Retraites, la demi-vérité des chiffres de la Cour des comptes

En maintenant l'écran de fumée autour du déficit des retraites des fonctionnaires, l’institution de la rue Cambon escamote le nécessaire débat sur la place des pensions dans la dépense publique. L'éditorial d’Alexandre Garabedian.
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Alexandre Garabedian, directeur de la rédaction de L'Agefi  - 

Mal compter les choses, c’est ajouter au malheur de nos finances publiques. La Cour des comptes a livré sa «vérité des chiffres», selon le mot de son président Pierre Moscovici, sur la trajectoire de notre système de retraite. Le verdict est sans appel. Les déficits atteindront 15 milliards d’euros par an d’ici à 2035 sans nouvelle réforme, et le double dans vingt ans. Il est aussi incomplet. En écartant la méthode de calcul défendue par l’inspecteur des finances Jean-Pascal Beaufret et reprise à son compte par le premier ministre François Bayrou, l’institution a choisi de maintenir l’épais brouillard autour des retraites des fonctionnaires. Un écran de fumée qui cache un trou estimé aujourd’hui à 80 milliards d’euros et expliquant près de la moitié du déficit public.

Les sages de la rue Cambon ont beau jeu d’expliquer que ces arguties comptables ne changent rien aux équilibres globaux. Il n’y a pas, en effet, de déficit caché. La poche de l’Etat employeur, obligé de surcotiser pour équilibrer le régime, et celle du contribuable, sont au fond la même chose. Mais l’absence de présentation globale des dépenses et des recettes biaise les débats. Pierre Moscovici l’avoue lui-même à demi-mot : afficher d’emblée l’abyssal déficit des retraites des fonctionnaires, c’était prendre le risque de braquer une partie des partenaires sociaux et de tuer dans l’œuf les négociations qui vont s’ouvrir entre patronat et syndicats.

Le fameux conclave traitera donc d’une situation grave, mais pas aussi désespérée qu’elle ne l’est en réalité. Avec la demi-vérité voire le mensonge par omission de la Cour des comptes, le risque est d’aboutir une nouvelle fois à des bricolages paramétriques autour de l’âge de départ, de la durée et du niveau de cotisation. Sans jamais questionner le choix de société qui mène peu à peu la France dans l’impasse : celle d’un pays de vieux, dirigé pour les vieux, qui sacrifie au niveau de vie des retraités celui des jeunes actifs, et au maintien des pensions actuelles les investissements dans l’avenir.

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