
Elon Musk joue à quitte ou double pour croquer Twitter

Une petite phrase a suffi pour mettre Twitter et ses actionnaires en émoi. « J’ai fait une offre… », a lancé Elon Musk sur le réseau social, jeudi en début d’après-midi, avec un lien vers un document publié par la Securities and Exchange Commission (SEC) – le gendarme de la Bourse américaine. Après avoir agité le petit monde des réseaux sociaux à coup de sondages et de questions concernant Twitter postés… sur Twitter, puis en prenant une participation de 9,2% au capital du réseau social, Elon Musk vient de confirmer qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle facétie.
Selon les termes de cette déclaration, Elon Musk propose de racheter la totalité du capital de Twitter au prix de 54,20 dollars par action. L’offre, 100% en numéraire, valorise le réseau social 43 milliards de dollars. Elle représente une prime de 18,20% sur le cours de clôture du 13 avril et de 39% sur le niveau du 1er avril, avant que la prise de participation initiale du fondateur de Tesla ne soit rendue publique.
Cette proposition n’est pas contraignante, et il n’y a aucune certitude que la transaction soit réalisée. La société Twitter n’est pas non plus tenue d’y répondre. De son côté, Elon Musk a tout loisir de continuer à faire évoluer sa position. Il peut acquérir, conserver ou vendre toute action qu’il détient dans la société.
Les actionnaires de Twitter en sont bien conscients, car si le cours de Bourse de la société a progressé d’environ 2% après cette annonce, à 46,7 euros, il reste inférieur de près de 15% au montant proposé par Elon Musk.
Les analystes restent partagés sur cette opération. Certains estiment qu’elle devrait se faire, d’autres que son prix est trop bas, d’autres encore se méfient de l’impact que pourrait avoir à court terme une volte-face d’Elon Musk. De son côté, l’équipe de recherche de JPMorgan ne s’attend pas à ce que l’offre soit acceptée par le conseil d’administration de Twitter. «Nous pensons que les actions ont un potentiel de hausse nettement plus important si la direction est en mesure d’exécuter son plan d’innovation sur le produit, d’augmenter la base d’utilisateurs d’environ 20% et de développer la publicité », explique JPMorgan.
Des interrogations se posent aussi sur la manière dont un tel rachat pourrait être financé. Avec une fortune estimée aux environs de 250 milliards de dollars, Elon Musk, devrait pouvoir réunir les fonds nécessaires à l’opération. Cependant, elle ne serait pas sans conséquence car elle impliquerait de vendre des actions Tesla ou de recourir à un prêt gagé par ces mêmes actions. D’ailleurs, après cette annonce, l’action Tesla chutait de plus de 3%, dans un marché américain en baisse de 0,5%.
Message reçu
Le réseau social a réagi en déclarant via un communiqué avoir bien reçu cette offre «non sollicitée». «Le conseil d’administration de Twitter examinera attentivement la proposition afin de déterminer la ligne de conduite qu’il estime être dans le meilleur intérêt de la société et de tous les actionnaires».
Cette attention portée par le conseil d’administration de Twitter est compréhensible. Car même si le prix proposé reste bien inférieur aux 77 euros touchés par l’action du réseau social en 2021, son cours actuel reste équivalent à celui observé lors de son introduction en Bourse en 2013. A l’époque, la société avait fait ses premiers pas à Wall Street à 46 dollars. Malgré ses revenus supérieurs à 5 milliards de dollars en 2021, ceux-ci demeurent inférieurs aux attentes des marchés. La société, qui a enregistré une perte de 221 millions l’année dernière, a toujours du mal à monétiser son audience et convaincre les investisseurs.
«Potentiel extraordinaire»
Le 9 avril dernier, Elon Musk aurait dû être nommé administrateur de l’entreprise avant qu’il ne décide au dernier moment de décliner. Accepter ce poste l’aurait contraint à ne pas dépasser le seuil des 14,9% du capital jusqu’en 2024.
Dans son message à Bret Taylor, président de Twitter, révélé par la SEC, le milliardaire indique qu’il «investit dans Twitter car il croit en son potentiel d’être la plateforme de la liberté d’expression dans le monde, et [il] croit que la liberté d’expression est un impératif sociétal pour une démocratie qui fonctionne». Il juge toutefois que dans son état actuel «l’entreprise ne favorise ni ne sert cet impératif» et que «Twitter a besoin d’être transformé». Il prévient par ailleurs que son offre de 54,20 dollars par action est sa «meilleure et dernière offre». «Si elle n’est pas acceptée, il faudra que je reconsidère ma position en tant qu’actionnaire», poursuit-il avant de conclure : «Twitter a un potentiel extraordinaire. Je vais le libérer». Mais pas à n’importe quel prix.
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