
Le retrait de Russie s’effectue en ordre dispersé dans le pétrole

Equinor a désormais parachevé sa sortie de Russie, mettant fin à près de trente ans de coopération avec ce pays. Dans le sillage de l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe, l’énergéticien norvégien avait déclaré, début mars, qu’il cesserait de commercialiser du pétrole russe, avant d’annoncer, en mai, la signature d’un accord pour céder des participations dans plusieurs coentreprises au russe Rosneft, son partenaire de longue date sur ce marché. Il ne lui restait plus qu’un seul actif à céder, à savoir le champ pétrolier de Kharyaga, dans lequel il avait une participation de 30%.
«Equinor peut désormais confirmer que le retrait complet de Kharyaga a également été réalisé», a déclaré, vendredi dans un bref communiqué, Equinor, devenu ainsi le premier grand groupe occidental d’hydrocarbures à n’avoir plus aucun actif ni de projet dans ce pays. Il a précisé «avoir couvert les charges futures de démantèlement qui lui incombaient» pour ce gisement. Le champ de Kharyaga était l’un des rares projets mis en place sous la forme d’un accord de partage de production en Russie. Il est exploité depuis août 2016 par la société publique russe Zarubezhneft, qui détenait 40% de ce champ avant le déclenchement du conflit russo-ukrainien.
Un pic de production attendu en 2024
L’autre partenaire occidental dans Kharyaga, le français TotalEnergies, a bouclé, début août, la vente de sa part de 20% à Zarubezhneft, qui contrôle désormais 90% de cet actif. Le solde demeure aux mains de Nenets Oil, compagnie qui représente les intérêts du peuple samoyède, qui vit à proximité du cercle polaire. Avec une production de 1,4 million de tonnes de pétrole par an, Kharyaga a rapporté plus de 4 milliards de dollars au budget russe depuis le début de son exploitation. Compte tenu des réserves récupérables estimées, le pic de production de ce champ est attendu en 2024.
TotalEnergies a par ailleurs annoncé, le mois dernier, la cession au russe Novatek de sa part de 49% dans le gisement gazier de Termokarstovoïe, en précisant que cette opération devrait être bouclée avant fin septembre. Le processus semble plus laborieux pour Shell et BP, qui sont loin d’avoir finalisé leur retraite de Russie. Les autorités du pays contribuent à freiner ces désengagements, comme en témoigne un décret présidentiel publié le mois dernier, qui interdit aux investisseurs originaires de pays dits «inamicaux» de céder leur participation dans certains projets énergétiques d’ici à la fin de cette année, sauf circonstances particulières, en vue de «protéger les intérêt nationaux» de la Fédération de Russie.
Une plainte envisagée par Exxon Mobil
Mardi dernier, Exxon Mobil, qui tente en vain de céder sa participation de 30% dans le projet de Sakhalin-1, a indiqué qu’il envisageait de porter plainte contre ce décret «qui entrave nos droits et nous empêche de quitter le marché en toute sécurité». Selon Rosneft, actionnaire à 20% de ce projet situé en Extrême-Orient, la production de pétrole de ce gisement est quasiment à l’arrêt depuis la mi-mai en raison de la décision du groupe américain de se retirer du projet.
Contrairement à la plupart de ses concurrents en Europe, Equinor n’a pas l’intention de réduire significativement sa production de pétrole et de gaz au cours des dix prochaines années car le seuil de rentabilité très bas de son portefeuille d’actifs dans les hydrocarbureslui permet de dégager un important flux de trésorerie. Ce cash-flow lui sert à développer des projets à faible émission de carbone, en particulier dans l’éolien offshore.
Ces projets absorberont «la moitié de nos investissements industriels d’ici à 2030», a récemment indiqué l’énergéticien. Leur rentabilité devrait être stimulée par le recentrage de ses activités amont vers la Norvège après les désengagements effectués en Russie, aux Etats-Unis, en Australie et en Amérique centrale. Au total, le groupe vise un cash-flow libre, calculé avant rémunération des actionnaires, d’environ 35 milliards de dollars sur la période 2021-2026, en faisant l’hypothèse d’un cours moyen de 60 dollars par baril de brent.
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