
La tentation d’un assouplissement économique monte en Chine

La croissance en Chine a atteint son pic en début d’année et la consommation peine à prendre le relais. Face à cette reprise moins soutenue, la Chine pourrait assouplir sa politique économique.
En mai, les données économiques ont de nouveau déçu. «La croissance moyenne à deux ans montre que la reprise est encore inégale avec des ventes de détail, et la consommation en général, en retard et sous les niveaux de croissance pré-Covid, constatent les économistes d’UBS qui prévoient un ralentissement de la croissance à 5-6% en rythme annuel au second semestre cette année. «La demande non satisfaite diminue, les exportations ralentissent, le resserrement du marché immobilier se poursuit et la flambée des prix des matières premières pèse sur les marges des entreprises», affirment ces derniers.
Endettement à 295% du PIB
La Chine a resserré ses conditions de crédit dès la fin 2020 et a repris sa politique de désendettement (deleveraging). Avec pour résultat, une diminution de l’impulsion du crédit. L’endettement chinois s’est encore accru en 2020, avec la crise du sanitaire, après la pause de 2018-2019, de 20 points, à 295% du PIB. «Si la croissance plus faible du revenu des ménages et les préoccupations persistantes autour du Covid (y compris les épidémies isolées qui ont conduit à des confinements localisés) expliquent en partie la faiblesse des ventes au détail – en particulier dans les restaurants – le retrait des mesures de relance à un rythme plus rapide que prévu est le facteur principal, relèvent les économistes de Deutsche Bank. La politique de crédit a commencé à se durcir à la fin de l’année dernière : nous estimons que l’impulsion du crédit est la plus faible depuis au moins une décennie maintenant.»
Les économistes de Deutsche Bank pensent que le gouvernement pourrait assouplir quelque peu sa politique au second semestre. «Pékin va arrêter de durcir sa politique économique, ajoute Olivier Raingeard, directeur de la stratégie et de la gestion chez Neuflize OBC. L’arrêt récent de l’appréciation du yuan en est un signe.»
La politique monétaire semble également sur la voix de la stabilisation. «La fenêtre qui aurait permis à la PBoC de relever ses taux s’est refermée, affirme Wei Yao, chef économiste Asie chez Société Générale CIB qui anticipait jusqu’à présent un léger resserrement monétaire. Nous ne pensons plus qu’il y aura davantage de resserrement monétaire.»
Politique moins restrictive
La banque centrale s’est récemment montrée moins restrictive, certains y voyant le signe d’une stabilisation de sa politique monétaire. «Le changement de ton de la PBoC est néanmoins très nuancé, juge pour sa part Wei Yao. Elle est en fait légèrement moins hawkish car elle se veut prudente par rapport à un environnement externe mais aussi un contexte domestique plus incertain. Mais ce n’est pas un gros changement.»
Il faudra néanmoins davantage de signes d’un ralentissement pour que la PBoC bascule en mode accommodant. «Pour qu’elle assouplisse sa politique monétaire, il faudra qu’il y ait des signes de fort ralentissement, notamment dans l’immobilier», pense Wei Yao. Même s’il a pour l’heure résisté, il est affecté par les mesures de désendettement imposées par le gouvernement. Mais un changement ne devrait pas intervenir avant le dernier trimestre de cette année, selon l’économiste de SG CIB.
Mesures ciblées
Un assouplissement ne passerait pas par une baisse des taux directeurs mais dans un premier temps par un assouplissement des conditions de financement sur le marché interbancaire (apport de liquidité et baisse des taux interbancaires), qui a l’avantage d’être un outil flexible permettant à la PBoC de calibrer progressivement sa politique monétaire. Les autorités chinoises pourraient également assouplir certaines mesures de désendettement pour réduire la pression sur l’économie. La Chine cherche par ailleurs à stopper la hausse des prix des matières premières. Enfin, le gouvernement a des marges pour accroître son stimulus budgétaire pour des mesures ciblées à destination des PME ou du secteur technologique. Jusqu’à présent 20% seulement des quotas de financement des gouvernements locaux (special local government bonds) ont été utilisés, contre 40% à la même période en 2019 et 60% en 2020. Mais Pékin gardera toujours une attention particulière au levier de l’économie chinoise avec un maximum de 300%, selon les économistes d’UBS.
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