
L’émission obligataire de LVMH relance le débat sur les achats d’actifs de la BCE

Malgré les craintes économiques liées au coronavirus, le marché primaire corporate en euro a battu la semaine dernière un record d’émissions hebdomadaire avec 26,5 milliards d’euros placés. Le dernier record datait de mars 2016 quand l’émission d’Anheuser Busch InBev (13,25 milliards) avait porté le total hebdomadaire à 23,6 milliards. La semaine passée, outre deux opérations jumbo réalisées par IBM et Comcast, LVMH est venu refinancer une partie de son acquisition du joaillier américain Tiffany pour 14,7 milliards d’euros. Le groupe de luxe a levé 9,3 milliards d’équivalents euros sur sept tranches : cinq en euros (7,5 milliards) et deux en livres sterling (1,55 milliard). La demande a atteint 27 milliards d’équivalents euros. L’émission à taux variable à 2 ans a été placée avec un rendement Euribor 3 mois plus 13 points de base (pb), celle à 4 ans avec un rendement négatif de -0,07% et un spread de 22 pb. LVMH a bénéficié de la forte demande, mais aussi de la récente baisse des taux. Les autres obligations portaient sur des échéances à 6 ans, 8 ans et 11 ans, et sur 3 et 7 ans pour les obligations en livres, entièrement swapées en euros. Le coût de financement total est de 5 pb, note le groupe de luxe, sachant que le solde pourrait être financé par de la dette court terme et que le financement total de la transaction serait à taux négatif.
Ces conditions de financement favorables sont notamment dues au programme de rachat d’obligations corporates (CSPP) de la Banque centrale européenne (BCE). Un groupe de parlementaires italiens a demandé à cette dernière si elle comptait participer à cette émission et si cela n’équivalait pas à financer le rachat de Tiffany par LVMH avec de l’argent public. Christine Lagarde a répondu que les émetteurs des obligations achetées par la BCE étaient libres d’utiliser les fonds levés comme ils le souhaitent.
De fait, le CSPP est un programme d’achats «collé» à la photographie du marché. «Nous achetons les titres éligibles à proportion du marché, indique une porte-parole de la BCE. Les titres verts représentent par exemple 20% des titres en circulation dans le marché. Donc 20% de nos achats.» Ce que la BCE appelle la «neutralité de marché», principe-clé pour ne pas provoquer de distorsion. La BCE a publié une étude pour montrer que tout le marché bénéficie du CSPP, mais pourrait quand même aborder le sujet lors de sa revue stratégique.
{"title":"","image":"213939»,"legend":"","credit":"Illustration L\u2019Agefi."}
Plus d'articles du même thème
-
Le risque de surenchère tarifaire tétanise les marchés
La riposte de la Chine aux tarifs douaniers réciproques de Donald Trump a exacerbé le risque d'escalade et de récession, plongeant les marchés financiers encore davantage dans la tourmente. Wall Street accuse sa pire chute depuis la crise Covid. L'Europe efface ses gains de 2025. Les investisseurs fuient vers les emprunts d'Etat. -
Les gérants de crédit continuent de s’ajuster à la nouvelle donne
Les panélistes de L’Agefi sont de plus en plus prudents face au risque d’écartement des spreads, toujours serrés, en cas de fort ralentissement de la croissance suite au choc des tarifs douaniers. -
EXCLUSIF
Les gestionnaires de taux contiennent leur panique
Les prévisionnistes de L’Agefi tendent à ajouter une baisse de taux à six mois tout en diminuant leurs prévisions pour les taux longs aux Etats-Unis et en augmentant celles sur la zone euro.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions