Bercy en quête de compromis sur le budget 2023

Le PLF a présenté lundi un budget qui se veut équilibré entre «protection» et «réduction» des dépenses publiques.
Fabrice Anselmi
Le ministère de l’Economie, des Finances et de la Relance à Paris Bercy
Le ministre de l’Economie et des Finances n’exclut pas un recours à l’article 49.3 pour adopter le budget qu’il a présenté lundi 26 septembre 2022.  -  RK.

Le ministre de l’Economie et des Finances a présenté lundi un budget 2023 (projet de loi de Finances, PLF) qu’il a qualifié de «responsable et protecteur dans des temps de grandes incertitudes» liées au contexte macroéconomique et international actuel, et en particulier à l’inflation tirée par les prix de l’énergie. Partagé entre les attentes des deux côtés de l’échiquier politique – plus de rigueur à droite, plus de soutien à gauche –, le gouvernement représenté à Bercy par Bruno Le Maire a fixé ses «lignes rouges» vis-à-vis des oppositions : «Aucune nouvelle dépense qui ne soit financée à l’euro près.» Avec le risque, pas exclu à Bercy malgré les nombreuses discussions entre les partis du gouvernement et l’opposition au Parlement, d’un possible recours à l’article 49.3 pour adopter ce budget.

10.000 fonctionnaires en plus

En valeur absolue, il se montera à 500 milliards d’euros pour 2023 (après 513 pour 2022), dont 432 milliards de budget général (après 445 pour 2022), pour 345 milliards de recettes (après 340 pour 2022). Dans le détail, le gouvernement continue à renforcer les crédits pilotés «par mission», avec notamment : +3,7 pour l’Education (60,2), dont une enveloppe de 935 millions pour financer une augmentation du salaire des enseignants, +3 milliards pour la Défense (43,9), +3 milliards pour le Travail (21), +2 pour la Solidarité (29,8), +1,5 pour la Recherche et l’Enseignement supérieur (30,6), +1 milliard pour l’Intérieur (15,8), +0,7 pour la Justice (9,6)… Avec 31,4 milliards, l’Ecologie recevrait 3 milliards de moins en 2023 qu’en 2022, mais 6,6 de plus que dans la loi de Finances 2022 initiale…

Cela se traduit par une hausse de plus de 10.000 fonctionnaires, notamment pour l’Intérieur (+2.900), la Justice (+2.250), la Défense (+1.550), mais aussi pour le ministère du Travail (+1.000) et pour l’Education nationale (+2.000) où cependant quelque 4.000 créations de postes d’AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap) seront compensées par une diminution des postes d’enseignants en lien avec la baisse attendue du nombre d’élèves (-500.000 entre 2022 et 2027). Le ministre délégué aux Comptes publics, Gabriel Attal, a insisté sur l’objectif d’une stabilité du nombre de fonctionnaires sur la législature.

Au total, les dépenses publiques atteindraient 347,3 milliards (hors charges de la dette, versements divers aux collectivités et à l’Union européenne), en progression de 21,7 milliards par rapport au budget 2022 initial (+6,2%), mais en baisse de 9,6 milliards par rapport au budget 2022 final.

Le gouvernement a également fait le choix de maintenir l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation, pour un coût estimé de 6,2 milliards, et de poursuivre la réduction des impôts de production via une suppression annoncée en juillet de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sur deux ans (-4 milliards en 2023, -4 milliards en 2024).

Quelle trajectoire ?

En valeur relative, le gouvernement assume le maintien d’un déficit à 5% du PIB en 2023 comme en 2022, et d’un ratio dette/PIB autour de 111%... mais en s’appuyant sur une prévision de croissance de 1% avec 4,3% d’inflation pour 2023 (après +2,7% pour 2022 avec 5,4% d’inflation moyenne), alors que la Banque de France table plutôt sur +0,5%, et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) depuis lundi sur +0,6%, comme la plupart des consensus. Le ministre de l’Economie a justifié cet optimisme par la bonne anticipation des problématiques d’inflation, avec un «bouclier tarifaire» sur les prix du gaz et de l’électricité qui sera maintenu afin de contenir la hausse des factures à 15% «au lieu de 100%» en 2023 (coût estimé à 45 milliards pour l’année). Un pari pour soutenir l’économie hexagonale qui s’est avéré gagnant jusqu’à présent, mais apparaît quand même «optimiste» une fois l’acquis de croissance diminué.

Ce pari conditionne également la maîtrise des comptes pluriannuels matérialisée par le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027, et qui vise à ramener le déficit public sous 3% du PIB d’ici à la fin du quinquennat avec la réduction du poids de la dépense publique de 57,6% à 53,8% du PIB. Dans un avis rendu dimanche, le Haut conseil des finances publiques (HCFP) juge cette trajectoire «peu ambitieuse» et, en même temps, particulièrement «fragile» à cause de prévisions gouvernementales trop optimistes en matière de croissance, de maîtrise de la dépense publique et de hausse des prélèvements obligatoires.

La Sécu moins déficitaire ?

Le gouvernement a également présenté le projet de loi de finance de la Sécurité sociale (PLFSS), avec un net redressement attendu des comptes, le déficit étant ramené de 17,8 à 6,8 milliards d’euros entre 2022 et 2023 (en comptant le Fonds solidarité vieillesse, FSV). En déficit de 30,5 milliards en 2020 et 26,1 milliards en 2021, la branche maladie verrait ses pertes réduites de 20,3 à 6,5 milliards entre 2022 et 2023, avec une prévision de -2,6 milliards en 2026, mais avec un transfert de la prise en charge par les complémentaires santé. Seule la branche vieillesse creuserait alors sensiblement son déficit, jusqu’à -15,9 milliards en 2026. Ce PLFSS se fonde sur une hausse de 4,1% des recettes grâce à l’inflation, mais avec une augmentation de 2,1% des dépenses qui inquiète aussi le HCFP : ce dernier dénonce des mesures d’économies «très insuffisantes», en attendant une réforme des retraites qui, promise par le président Emmanuel Macron, ne figure pas dans ce texte mais pourrait rééquilibrer les dépenses du système de près de 8 milliards d’euros d’ici à la fin du quinquennat…

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