
La hausse du Livret A pourrait coûter 5 milliards d’euros aux banques en deux ans

Une autre manière de taxer les banques françaises ? Alors que le gouvernement espagnol a récemment annoncé la mise en place d’un impôt exceptionnel qui pourrait coûter 3 milliards d’euros aux banques en deux ans, Bercy n’a rien dévoilé de tel en France. Mais le ministre de l’Economie et des Finances vient de confirmer un doublement du taux du Livret A à partir du 1er août. Une mesure favorable au pouvoir d’achat des épargnants français qui n’épargnera pas les banques hexagonales.
Suivant la recommandation de la Banque de France, Bruno Le Maire a annoncé une hausse de la rémunération du petit livret rouge à 2% dès août. L’augmentation d’un point de pourcentage par rapport au niveau en place depuis février s’explique par la flambée de l’inflation alors que l’€STR, taux interbancaire qui compte pour moitié dans la formule de calcul, pointe toujours à environ -0,58%. Le Livret développement durable et solidaire (LDDS) verra son rendement augmenté au même niveau quand celui du Livret d’épargne populaire (LEP), entièrement indexé sur l’inflation, passera de 2,2% à 4,6%.
5,7 milliards sur deux ans ?
Après 0,5% en janvier, 1% de février à juillet puis 2% pour les cinq derniers mois de l’année, le taux moyen du Livret A et du LDDS ressortira à 1,38% en 2022 (hors nouvelle mise à jour en novembre, qui semble peu probable). La rémunération moyenne du LEP atteindra de son côté 3,1%. Des niveaux respectivement 0,88 point et 2,1 points supérieurs aux rendements de ces livrets en 2021. Or, ce surplus de rémunération sera en partie payé par les banques françaises qui hébergent 40% des encours des Livrets A et LDDS et 50% de ceux du LEP. Selon nos estimations (voir détail du calcul en fin d’article), la hausse des taux des livrets réglementés entraînera un surcoût de 2,1 milliards d’euros en 2022 par rapport à 2021.
La douloureuse pourrait même gonfler de 1,5 milliard d’euros supplémentaires en 2023 si les rendements applicables au 1er août devaient être maintenus l’an prochain. Sur deux ans, l’addition atteindrait alors 5,7 milliards d’euros. L’impact restera largement gérable pour une industrie qui a enregistré plus de 30 milliards d’euros de bénéfices l’an dernier. Il n’en limitera pas moins les gains que pourraient retirer les banques de la hausse en cours des taux d’intérêt. La publication, le 19 juillet prochain, du nouveau rapport de la Banque de France sur l’épargne réglementée pourrait être suivie par la profession avec un peu plus d’attention que d’habitude.
Détail des calculs
Les encours des Livrets A et LDDS s’élèvent à environ 480 milliards d’euros et ceux du LEP à 40 milliards. La part hébergée par les banques est estimée à 192 et 20 milliards d’euros respectivement. Pour des taux de 1,38% (Livret A et LDDS) et 3,1% (LEP), contre 0,5% et 1% en 2021, le surcoût s’élève à 2,1 milliards d’euros. Sauf nouveaux changements, les taux atteindraient 2% (Livret A et LDDS) et 4,6% (LEP) en 2023, soit un nouveau surcoût par rapport à 2022 de 1,49 milliard. Sur deux ans, la facture atteindrait ainsi deux fois 2,1 milliards plus 1,49 milliard, soit 5,71 milliards d’euros. Ces estimations supposent que la rémunération versée aux banques par la Caisse des dépôts – qui représente actuellement 0,3% des encours – reste stable.
Plus d'articles du même thème
-
L’emploi américain, une bonne nouvelle dans une période troublée
Les chiffres du rapport mensuel sur le marché du travail ressortent plutôt bons pour le mois de mars. Le détail confirme encore une dynamique faible de l’économie américaine, sans prendre encore en compte les effets des licenciements déjà effectués dans le secteur public, ni ceux liés aux risques économiques résultant de la hausse des droits de douane. -
Harvest commence à sortir du bois après sa cyber-attaque
Sonia Fendler, directrice générale adjointe chez Harvest, est intervenue à la Convention annuelle de l’Anacofi, quelques jours après s'être exprimée lors d'une réunion organisée par la CNCGP. Elle a donné des premiers éléments d’explications sur l’origine de la fuite de données et confirmé que la période d’indisponibilité des services ne sera pas facturée. -
La loi de finances 2025 a laissé aux banques un sentiment aigre-doux
Par souci de justice fiscale, la loi de Finances 2025 a apporté un certain nombre de modifications dont plusieurs touchent les banques de façon directe ou indirecte. Certaines dispositions ne sont pas à l’avantage du secteur bancaire mais d’autres sont plutôt bénéfiques. Zoom sur deux exemples concrets.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions