Les banques françaises veulent promouvoir plus de femmes à leur sommet

Le patron de la Société Générale vise plus de 35% de femmes dirigeantes d’ici à 2026. L’initiative n’est pas isolée, BNP Paribas espère atteindre 40% de femmes dans son top management dès l’an prochain.
Une femme de dos regarde des buildings par la baie vitrée
Les quotas de femmes dirigeantes imposent aux banques françaises de repenser leurs politiques RH dès la base de la pyramide.  -  Adobestock

Le «plafond de verre» auquel se heurtent les femmes dans la finance est encore une réalité. Mais les grandes banques, poussées par la réglementation et l’accent mis sur leur responsabilité sociétale, ont enclenché un travail de longue haleine afin de féminiser leurs instances dirigeantes. Lors du Capital Markets Day de la Société Générale à Londres le 18 septembre 2023, son nouveau patron Slawomir Krupa ne s’est pas contenté de présenter des objectifs en termes de trajectoire financière. Il a également annoncé vouloir atteindre 35% de femmes dirigeantes à horizon 2026 pour, dit-il, «renforcer la culture de la performance et de la responsabilité» au sein de la banque de la Défense.

L’objectif est en ligne avec celui de la loi Rixain qui impose aux entreprises de plus de 1.000 salariés des quotas de 30% de femmes cadres-dirigeantes et de 30% de femmes membres des instances dirigeantes en 2027, puis de 40% en 2030, sous peine de se voir infliger une sanction financière.

Fin 2023, la Société Générale comptait déjà 30% de femmes dans son cercle de dirigeants, un périmètre couvrant le comité de direction, le comité exécutif et le top management. Lors de sa prise de poste au printemps 2023, Slawomir Krupa avait enclenché le mouvement en recrutant trois femmes au comité exécutif du groupe : Anne-Christine Champion, qui codirige la banque de grande clientèle et solutions investisseurs, la sud-africaine Laura Mather à la direction des opérations, et Delphine Garcin-Meunier comme directrice des activités de mobilité et de banque de détail à l’international. La banque de la Défense peut, au total, se targuer d’afficher la parité au sein de son comité exécutif, ce qui n’est pas encore très répandu dans les entreprises cotées.

Cette démarche n’est pas originale sur la place financière de Paris. BNP Paribas s’est aussi fixé en 2015 des objectifs ambitieux en matière d’équilibre des genres. Son comité exécutif ne comptait alors que 5% de femmes. A effectif constant, elles représentent aujourd’hui le tiers de ses membres. La première banque européenne compte atteindre 40% de femmes en 2025, non seulement au sein de son comité exécutif, mais aussi dans son top 100, top 500 et top 3.000. Elle sera ainsi bien en avance de phase sur la loi Rixain.

Derrière les chiffres, la gestion des talents

Les chiffres affichés par les banques françaises relèvent-ils, en réalité, du «woman washing» pour cocher les cases ? Ces quotas ont, en tout cas, le mérite d’amener les groupes à se questionner sur la gestion de leurs talents et à mettre en place des politiques plus proactives en faveur des carrières féminines. «Fixer des objectifs chiffrés est une étape, et non une finalité. Cela permet de regarder les plans de succession, la relève et la répartition des compétences entre femmes et hommes dans la banque», explique Caroline Courtin, responsable diversité et inclusion de BNP Paribas.

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Au sein de ses «programmes talents», la banque française entend maintenir une stricte parité. Car, pour s’assurer un meilleur équilibre au sommet de la pyramide, il faut déjà disposer d’un vivier suffisant de talents féminins dans les couches managériales intermédiaires. Même son de cloche à la Société Générale qui a lancé deux programmes «accelerate» et «become» dédiés aux talents féminins «identifiés comme potentiels successeurs des postes clés du groupe en France et à l’international». Soutenue par un dirigeant du groupe, chaque promotion bénéficie d’un parcours sur mesure de six à dix mois composé de coaching individuel et collectif et de mentoring.

Les biais plus ou moins conscients dans les processus de recrutement sont, eux aussi, progressivement remis en question. Outre les déséquilibres initiaux dans les filières d’enseignement supérieur, qui peuvent expliquer le manque de candidatures féminines, plusieurs stéréotypes continuent d’être véhiculés sur certains métiers comme la finance de marché. La sociologue Valérie Boussard, qui a enquêté sur le monde du M&A, explique, par exemple, que «l’agilité mathématique est associée aux hommes dans les représentations sociales». BNP Paribas indique repenser ses techniques de recrutement. «Nous travaillons, par exemple, sur le panel de recruteurs pour qu’il ne soit pas constitué uniquement d’hommes, sur les intitulés de fiches de postes en revoyant le vocabulaire utilisé qui peut induire des candidatures genrées. Nous avons aussi instauré depuis longtemps le principe de la mixité pour les short-lists lors des process de recrutement : si nous n’avons pas de candidatures féminines, nous allons les chercher !», explique Caroline Courtin.

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