
Juriste en finance, l’appel d’air

Après la pluie, le beau temps ? Au sein des directions juridiques des banques et des compagnies d’assurances, le gel des recrutements engendré par le début de la crise du Covid-19 a laissé la place à un regain de dynamisme. « La Bourse n’ayant jamais été aussi haute, notre rythme de recrutements s’est même accéléré depuis le premier confinement, révèle Dominique Tanguy, DRH de la banque en ligne Fortuneo. De manière générale, le contexte réglementaire fait que nos besoins juridiques restent importants. La crise ayant entraîné davantage de tentatives de fraudes, nous nous musclons actuellement plus spécifiquement sur des profils autour de la conformité, du contrôle et des risques. » Au gré des nouvelles réglementations, les juristes de banques voient en effet depuis quelque temps leur rôle s’étoffer. Et d’après Marc Vaujany, directeur juridique de Crédit Mutuel Alliance Fédérale, la crise sanitaire aura au moins permis de leur donner la visibilité qu’ils méritent. « Durant cette période, il a fallu se montrer très réactif, et le travail des juristes a été davantage mis en lumière du fait notamment de leur plus forte proximité avec les décisions opérationnelles et stratégiques », assure-t-il.
Côté groupes assurantiels, le constat est sensiblement le même. « En période de crise sanitaire, l’expertise technique des juristes et leur capacité à comprendre les nouveaux textes, à les relayer et à les expliquer ont été particulièrement importantes », souligne Nicolas Magnier, directeur juridique d’Axa France. Mais au-delà d’être un révélateur de talents, la pandémie a nécessité des aptitudes et des connaissances désormais très scrutées lors des recrutements. L’appétence pour le digital se place en pôle position.
« Les juristes bancaires sont actuellement face à une double digitalisation : celle de la banque mais aussi du métier de juriste, rappelle Marc Vaujany. Dans ce contexte, leur faculté d’adaptation et leur curiosité intellectuelle sont donc primordiales, de même que leur capacité à travailler en mode agile. Notre métier est en pleine transformation. » Pour Nicolas Magnier, outre les compétences techniques toujours plus importantes, les qualités les plus recherchées reposent sur trois piliers : l’expertise juridique, le travail en équipe et la capacité à se positionner en véritable business partner. « Nous ne sommes pas là que pour dire les règles de droit, mais aussi pour trouver des solutions et accompagner, commente-t-il. Cela nécessite une qualité d’écoute et d’empathie très forte, et de bien comprendre les contraintes des opérationnels et des commerciaux. La mesure de notre succès repose sur l’impact que l’on a dans l’entreprise. » Côté soft skills, le directeur juridique mentionne l’aisance à communiquer, l’esprit de synthèse et une aptitude à vulgariser les choses. « Les réunions à distance changent aussi la donne, ajoute-t-il. Elles sont plus courtes et il est parfois difficile d’y percevoir les éléments de communication non verbaux ; il est donc indispensable de savoir exprimer son point de vue de manière claire et synthétique. »
Attirer les talents
Difficile en revanche de dénicher la perle rare actuellement… « Le marché est très tendu, il y a peu de candidats », observe Dominique Tanguy. Laquelle n’hésite donc pas à écumer les salons et s’est fixé comme objectif de rendre son entreprise plus présente et visible, au travers notamment de la communication et des médias sociaux. « Le métier de juriste dans la banque et l’assurance souffre d’un déficit d’image, reconnaît de son côté Marc Vaujany. Notre champ d’activité est pourtant désormais très vaste, avec des équipes juridiques pluridisciplinaires. Notre objectif aujourd’hui est donc de faire connaître davantage la richesse de notre métier afin d’attirer de nouveaux talents. »
Outre les promotions internes, la direction juridique du Crédit Mutuel mise sur une multiplication des stages et des recrutements d’alternants en master 1 ou 2 de droit pour remédier à ce problème. Avec un avantage de taille après les confinements successifs : la possibilité de mettre en avant une politique de télétravail plus poussée au sein des grands groupes bancaires que dans de nombreux autres secteurs. « Ce mode de travail plus flexible est bien adapté au métier de juriste bancaire ; c’est un véritable atout en termes de fidélisation des équipes et d’attractivité pour nos candidats, atteste le directeur juridique. La crise sanitaire a amplifié les tendances en matière de télétravail, qui est désormais bien ancré dans les habitudes professionnelles. » Au sein d’Axa, Nicolas Magnier rappelle que les juristes sont désormais capables d’assumer toutes leurs missions essentielles à distance grâce aux nouveaux outils mis à leur disposition. « Les dossiers et la documentation juridiques sont largement dématérialisés, ce qui permet d’avoir accès aux mêmes ressources de partout. De ce point de vue, la pandémie nous a fait progresser de plusieurs années d’un coup, indique-t-il, avant de conclure : il n’y aura certainement pas de retour en arrière sur ces sujets-là. »
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