
La hausse des taux reste gérable pour la dette française

La soudaine hausse des taux longs a été le grand événement de ces derniers jours, mais il n’y a pas encore matière à s’inquiéter pour le coût de financement de la dette française. Et ce même si le rendement de l’OAT 10 ans est passé depuis janvier de -0,34% à -0,10% (et même +0,06% jeudi soir). L’Agence France Trésor (AFT) a prévu en décembre d’émettre 260 milliards d’euros de dette à moyen-long terme et 19,5 milliards de titres à court terme en 2021, avec une charge budgétaire globale de 37,1 milliards. Elle arrive à cette hypothèse sur la base de scénarios très prudents de taux qui remonteraient fin 2021 à -0,40% pour les maturités 3 mois, et à 0,70% pour les 10 ans (pour une moyenne à 0,50% à l'émission sur ces derniers).
L’annexe au Projet de Loi de finance (PLF) sur la charge de la dette indiquait une prévision initiale du taux moyen sur les nouvelles émissions d’OAT à 10 ans à 0% pour 2020, alors que celui-ci est finalement ressorti autour de -0,12% (après 0,11% en 2019 et 1,63% sur 2009-2017). Mais l’idée d’une remontée des taux était déjà évoquée : «Les niveaux actuels extrêmement bas reflètent un fort pessimisme et l’anticipation de mesures monétaires accommodantes prolongées, de sorte que tout évènement favorable à l’activité économique et/ou une réaction de la BCE en-deçà des attentes de marché sont susceptibles d’entraîner une remontée des taux».
Ce document anticipait déjà que la charge de la dette augmenterait de 700 millions entre 2020 et 2021, à cause d’effets volume (avec 2.126 milliards fin 2021) et inflation défavorables, malgré un effet taux avantageux (-1,3 milliard). Il incluait aussi une simulation : un choc de taux de +1% (+100 points de base) «qui interviendrait en fin d’année» sur l’ensemble de la courbe et sur toute la durée de la projection aurait pour effet d’augmenter la charge (en comptabilité «maastrichtienne» incluant gains/pertes sur swaps) de 2,5 milliards d’euros par rapport à la prévision de base la première année, de 15 milliards la cinquième année.
Mais en raison du refinancement progressif de la dette, l’impact sur le taux moyen de l’ensemble de la dette serait, en tous cas, très graduel, passant de 1,4% en 2020 à par exemple 1,3% en 2024 avec une remontée au rythme de +50 pb par an, ou à 1,8% si cette remontée était agrémentée d’un choc de +100 pb. L’effet de la remontée sur le coût pour la dette de l’Etat ne se ressentirait que sur le marché primaire, au rythme des nouvelles émissions. La prochaine adjudication, jeudi, sur une OAT 10 ans de maturité novembre 2030 déjà en circulation, sera un premier test intéressant.
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