
La Chine fait sauter les verrous

En plus de revoir sa politique familiale pour lutter contre les effets indésirables du vieillissement de sa population sur son économie, Pékin veut envoyer un signal fort sur le marché des changes quant à l’appréciation du yuan en relevant le ratio des réserves obligatoires des banques sur les devises.
La tolérance des autorités chinoises face à la hausse du yuan atteint ses limites. Après les avertissements de différentes autorités locales en fin de semaine dernière, la banque centrale a envoyé lundi un signal clair au marché en relevant le ratio de réserves obligatoires (RRR) des banques pour les devises de 2 points, à 7%. «Vu la fréquence de ce type d’intervention, il s’agit d’un signal fort», notent les économistes de Société Générale CIB. C’est la première fois depuis 2007.
Cette hausse du RRR rend plus coûteux pour les banques de détenir du dollar. Cela limite la liquidité de la devise américaine, ce qui la renchérit et déprécie le yuan. Actuellement, le montant des comptes courants en devises s’élève à 1.000 milliards de dollars.
Jusqu’à peu, les autorités chinoises s’étaient pourtant montrées tolérantes face à l’appréciation de la monnaie, fixant même la bande de fluctuation quotidienne du renminbi à 2%, un point haut depuis 2018. Mais le yuan a atteint un plus-haut de trois ans à 6,36 face au dollar et les perspectives d’appréciation sont toujours favorables, d’autant que les capitaux devraient continuer d’affluer sur les marchés chinois.
Autorités nerveuses
Le yuan a repris 13% en un an, après avoir atteint un plus-bas depuis 2008 en mai 2020, soutenu par la reprise économique et le flux d’investissement en actions et en obligations (avec l’ouverture des marchés et l’inclusion dans les indices). La devise chinoise atteint même un plus-haut de cinq ans face à un panier de monnaies de partenaires commerciaux. De quoi rendre les autorités nerveuses. Elles craignent que cette appréciation ne vienne accélérer la fin de la reprise, d’autant que les positions acheteuses sur le yuan sont élevées.
A l’instar du marché des matières premières, où la Chine veut contrôler les prix après leur nette envolée des derniers mois, Pékin fustige les manipulations et la spéculation sur le marché des changes.
Le relèvement du ratio des réserves obligatoires sur les devises devrait néanmoins avoir un impact limité. «Une hausse de 2% sur des dépôts ‘onshore’ en devises de 1.000 milliards de dollars gèlent uniquement 20 milliards de dollars, ce qui est à comparer à un excédent courant de plus de 270 milliards de dollars et à des flux de capitaux vers les obligations de près de 190 milliards et d’environ 200 milliards vers les actions en 2020», constatent les économistes de SG CIB. Pour d’autres, il ne s’agit que d’une première mise en garde, la PBoC disposant d’autres outils pour mettre un coup d’arrêt à la hausse du yuan.
Les économistes de SG CIB anticipent une poursuite de la hausse à court terme malgré le relèvement du RRR mais une dépréciation au second semestre, à mesure du ralentissement de la croissance et de la hausse des taux américains face à des taux chinois stables. Par le passé, dès que Pékin s’est attaqué à l’appréciation de sa monnaie, cela s’est toujours mal fini pour les investisseurs.
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