
L’affaire Orpea prend de court les investisseurs institutionnels

Cruelle désillusion. Les mutuelles santé, institutions de prévoyance, groupes de protection sociale et caisses de retraite avaient choisi d’investir dans Orpea par proximité avec leurs propres métiers et dans l’espoir d’un rendement « responsable » dans le « bien vieillir ». Le scandale qui ébranle le groupe de maisons de retraite et a provoqué l'éviction du directeur général Yves Le Masne, après la parution d’un ouvrage dénonçant les pratiques de la société, embarrasse désormais ces actionnaires.
« Nous avons été extrêmement choqués par les révélations de l’enquête journalistique. Nous n’avions bien évidemment pas connaissance de cette situation », indique-t-on chez CNP Assurances qui dispose d’une participation de 1,5% dans Orpea, dans le cadre d’un mandat de gestion et différents fonds. Le principal actionnaire, le fonds de pension Canada Pension Plan Investment Board, qui détient 15% du capital, n’a pas souhaité répondre à nos questions.
Même si le secteur est exposé aux controverses, les investisseurs ont été surpris. « Nous n’avons reçu aucun signal d’alerte sur le groupe, qui n’a pas connu d’affaires de maltraitance. Les enquêtes de satisfaction sont bonnes. Les analyses des brokers financiers et des agences de notation extra-financières sont également favorables », rapporte Henri Chaffiotte, directeur général de la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France (CARMF) qui détient 14 millions d’euros d’actions d’Orpea, soit 2% de son portefeuille actions en direct. La caisse est par ailleurs un peu exposée au leader français Korian (0,1%), dont le cours a aussi chuté. La baisse du titre d’Orpea affecte peu (-0,6%) la poche actions de la CARMF qui a conclu l’année 2021 sur une hausse de 30%.
« A aucun moment les agences de notation consultées n’ont alerté sur de tels niveaux de risques de controverse », appuie Aurélien Bon, directeur des investissements d’Harmonie Mutuelle, dont le groupe prend « la mesure de la gravité de la situation ». La CARMF savait que « le secteur était délicat » mais faisait confiance au groupe. « Nous avons été un gestionnaire et investisseur de trois maisons de retraite jusqu’en 1990. Cette expérience a été décevante car nous n’avions pas la spécialité requise ni la taille critique. Des grands groupes comme Korian et Orpea nous semblaient mieux placés pour apporter une qualité de service et être rentables », déclare Henri Chaffiotte.
Enquête déterminante
Pour compléter son analyse extra-financière, Harmonie Mutuelle a adhéré à la fédération syndicale UNI Global Union « qui évalue le groupe Orpea et établit une relation de dialogue en vue d’une amélioration continue des conditions de travail et de la qualité des soins délivrés ». Un rapport d’évaluation est attendu dans les semaines à venir.
Harmonie Mutuelle rappelle également que l’ensemble de ces investissements est géré par des délégataires. Les regards se tournent vers eux. « Nous avons demandé à notre asset manager des éclaircissements », indique CNP Assurances qui est par ailleurs investisseur dans des établissements de santé, des résidences seniors et, de façon très marginale, des maisons de retraite médicalisées (Ehpad). Un gérant confie qu’une réunion d’urgence a été organisée à la demande de plusieurs de ses clients. A la lumière des enquêtes qui seront menées, les institutionnels se disent à prêts à « prendre leurs dispositions » sur le titre.
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