaines défendent une compétence exclusive du conseil sur la stratégie, que chez les actionnaires, d’autant que le contenu est très différent d’une société à l’autre. Ce vote ne doit pas être un blanc-seing à une politique environnementale qui ne serait pas clairement détaillée. Le mois dernier, le proxy ISSa annoncé qu’il proposera cette année une série de critères pour analyser les résolutions climat, invitant les actionnaires à les approuver au cas par cas, en fonction de l’exhaustivité et de la rigueur du plan climat.
Le code Afep-Medef reste muet
D’ailleurs, dans son dernier rapport sur le gouvernement d’entreprise, l’AMF demande aux sociétés qui soumettent des résolutions climat d’informer précisément les actionnaires sur les conséquences en cas de vote positif ou négatif et de leur fournir toutes les informations leur permettant le contenu, l’impact et les enjeux de ces résolutions. Si le dépôt d’une résolution consultative ne semble pas poser de problèmes juridiques, le régulateur réaffirme qu’une «clarification de l’état du droit, le cas échéant par voie législative, pourrait apporter un surcroît de sécurité juridique en la matière, aussi bien aux émetteurs qu’aux actionnaires, qui devraient pouvoir faire valoir leur point de vue sur ces sujets ESG». Pour sa part, le rapport du Haut conseil de gouvernement d’entreprise (HCGE) de novembre 2021 ne traite pas ce sujet. Il est vrai que le code Afep-Medef, établi par les deux grandes associations représentant les entreprises, et révisé en janvier 2020, ne prévoit rien. D’aucuns attendent une évolution…
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