
Le gestionnaire d’Ehpad DomusVi signe un « jumbo-LBO »

La réorganisation du capital du plus grand groupe français d’Ehpad non coté était à l’étude depuis plusieurs mois. C’est désormais chose faite. DomusVi vient en effet de signer un «jumbo-LBO» avec son partenaire financier historique, le britannique ICG, a appris L’Agefi. A cette occasion, le gestionnaire de maisons de retraite a été valorisé 4,3 milliards d’euros, soit 16,4 fois l’Ebitda (bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements) ajusté 2020.
Cette opération de rachat par effet de levier s’inscrit donc directement comme l’une des plus importantes du capital-investissement français. Elle est au coude à coude avec le «jumbo-LBO» du groupe de laboratoires d’analyses médicales Cerba Healthcare, orchestré deux mois plus tôt par EQT pour 4,5 milliards d’euros. L’an dernier, un autre actif du monde de la santé, Ceva Santé Animale, avait aussi vu sa valorisation grimper à 4,8 milliards d’euros. Mais dans l’Hexagone, le record historique reste encore entre les mains de Solocal, qui avait été racheté par KKR plus de 6 milliards en 2006, avant de dégringoler.
Rééquilibrage des forces
Pour son troisième buy-out, DomusVi a fait le pari de la continuité. ICG est largement familier du groupe d’Ehpad aux 40.000 salariés, qu’il accompagne depuis près de 18 ans. Entre 2003 et 2006, il en avait été l’actionnaire et s’était porté candidat à son rachat en 2014. Mais PAI Partners s’était imposé, ne laissant que 15% des titres à l’investisseur britannique, qui devra attendre trois ans de plus avant d’acquérir 70% du capital du gestionnaire de maisons de retraite, sur la base d’une valorisation de plus de 2 milliards d’euros (12,7 fois l’Ebitda ajusté à l’époque).
«Ici, la nouvelle réorganisation du capital a été voulue par le fondateur Yves Journel, qui a échangé l’an dernier avec ICG dans l’optique de se reluer», commente un proche du dossier. Dans les faits, ce dernier est parvenu à un rééquilibrage des forces dans l’actionnariat en détenant désormais 49% du capital, contre 30% précédemment. Pour parvenir à ce tour de force, l’emblématique figure de DomusVi a réinvesti l’intégralité de sa plus-value de cession et a convié dans sa holding plusieurs co-investisseurs, à savoir, Mérieux (qui injecte 135 millions d’euros), BNP Paribas Agility Capital (l’ex-BNP Paribas Principal Investment) – également investisseur aux côtés d’ICG -, CNP Assurances et les family offices de Philippe Louis-Dreyfus (Stags Participations) et de la famille Roullier, ainsi que Flandrin Finance. Le management, emmené par son président Sylvain Rabuel, a investi environ 50 millions d’euros pour 2% du capital. Le montage financier est complété par la dette senior portable de plus de 1,6 milliard d’euros (soit 6,3 fois l’Ebitda ajusté), à laquelle s’ajoutera une ligne «payment in kind» (PIK) de 400 millions fournie par ICG, à un taux d’intérêt de 11%.
Conquête européenne
Depuis 2015, DomusVi s’est lancé dans une conquête du marché européen. Cette ambition s’est traduite en Espagne, où le groupe est aujourd’hui le principal gestionnaire d’Ehpad du pays, notamment grâce aux rachats successifs de Geriatros, de SARquavitae et de Gerovida. Près de 40% de son chiffre d’affaires de 1,6 milliard d’euros provient ainsi de la péninsule ibérique. Mais la pépite d’Yves Journel voit plus loin. Dans les prochaines années, elle prévoit de se déployer au Portugal, au Pays-Bas, en Irlande, en Belgique, en Allemagne ou bien encore en Italie. De premières pierres ont d’ores et déjà été posées. En 2020, elle a étendu son offre de services au Pays-Bas en prenant 40% du capital de Martha Flora, un spécialiste de l’accompagnement comportemental des troubles cognitifs (dont il détient une option pour prendre le contrôle d’ici 2023). En janvier de cette année, il a aussi acquis Trinity Care, le cinquième plus important opérateur d’Irlande avec huit résidences médicalisées.
D’ici 2025, DomusVi pense être en mesure de faire progresser son chiffre d’affaires jusqu’à 3,4 milliards d’euros et son Ebitda à 630 millions. Une métamorphose qui impliquera inévitablement une ambitieuse stratégie de croissance externe. «Le marché européen reste encore extrêmement fragmenté, mais DomusVi doit désormais concourir avec des groupes très structurés comme Colisée et Domidep, respectivement détenus par EQT et I-Squared», fait remarquer un professionnel du secteur. Sans oublier les grands concurrents cotés du secteur, Orpea et Korian, aussi bien actifs en France qu’à l’étranger.
Plus d'articles du même thème
-
Altaroc dévoile les contours de son millésime Odyssey 2025
La plateforme donnant accès au private equity pour les particuliers investira, pour cette cinquième génération, dans sept à huit fonds américains et européens et dans quelques co-investissements. -
Otium Partners soutient la création d'un nouveau champion français de l'expertise comptable
Grâce à une levée de 50 millions d’euros auprès d’Otium Partners, les fondateurs d'Archipel veulent bâtir un leader national capable de relever les défis générationnels, technologiques et économiques d'un secteur encore fragmenté. -
Le Groupe Magellim accentue sa diversification
Il revoit sa structuration pour s’affranchir de son image d’acteur immobilier. Le groupe veut se renforcer sur les valeurs mobilières et notamment le private equity. Une acquisition devrait être annoncée dans les prochains mois.
Sujets d'actualité
ETF à la Une
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions