
La gestion du capital humain devient un sujet majeur de gouvernance

Encore plus que l’an dernier, les sujets de gouvernance dans le monde seront en priorité liés au changement climatique, constate le rapport 2021 du cabinet de chasse de tête Russell Reynolds. «La gouvernance devient de plus en plus prégnante, confie Paul Jaeger, associé chez Russell Reynolds. La crise du Covid a mis une nouvelle pression sur les entreprises pour les inciter à se transformer, donnant encore plus de poids aux questions sociales et environnementales. Des critères essentiels pour attirer de jeunes talents.»
Alors que la gestion du changement climatique est désormais vue comme un risque financier de long terme, les engagements en faveur du zéro carbone d’ici 2050 se multiplient, mettant la pression à la fois sur les entreprises et sur les Etats. Les chasseurs de tête seront particulièrement attentifs à la montée en puissance des «say on sustainability» lors des assemblées générales. A l’instar d’Unilever et de Nestlé en Europe, ou encore de Vinci, Atos et Total en France.
La diversité, l’équité et l’inclusion continuent à s’imposer, souvent sous la pression des investisseurs, et deviennent même la tendance numéro un aux Etats-Unis, avec une demande accrue de diversité raciale et ethnique. En matière de nominations issues de la diversité, «la France est bien placée en Europe», constate Paul Jaeger.
Avec la prolifération, mais aussi la convergence, des normes de reporting environnementales, les conseils doivent être prêts à être tenus plus responsables sur la communication d’indicateurs de durabilité par leurs parties prenantes, anticipe Russell Reynolds.
Des profils de dirigeants plus difficiles à trouver
La gestion du capital humain est suivie d’encore plus près par les investisseurs, depuis la pandémie. Notamment sur les écarts de rémunération hommes/femmes, le turn-over, etc. Là encore, les administrateurs pourraient être tenus responsables de la faiblesse de l’information. En Europe, la question de la mixité des comités exécutifs reste une thématique majeure. «Nous sommes très réservés sur l’instauration d’un quota, confie Paul Jaeger. Aujourd’hui, tous les dirigeants sont obsédés par l’évolution de carrière des femmes et par la diversité des équipes ; mais il faut du temps pour constituer les viviers et construire une politique RH d’accompagnement jusqu’aux postes de direction générale».
Les compétences du dirigeant évoluent aussi. «Pour un leadership durable, nous recherchons maintenant des dirigeants qui ont la capacité de comprendre des systèmes complexes de décision à niveaux multiples, de travailler avec les parties prenantes, de comprendre les sujets d’innovation et d’avoir une vision de long terme, poursuit Paul Jaeger. Ces profils sont plus difficiles à trouver, mais sont nécessaires pour la mise en œuvre de stratégies de développement durable».
Articuler les rôles de président et de DG
Parallèlement, la culture du PDG en France tend à diminuer progressivement. «Si le PDG peut répondre à des spécificités culturelles d’entreprise ou à des périodes de transition, nous sommes plutôt favorables à la dissociation des pouvoirs, le CEO dirige et le président anime le conseil, explique Paul Jaeger. L’enjeu se situe dans l’articulation des rôles du président et du directeur général avec les investisseurs. Nommer président un ancien directeur financier est un atout en matière de communication avec les actionnaires, mais peut être vécu comme une concurrence par le CEO.»
Russell Reynolds anticipe également un retour de l’activisme, après la pause forcée de 2020, même pour des entreprises qui fonctionnent bien. «Cette capacité de dialogue – i.e. d’écoute des attentes – avec les activistes, doit être vérifiée lors de l’évaluation du conseil, prévient Paul Jaeger. Les investisseurs ont besoin d’être rassurés sur la qualité de la gouvernance.»
Quant au passage en mode hybride, en virtuel et en physique, des conseils d’administration et des assemblées générales, «il est désormais entré dans les mœurs, et fonctionne bien», conclut Paul Jaeger.
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