
La fermeture des fils Twitter et Facebook de Donald Trump sème le trouble

Les géants de la tech ont tenté lundi de contenir la contestation grandissante contre leurs réseaux sociaux. Le cours de Twitter était chahuté hier à New York, pour clôturer en baisse de 6,41% et celui de Facebook régressait de 4%.
Une réaction très directe des marchés à la décision historique des dirigeants de Twitter et de Facebook, vendredi dernier, de fermer pour une durée indéterminée les comptes personnels du président américain, Donald Trump. D’autres services comme Snapchat ou Twitch ont aussi suspendu le profil du locataire de la Maison-Blanche.
Ces décisions, sans précédent, ouvrent un débat vertigineux sur la liberté d’expression, quelques jours après une invasion historique du Capitole par les partisans du président à Washington, le 6 janvier. Une quasi-insurrection, que Donald Trump est accusé d’avoir alimentée au travers de messages incendiaires, sur les réseaux et dans un discours, par lesquels il continuait de nier l’élection en novembre dernier de son prédécesseur, le démocrate Joe Biden.
Le réseau Parler hors ligne
Les choses se sont accélérées ces derniers jours. Le réseau social Parler, prisé des pro-Trump, était hors ligne lundi matin, après qu’Amazon Web Services lui avait fermé l’accès à ses serveurs, le laissant sans hébergement en ligne. En outre, Apple et Google ont exclu Parler de leurs boutiques d’applications (AppStores), rendant presque impossible le téléchargement de l’application mobile. Amazon et Apple étaient eux aussi sanctionnés pour ces décisions sur les marchés, clôturant respectivement en baisse de 2,15% et de 2,32%.
Même les sites de paiement réévaluent leurs liens avec des entreprises liées à Donald Trump. Stripe, fournisseur de solutions de paiement aux entreprises, va cesser de traiter les paiements pour les entreprises liées à Donald Trump, selon Bloomberg et le Wall Street Journal. De même, Shopify a fermé ses boutiques de e-commerce affiliées à Donald Trump.
88 millions d’abonnés sur Twitter
Mais la décision de Twitter est plus forte, Donald Trump ayant fait du fil au petit oiseau bleu son principal outil de communication. @realDonaldTrump était suivi par plus de 88 millions de personnes. Donald Trump est le premier chef d’Etat à se voir ainsi banni du réseau social. Twitter a expliqué avoir pris cette décision en raison d’un «risque d’une nouvelle incitation à la violence» à la suite des événements du 6 janvier. «Nous ne serons pas réduits au silence», a protesté l’intéressé via le compte officiel POTUS (Président des Etats-Unis) – auquel il n’aura plus accès à compter du 20 janvier, jour de l’investiture de Joe Biden.
Profil bas des Big Tech
De cette manière, les «Big Tech» essaient de prendre leurs distances des accusations selon lesquelles ils auraient contribué à alimenter les violences de mercredi dernier.
En creux, pour les investisseurs, la décision de Twitter et des autres médias sociaux ravive le débat sur un possible durcissement de la régulation des réseaux sociaux et des plates-formes internet aux Etats-Unis, mais aussi en Europe. Pour cette dernière, la régulation des plates-formes est au cœur de deux projets discutés depuis mi-décembre à la Commission européenne, les «Digital Services Act» et «Digital Market Act». Ceux-ci doivent «poser les textes fondateurs de la régulation du numérique pour ces prochaines décennies, d’une ‘Constitution numérique’», indiquait-t-on dans l’entourage de Cédric O, secrétaire d’Etat au numérique. L’Europe entend ainsi contrer l’influence croissante des géants technologiques, et compte bien pousser une régulation, qui pourrait les amener à scinder leurs activités.
Polémique
Pour en rajouter, la polémique enfle depuis quelques jours à propos de WhatsApp, la messagerie instantanée appartenant à Facebook. A partir du 8 février prochain, ses utilisateurs seront obligés de partager une partie de leurs données personnelles avec Facebook, telles leurs données «de transaction» ou l’adresse IP de géolocalisation. Une annonce considérée comme «limite» par les juristes en Europe, où le Règlement général sur la protection des données (RGPD) encadre la collecte des données des citoyens européens dans un cadre strict qui exclut une réutilisation commerciale.
Outre-Atlantique, le débat en matière de régulation des Big Tech monte aussi. Après un rapport assez radical à leur sujet émis par le Congrès en octobre dernier, qui pointe leurs comportements anticoncurrentiels, le nouveau président démocrate Joe Biden pourrait bien pousser dans ce sens.
Et Donald Trump lui-même pourrait encourager ces appels aux réformes des plates-formes. Il a demandé que le Congrès révoque la Section 230, une décharge de responsabilité dont les médias sociaux dépendent, pour permettre une liberté de parole sans entraves sur leurs réseaux. Durant sa dernière semaine à la Maison-Blanche, Donald Trump pourrait pousser pour des changements dans la Section 230, selon l’agence Bloomberg.
Les BigTech doivent-ils s’autoréguler ? Non, pour beaucoup. Donald Trump a ainsi eu des soutiens inattendus lundi, comme de la chancelière allemande Angela Merkel : via son porte-parole, elle a estimé «la fermeture des comptes d’un président élu problématique», considérant que des droits comme la liberté d’expression ne pouvaient être régis par des entreprises privées [comme Twitter], mais «dans un cadre défini par le législateur». En bonne politique, elle faisait une référence à peine voilée aux deux textes DSA et DMA en discussion à Bruxelles. Le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, n’a pas dit autre chose, déclarant sur France Inter que l’Etat et non «l’oligarchie numérique» était responsable des régulations, qualifiant les Big Tech de «menace pour la démocratie».
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