Le système de cantonnement ne réglera pas par miracle la dette Covid

Le ministre des Finances défend cette solution. Mais sa réussite dépendra fortement de la croissance française dans le futur.
Fabrice Anselmi

La présentation du Projet de loi de finance (PLF 2022) réserve une nouveauté : la mise en place d’un système de cantonnement de la dette Covid, mécanisme évoqué dès mi-2020. Bercy estime la hausse exceptionnelle de l’endettement public de l’Etat due à la crise du Covid à 230 milliards d’euros entre 2020 et 2021, par rapport aux prévisions de 2019, dont 165 milliards pour l’Etat et 65 milliards pour la Sécurité sociale. L’amortissement de cette dernière avait été voté par le Parlement dès août 2020 dans le cadre du transfert de 136 milliards de dette sociale de l’Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss) à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades). «Mais avec pour contrepartie de prolonger pour dix ans un impôt régressif, la contribution à la réduction de la dette sociale (CRDS), dont il était pourtant prévu de le faire disparaître en 2023», rappelle Anne-Laure Delatte, économiste au CNRS Laboratoire d’Economie de l’université Paris-Dauphine PSL.

Pour la dette Covid, le gouvernement propose de la «tracer» dans un but pédagogique, via une dotation dans le cadre d’un engagement avec la Caisse de la dette publique, qui a géré par le passé le produit des privatisations. Objectif : la rembourser «par les fruits de la croissance, dont résulteront les surcroîts de recettes, et non par des hausses d’impôts», «selon une trajectoire crédible de désendettement sur 20 ans à partir de 2022».

L’idée est d’extraire chaque année du budget une fraction des recettes dégagées au-delà de leur niveau de 2020, à hauteur de 1,9 milliard pour 2022, puis de 6% ensuite… Sauf que, sur la base des recettes nettes en 2020, soit 270,7 milliards, et des autres années, 310 milliards en 2022 (comme pour les années 2017 et 2018), la dotation annuelle serait d’environ 2,4 milliards par an au début. Seule une croissance continue du PIB à hauteur de 2% et qui serait répercutée proportionnellement sur les recettes de l’Etat permettrait de rembourser 165 milliards en vingt ans... Sans cela, et sans augmentation des impôts, il faudrait probablement une forte baisse des dépenses - comme en Allemagne où le rétablissement de la règle d’or sur le déficit budgétaire en 2023 devrait être contraignant -, ou une forte hausse de la croissance... avec des réformes structurelles, ajoute Bruno Le Maire. Or de nombreux économistes doutent d’une forte croissance possible dans les pays développés sans de nouveaux investissements publics.

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