Chez Volkswagen, la cogestion ne fait plus recette

En s’attaquant à la vache sacrée de l’emploi en Allemagne, le nouveau patron de VW électrise le corps social du constructeur allemand, dont la gouvernance est devenue une source de faiblesse. L'éditorial d’Alexandre Garabedian.
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Alexandre Garabedian
Alexandre Garabedian  -  Alexandre Garabedian

Oliver Blume ne manque pas de courage. Aux commandes de Volkswagen depuis deux ans, le dirigeant vient de briser un tabou en évoquant la fermeture d’usines en Allemagne et la fin de la garantie de l’emploi, pour permettre au constructeur automobile de réduire ses coûts. Du jamais-vu en 87 ans d’existence du géant de Wolfsburg. Si le patron est prêt à croiser le fer au pays de la cogestion avec le puissant syndicat IG Metall, c’est que VW va mal. Moins rentable que ses concurrents, en perte de vitesse en Chine, confronté en Europe à la déferlante des véhicules électriques chinois à bas coûts, le groupe ne peut plus faire l’autruche devant la menace existentielle qui pèse sur l’industrie automobile allemande. Après s’être allié à l’américain Rivian pour accélérer un virage mal négocié vers l’électrique et avoir annoncé avant l’été la fermeture de l’usine Audi de Bruxelles, le voilà tenté de licencier sur ses terres.

Encore faut-il que sa gouvernance si particulière ne le contraigne pas à l’immobilisme. Volkswagen est contrôlé par le clan Porsche, qui détient 32% du capital et 53% des droits de vote. Sans le soutien de la famille, Oliver Blume n’aurait pu se permettre de déterrer la hache de guerre. Mais au conseil de surveillance, les représentants des 120.000 salariés outre-Rhin font et défont les rois. Ils occupent dix des vingt sièges et peuvent, avec l’appui des deux administrateurs du Land de Basse-Saxe, détenteur de 20% des droits de vote, imposer leurs vues au directoire. Herbert Diess, le prédécesseur d’Oliver Blume, avait ainsi été débarqué sans ménagement de la présidence pour s’être opposé trop frontalement à Daniela Cavallo, la syndicaliste en chef de VW.

Frappé par la crise au début des années 90, le groupe s’était tiré d’affaire en négociant le passage à la semaine de quatre jours, assorti de baisses de salaires. Trois décennies plus tard, le voilà au seuil d’un conflit social qui pourrait durer des mois et laisser de profondes traces. Sur les marchés, la décote de gouvernance est bien visible. Distancé en Bourse par ses grands concurrents, le parangon de la «Deutsche Qualität» vaut dorénavant à peine plus que le prix de sa participation de 75% au capital de Porsche.

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