
Les marchés dressent un tableau pessimiste pour 2019

Les années se suivent et ne se ressemblent pas. Alors que 2018 avait débuté sur un fort élan d’optimisme des investisseurs concernant les perspectives de croissance mondiale, les faits ont créé une profonde déception et terni les attentes pour 2019. La montée des risques sur les issues du Brexit et de la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, ainsi que la situation politique et budgétaire en Italie menaçant l’ensemble de la zone euro, ou bien l'évolution de certains pays émergents (Argentine, Brésil, Turquie, Afrique du Sud, Mexique) ont fait plier l’activité à la fin de l’année dernière.
La croissance du PIB réel dans la zone G20 a ralenti à 0,8% au troisième trimestre 2018, après 1% au trimestre précédent, avec une contraction de l’activité au Japon, en Allemagne, en Italie, et en Turquie, ainsi qu’un ralentissement en Australie, Inde, Russie, Chine, Europe, au Canada, et aux Etats-Unis. Malgré des prévisions de croissance mondiale de l’OCDE toujours solides de 3,5%, pour cette année et 2020, elle devrait se rapprocher de son potentiel aux États-Unis à 2,1%, après avoir atteint 2,9% en 2018, et reculer à 1,6% dans la zone euro, après 1,9% prévu pour 2018, et même à seulement 6% en Chine.
Crainte d’une récession
Ce pessimisme et ces risques expliquent la correction enregistrée sur les marchés au cours du dernier trimestre 2018 avec un regain d’aversion au risque du fait d’une crainte : que 2019 marque la fin du cycle de croissance dans les grands pays développés et ouvre la voie pour une récession dès 2020. Les rendements 10 ans des Treasuries et du Bund ont chuté de 50 pb depuis début novembre et de 55 pb depuis février à des niveaux de 2,75% et 0,24%. Le 10 ans canadien est repassé sous les 2% pour la première fois depuis un an et le taux japonais est retombé en négatif pour la première fois depuis septembre 2017.
Les marchés actions n’ont pas été épargnés par ce mouvement avec une lourde chute de l’indice S&P 500 de 20% depuis ses plus hauts atteints mi-septembre qui ont fait basculer sa performance annuelle en territoire négatif, à -9%. L’EuroStoxx 50 a clôturé l’année 2018 sur une baisse de 16,2%, et l’indice MSCI Monde a chuté de 14%. La dernière fois que les actions avaient accusé pareille dégringolade remonte à 2011, mais la performance avait alors été positive sur les obligations. L’année 2018 sera marquée par le triste record d’une performance mondiale négative, tant sur le marché actions que sur l’obligataire.
Dans ce contexte, les marchés n’anticipent désormais plus aucune hausse de taux de la Fed au cours de cette année, alors qu’ils en prévoyaient encore deux supplémentaires début novembre, ce qui aurait permis de les faire repasser au-dessus du seuil symbolique des 3%. Le spread entre le niveau de taux Fed funds et le rendement 10 ans, mesurant la pente de la courbe américaine et bon indicateur de l’état d’avancement du cycle monétaire, a même chuté à seulement 28 pb la semaine dernière, son plus bas niveau depuis le début 2008, le marché anticipant ainsi déjà la fin du resserrement de la Fed.
Mesures de relance budgétaire en Chine
Au sein de la zone euro, la normalisation des taux de la BCE pourrait ne jamais voir le jour, malgré les propos toujours confiants de l’autorité, qui souhaite procéder à son premier relèvement à partir de l’été prochain. Aucune hausse n’est ainsi attendue cette année par le marché. Comme aux Etats-Unis, les anticipations d’inflation en zone euro ont fortement décroché en fin d’année dernière pour tomber à seulement environ 1,3% et s’éloigner ainsi encore davantage de l’objectif de 2% poursuivi par la BCE.
En Chine, la PBoC a déjà accéléré son processus de resserrement monétaire en fin d’année dernière, en lançant une facilité de prêts à moyen terme, similaire aux TLTRO de la BCE, qui vise à stimuler la distribution de crédits bancaires aux PME et aux sociétés du secteur privé. Face aux signes croissants de ralentissement de l’activité, ainsi qu’à la chute de son marché actions de près de 25% en 2018, soit la plus forte au monde, les autorités ont également annoncé des mesures de relance budgétaire par la baisse des impôts pesant sur les sociétés et sur les ménages. La Chine ne semble toutefois pas prête à abonner le désendettement de l’économie, et à se lancer dans une relance similaire à celle de 2008.
Malgré une période de répit en fin d’année, les marchés émergents ont vu leurs devises chuter d’environ 11% et les actions de 24% en moyenne en 2018, et leur spread s’écarter de 130 pb pour atteindre un niveau de 430 pb, le plus haut depuis mi-2016, et restent dépendants de la situation chinoise.
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