
L’activisme européen atteint un niveau historique

La vague de l’activisme submerge le Vieux Continent. La dernière édition du rapport de Lazard confirme nettement le phénomène. Si les sociétés ciblées par les campagnes des activistes étaient à 70% nord-américaines en 2015, ce pourcentage s’est réduit à 60% l’an passé. Et l’hégémonie des activistes américains est aujourd’hui remise en cause par l’émergence d’acteurs européens. Au cours des trois premiers mois de l’année, 71% des nouvelles campagnes en Europe ont été lancées par des activistes locaux – une part qui n’était que de 58% en 2019 et de 47% en 2018.
Elliott conserve cependant son statut d’activiste le plus actif du Vieux Continent, avec la mise en orbite de trois campagnes au premier trimestre, dont l’une portant sur Arkéma. Fin février, le fonds dirigé par Paul Singer a pris une petite participation dans le groupe français de chimie – lequel s’affaire depuis à une revue stratégique de son portefeuille.
Mais l’une des campagnes les plus médiatisées dans l’Hexagone est le fait d’un acteur britannique : Amber Capital. Entrée au capital de Lagardère en 2011 et détenant aujourd’hui la place de premier actionnaire avec près de 16,4% du capital, la structure fondée par Joseph Oughourlian poursuit actuellement son bras de fer avec Arnaud Lagardère sur la gouvernance et l’orientation stratégique du groupe. Un duel à l’issue incertaine. Si Amber peut se targuer d’avoir reçu le soutien du puissant conseil en vote (proxy advisor) Institutional Shareholders Services (ISS) sur la révocation de 50% des membres du conseil de Lagardère – y compris son président –, Arnaud Lagardère aurait reçu le soutien financier de Marc Ladreit de Lacharrière et de Vincent Bolloré pour contrecarrer les plans du fonds américains, selon Les Echos.
Les deux plus importantes campagnes observées sur le marché européen au premier trimestre sont à mettre au crédit d’Harris Associates et de Third Point. Le premier a investi 2,5 milliards au capital de l’allemand Daimler, tandis que le second a mis 2,4 milliards de dollars sur la table pour se frayer une place au capital de l’assureur britannique Prudential.
Effondrement en mars
Mais au niveau mondial, la crise du coronavirus a rebattu les cartes. Le nombre de campagnes hebdomadaires est passé de 7 à 4 entre février et mars, tandis que les montants déployés chaque semaine pour ces opérations ont fondu de 2,8 à 0,3 milliard d’euros. «Avec l’impact du Covid-19 en mars, il y a eu de nombreuses réactions différentes de la part des activistes. L’une d’entre elles est que nous avons vu plusieurs de ces acteurs accroître leur participation dans le cadre des campagnes existantes», souligne Jim Rossman, responsable du Shareholder Advisory Group chez Lazard. Ce fut notamment le cas, dans l’Hexagone, de Ciam et de Cevian Capital – ce dernier ayant renforcé sa détention au capital de Rexel, de 17,6% à 20,1%. Le fonds piloté par Catherine Berjal et Anne-Sophie d’Andlau a quant à lui profité de l’effondrement de l’action d’Europcar, le 16 mars, pour accroître sa participation de 5% à 10,5%.
A la fin du mois, Ciam a aussi adressé un courrier aux actionnaires de Scor pour dénoncer une nouvelle fois la rémunération des dirigeants du réassureur et l’absence de séparation des fonctions de président et de directeur général, cumulées par Denis Kessler. A l’inverse, Elliott de son côté a fait savoir que les conditions de marché l’ont amené à solder sa position dans Altran, capitulant face à Capgemini.
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