Xi et la motion de censure des marchés

Les investisseurs étrangers ont des raisons de revoir leurs positions sur la Chine, au vu des perspectives politiques et économiques du pays.
Alexandre Garabedian
Alexandre Garabedian
Alexandre Garabedian, directeur de la rédaction de L’Agefi.  -  L’Agefi

Singulier spectacle que celui offert par le XXe congrès du Parti communiste chinois. Xi Jinping y a fait étalage de sa toute-puissance, s’assurant un troisième sacre à la tête du pays après avoir fait modifier la Constitution en ce sens il y a quatre ans. L’homme fort de Pékin a exclusivement peuplé le nouveau Politburo d’affidés de longue date, repeignant l’instance à ses couleurs sans se soucier de ménager une place à d’autres factions. La stupéfiante expulsion de son prédécesseur Hu Jintao en clôture du congrès, devant les caméras du monde entier et les mines impassibles des participants, ne saurait mieux témoigner de cette mainmise d’un homme sur le destin de la deuxième puissance économique mondiale.

Le message, moyennement subtil, a été reçu cinq sur cinq par les investisseurs étrangers. Ils se sont dépêchés, dès l’ouverture des Bourses de Shanghai et Hong Kong, de liquider leurs positions. Un exode qui s’ajoute aux sorties de capitaux massives que le pays enregistre cette année, et dont on voit mal comment il pourrait s’inverser à brève échéance.

Relégué au second plan

Pour des acteurs mondiaux, prendre un pari sur les marchés financiers chinois revient d’abord à miser sur des décisions politiques à la transparence et à la lisibilité aléatoires. Le troisième couronnement de l’empereur Xi leur promet, à cet égard, davantage de dirigisme économique, de coups de canif à la propriété privée et de risque géopolitique, au moment où le régime de croissance de la Chine ralentit structurellement. Or, la décennie précédente a déjà déçu leurs espoirs de rendement. Devenue la locomotive de la croissance mondiale au sortir de la crise de 2008, et désireuse d’ouvrir ses marchés financiers aux non-résidents, la Chine n’a pas converti son ascendant en surperformance boursière.

En faisant de la «sécurité nationale» face à l’Occident sa boussole – géopolitique, militaire, technologique –, l’homme fort de Pékin semble aujourd’hui reléguer le développement économique au second plan et l’autocentrer. Une économie dont la plupart des voyants sont au rouge. Il lui faut employer deux fois plus de capital qu’il y a dix ans pour engendrer la même croissance du produit intérieur brut. Sa démographie déclinante lui promet des taux de croissance bien plus bas à l’avenir. Si le rattrapage de la Chine depuis trente ans a pu être comparé à celui des dragons asiatiques dans les années 1960, c’est plutôt au Japon du début des années 1990 que le pays ferait penser aujourd’hui – une nation confrontée à un endettement massif, à une crise immobilière et aux limites d’un modèle tourné vers les exportations, mais où le revenu médian par habitant resterait loin des standards américains et européens. Rien d’étonnant à ce que les investisseurs prennent leurs jambes à leur cou.

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