
La tutelle des banques françaises leur accorde un brevet de résilience

Même si la remontée des taux n’a pas encore produit le coup de fouet attendu, les banques françaises ont dégagé de solides résultats en 2021 ainsi qu’au premier semestre 2022, a rappelé l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) ce mercredi 13 octobre.
Aidé par les politiques de soutien à l’économie, le secteur a bénéficié d’une activité de crédit dynamique en 2021 (+5,9% pour les ménages et +2,6%), ce qui a soutenu la croissance du produit net bancaire (+9,4%). «Cette année exceptionnelle en 2021 a permis au secteur financier de renforcer sa capacité d’absorption des chocs cette année », souligne Dominique Laboureix, secrétaire général de l’ACPR. Au premier semestre 2022, le PNB des banques françaises a encore progressé de 9,1%, grâce notamment à la banque d’investissement et la banque de détail dans l’Hexagone. Si on exclut l’impact de la vente de Rosbank, la filiale russe de la Société Générale, le résultat net des banques françaises a enregistré sa plus forte hausse depuis dix ans.
Vigilance sur le risque de crédit
Face à la guerre en Ukraine et ses conséquences sur le secteur, le superviseur se montre donc « vigilant » mais n’a pas pour autant détecté à ce jour de « signal d’alarme ». La rapidité avec laquelle les taux ont remonté a provoqué « des tensions susceptibles d’entraîner des moins-values financières ou des chocs non anticipés sur la solvabilité de certains emprunteurs ». Le coût du risque a augmenté de 17,2% de manière agrégée pour l’ensemble des banques françaises au cours du premier semestre 2022, conduisant d’ailleurs les banquesà augmenter leurs provisions. Mais cette hausse reste très limitée en comparaison de celle observée sur les marchés nordiques (+95,6%), japonais (+62,7%) ou dans le reste de l’Europe (+57,8%).
Si le risque de crédit reste un point clef de vigilance pour l’ACPR, les banques françaises bénéficient d’un taux de prêts non performants très bas : 2,9% de l’encours de prêts. Elles sont surtout bien capitalisées pour faire face à d’éventuels chocs. Le ratio CET 1 des six grandes banques françaises a baissé de 83 points de base au cours du semestre écoulé, à 14,83%. Mais ce recul est le fruit de la baisse de la valeur de leurs filiales d’assurance qui s’est répercutée sur leur niveau de fonds propres. Il s’agit d’un « sujet technique », et « non d’un point de vigilance », rappelle Dominique Laboureix. Leur ratio de levier reste, en outre, très supérieur à 3%.
Alors que les marchés ont donné des signes de fébrilité croissante – le krach obligataire du printemps, la volatilité sur les matières premières, l’envolée des CDS de Credit Suisse, les déboires des fonds de pension britanniques –, le superviseur ne nie pas la menace pesant sur la stabilité financière mondiale. Mais il estime que la « capacité de résistance aux chocs des banques françaises » est intacte. Parallèlement, ces dernières souhaitent à tout prix échapper au débat sur le niveau de leurs résultats. « Il n’y a pas de superprofits pour les banques », a rappellé le président de la Fédération bancaire française (FBF) et actuel patron de BPCE Laurent Mignon dans une interview jeudi aux Echos.
Des réserves de capital «opportunes»
Le Haut Conseil à la stabilité financière (HCSF) a d’ailleurs décidé de recharger les coussins de fonds propres contracycliques des banques en fin d’année. Conçus pour constituer des réserves destinées à être relâchées en cas de temps difficiles, ces derniers avaient été abaissés à 0% en 2020 pour soutenir la production de crédit et l’activité pendant la crise du Covid. Preuve de la bonne santé des banques françaises, l’autorité, présidée par le ministre de l’Economie, a décidé de remonter le taux de ce coussin à 0,5% puis à 1% en fin d’année « sauf circonstances exceptionnelles ». Il faudra cependant attendre plusieurs mois avant qu’il n’entre réellement en vigueur. « Les banques doivent l’intégrer dans leur capital planning », rappelle Dominique Laboureix.
«Au vu des excellents résultats des banques françaises en 2021 et au premier semestre 2022, nous considérons que le moment est opportun pour reconstituer les réserves. Si, toutefois les conditions macroéconomiques venaient à se détériorer, et que ce coussin n’est plus nécessaire voire devient pénalisant, nous reviendrons sur cette décision », détaille Dominique Laboureix.
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