La chute de FTX est pour l’heure circonscrite au monde des cryptos

La liquidation de positions à levier et la perte de confiance affectent la sphère crypto. Mais l’implication des investisseurs institutionnels interroge sur un impact pour le marché financier.
Xavier Diaz
La plateforme de trading crypto FTX
La plateforme de trading FTX entretient des relations croisées avec les acteurs de l’écosystème crypto y compris les plateformes DeFi.  -  RK.

L’onde de choc de la faillite de la plateforme de trading FTX pourrait durer plusieurs semaines, en raison des liens tissés entre la plateforme fondée par Sam Bankman-Fried (SBF) et l’écosystème crypto. «Vu la taille et les relations croisées entre FTX et Alameda Research d’une part et d’autres acteurs de l’écosystème crypto y compris les plateformes DeFi, il semble qu’une nouvelle cascade d’appels de marge, de deleveraging et de défaillances de plateformes ou entreprises crypto va s’enclencher», jugent les stratégistes de JPMorgan, dont Nikolaos Panigirtzoglou. Une séquence qui pourrait être similaire à celle vécue sur ce marché en mai-juin dernier avec la chute de Terra.

De fait, le bilan d’Alameda Research serait de 8 milliards de dollars. Seul un sauvetage des deux entités de la galaxie SBF aurait pu éviter un long désendettement de plusieurs semaines. «La nouvelle que l’un des acteurs les plus importants, et des plus solides en apparence, est en difficultés, alors qu’il était apparu comme un chevalier blanc pour d’autres acteurs ces derniers mois, a surpris le marché», ajoute Ivan Kachkovski, stratégiste chez UBS. Il s’agit d’une différence majeure par rapport à la correction du milieu de cette année. «Ce qui rend cette nouvelle phase de désendettement plus problématique est la diminution dans l’écosystème du nombre d’entités avec des bilans plus solides capables de sauver celles qui ont un peu de capital et un fort effet de levier», poursuit Nikolaos Panigirtzoglou.

Avec dans le cas de FTX et d’Alameda Research, qui ont réussi à attirer depuis deux ans d’importants investisseurs institutionnels à leur capital, un risque de répercussion sur les marchés financiers traditionnels. Dans son rapport de stabilité financière de mai 2022, la Banque centrale européenne (BCE) notait l’importance grandissante des investisseurs institutionnels dans le monde des cryptos. Elle relevait une augmentation de la corrélation entre les rendements des actifs crypto et des actions pendant les corrections de mars 2020, décembre 2021 et mai 2022. «Cela peut suggérer que, pendant les périodes d’aversion au risque sur les marchés financiers plus larges, le marché des cryptoactifs est devenu plus étroitement lié aux actifs à risque traditionnels - une tendance qui peut être due en partie à l’implication accrue des investisseurs institutionnels», peut-on lire dans ce rapport qui rappelle que la taille de la sphère crypto, même si elle a diminué, équivaut à celle des produits sur les subprimes américains en 2007-2008.

Baisse de la corrélation

Mais il n’y a pas pour l’heure d’évidence d’un impact des corrections des cryptos sur les marchés traditionnels et en termes de stabilité financières (notamment via les banques). «Le montant n’est finalement pas très important, ce qui devrait limiter les répercussions sur les marchés financiers, estime Nordine Naam, stratégiste changes chez Natixis. En revanche, cela contribue à la défiance des investisseurs sur les cryptos.» Ce dernier note que la corrélation entre le bitcoin, notamment, et les marchés actions, dont l’indice Nasdaq, a nettement diminué depuis le début de l’été. Cette dernière est même devenue asymétrique. Le bitcoin réagit davantage aux baisses du Nasdaq qu’aux hausses. Les cryptos semblent désormais plus animés par les nouvelles de leur propre secteur. Par ailleurs, la réduction de la liquidité qui est devenue plus chère est défavorable au monde crypto. «Il y a aussi eu beaucoup de sorties d’investisseurs pendant la correction de janvier à juin», ajoute Nordine Naam qui note que le bitcoin va avoir du mal à rebondir tant que la confiance avec les investisseurs sera rompue.

Les stratégistes de JPMorgan relèvent également un désendettement déjà bien avancé, après le choc de mi-année avec Terra-Luna. Ce qu’ils jugent positif car cela doit permettre un deleveraging plus rapide. Par exemple, les positions des contrats à termes sur le bitcoin sur CME sont revenues à leur niveau de janvier 2020. Pour JPMorgan, la capitalisation des cryptos devrait trouver un plancher de 500 milliards de dollars, contre 1.000 milliards avant l’effondrement de FTX. Au moment de la chute de Luna, la capitalisation avait alors fondu de 50%, à 860 milliards. Le bitcoin pourrait revenir à 13.000 dollars, soit une valeur divisée par plus de cinq par rapport au point haut de 2021.

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Il peut s\u2019installer une spirale assez classique, explique Florent Pochon, strat\u00e9giste chez Natixis. La chute des cours entra\u00eene des appels de marges sur les positions \u00e0 levier provoquant des liquidations forc\u00e9es avec la crainte d\u2019une possible faillite qui acc\u00e9l\u00e8re la volont\u00e9 de sortie des clients de la plateforme. Cela peut aussi provoquer un deleveraging (d\u00e9sendettement) dans certains portefeuilles de g\u00e9rants ou d\u2019investisseurs institutionnels pour faire face aux pertes de m\u00eame que du c\u00f4t\u00e9 des banques pour celles qui financent ces plateformes. Enfin, la corr\u00e9lation entre crypto et actifs risqu\u00e9s est li\u00e9e \u00e0 la liquidit\u00e9 qui se r\u00e9duit fortement avec les conditions mon\u00e9taires et financi\u00e8res et la remont\u00e9e des taux.<\/p>\n»,"format":"light_html"}}

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