Avec le Lightning Network, Bitcoin entrevoit une adoption de masse

Le Lightning Network ouvre un nouvel horizon au bitcoin, pour l’adapter aux paiements du quotidien et favoriser ainsi une plus grande démocratisation, dont dépend peut-être sa survie.
Louis Tellier
Bitcoin
Une dizaine de minutes, c’est le temps moyen d’attente pour qu’un «bloc» soit «miné», et la transaction validée – trop long pour payer sa baguette de pain. D’où l’idée de transactions passées sur des canaux dérivés avant d’être réintégrées à la blockchain Bitcoin.  -  Bloomberg

Dès la naissance du bitcoin, en 2009, la ou les personnes derrière le pseudonyme de Satoshi Nakamoto pointaient du doigt la nécessité de développer un système permettant au réseau d’augmenter sa scalabilité, autrement dit le nombre de transactions possibles par seconde, pour qu’il soit véritablement adopté massivement comme moyen de paiement. Actuellement, la blockchain Bitcoin est capable de supporter entre trois et sept transactions par seconde (TPS), en fonction de la demande, quand un réseau comme Visa culmine à plus de 1.700 TPS. Un état de fait qui permet aux détracteurs de la reine des cryptomonnaies de pointer l’inutilité du réseau, en insistant sur son utilisation essentiellement à des fins spéculatives.

Après quelques propositions infructueuses de la part de développeurs de la communauté, les chercheurs Joseph Poon et Thaddeus Dryja ont présenté, le 28 février 2015 à New York, un modèle de «système décentralisé, dans lequel les transactions sont envoyées sur un réseau de canaux de micropaiement dont le transfert de valeur se fait en dehors de la chaîne de blocs», baptisé Lightning Network. La promesse est d’augmenter le nombre de transactions par seconde, tout en conservant le caractère décentralisé et de confidentialité sans mettre en péril la sécurité du réseau, qui n’a pour le moment jamais été mis en défaut.

Paiements du quotidien

Pour cela, le réseau Lightning Network va agir comme couche superposée à la blockchain Bitcoin pour ne pas saturer les blocs, qui ont une capacité limitée. Lorsque deux entités veulent effectuer une transaction entre elles, elles vont ouvrir un canal leur permettant d’effectuer le paiement. Pour éviter d’avoir trop de canaux ouverts – ce qui est ingérable pour les particuliers –, n’importe qui peut proposer son «nœud», sur lequel il bloquera une somme de bitcoins.

Lors d’une transaction, pour éviter d’avoir trop de canaux ouverts, le payeur passera par le nœud proposé par une plateforme d’échange, comme Coinbase. En réalité, il va payer Coinbase, qui se chargera ensuite de rémunérer le bénéficiaire de la transaction. A la fin du processus, celle-ci sera inscrite dans la blockchain principale. Au passage, Coinbase perçoit une très faible commission. Un système qui permet de ne pas attendre une dizaine de minutes – le temps moyen pour qu’un bloc soit «miné» – pour payer, par exemple, une baguette de pain. «Sur le long terme, l’idée est d’utiliser la ‘blockchain’ principale pour les plus grosses transactions et le Lightning Network pour les plus petites, par exemple celles du quotidien», précise Bastien Teinturier, développeur chez Acinq, une start-up française parmi les plus influentes sur le développement de ce réseau, et qui en possède un des plus gros nœuds.

Répartir la liquidité

Rendu opérationnel en 2018, le Lightning Network compte à ce jour près de 17.800 nœuds, pour 4.600 bitcoins mis à disposition dans ses canaux, au nombre de 86.500 selon le site 1ML. Un rapport d’Arcane Research indique que le volume des paiements du réseau a augmenté de 400% entre le premier trimestre 2021 et le premier trimestre 2022. «En pratique, aujourd’hui il y a plus de liquidité sur le réseau par rapport aux besoins en paiements, donc il n’y a aucun problème de scalabilité. Mais dans le cadre d’une adoption de masse, il est nécessaire de trouver des modèles pour correctement répartir les liquidités disponibles», explique Bastien Teinturier. Selon le développeur, il n’existe pas encore à ce jour une modélisation de répartition «assez efficace» pour gérer des millions, voire des milliards, de demandes.

Des plateformes importantes, comme Bitfinex ou Kraken, se sont déjà positionnées sur ce futur marché. La crainte liée au développement d’un tel réseau est de voir émerger des nœuds géants avec un pouvoir de contrôle sur le Lightning Network et, donc, de mise à mal des principes de décentralisation et d’incensurabilité du bitcoin. «C’est pour cela qu’il est important que n’importe qui puisse proposer son propre nœud, pour que les utilisateurs aient le choix et ne soient pas uniquement obligés de choisir entre deux ou trois mastodontes à la Visa ou Mastercard», poursuit le développeur d’Acinq, pour qui la survie de Bitcoin dépend de sa capacité à améliorer sa scalabilité : «Comme toutes monnaies, il faut que cela circule. Dans le cas contraire, il n’y aurait aucune activité sur les blocs, et les ‘mineurs’ n’auraient plus intérêt à sécuriser le réseau. Le Lightning Network est un moyen d’augmenter l’activité sur Bitcoin.»

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