
La France a tout à gagner d’une réforme de la fiscalité des multinationales

Les stratégies d'évitement de l’impôt des multinationales coûtent cher à la France : au moins 4,6 milliards d’euros de recettes fiscales par an, a calculé le Conseil d’analyse économique (CAE) dans une étude parue hier. Pour parvenir à cette estimation «conservatrice (…), nettement inférieure aux estimations trouvées dans la littérature», l’organe rattaché au Premier ministre a comparé l’impôt sur les bénéfices payé par les multinationales françaises ou étrangères en France, en distinguant celles qui ont une filiale dans un paradis fiscal, y compris des pays européens tels que l’Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas ou la Suisse, et qui pourraient ainsi y transférer certains de leurs bénéfices.
Résultat : le taux effectif moyen d’imposition d’une multinationale française ayant au moins une filiale dans un paradis fiscal est inférieur de 26% à celui d’une multinationale équivalente mais sans présence dans un paradis fiscal. Pour les groupes étrangers présents en France, la différence est de 17%.
Peu d’effet sur l’attractivité
Face à ces chiffres, et alors que l’OCDE et le G20 ont engagé des négociations en vue de concevoir un nouveau cadre fiscal l’an prochain, le CAE tente de mesurer les impacts qu’auraient les différentes réformes potentielles. Pour les finances publiques française, la solution la plus efficace serait une application des lois dite anti-abus : elle augmenterait de 21% les recettes d’IS avec un effet négatif relativement faible sur l’attractivité (-1,9%). Pour L’Allemagne, le gain d’IS atteindrait 11%. En revanche, l’Irlande, seul paradis fiscal étudié dans l’analyse du CAE, serait la grande perdante avec une chute de 46% de ses recettes fiscales.
Seconde solution efficace, prônée par le CAE : la mise en œuvre d’un taux effectif minimum d’imposition des sociétés, pilier 2 des négociations OCDE/G20. Ce global anti base erosion accroîtrait de 9,4% les recettes d’IS de la France et de 5,7% celles de l’Allemagne. Les effets sur l’attractivité relative des deux pays seraient limités, assure le CAE, de -1,2% pour la France et de -0,4% pour l’Allemagne.
Pour rendre encore plus efficace la réforme, le CAE appelle enfin à la simplicité afin «d’uniformiser les règles du jeu entre les entreprises en réduisant la propension des plus grandes d’entre elles à s’engager dans l’optimisation fiscale en recourant à des failles juridiques».
Plus d'articles du même thème
-
La loi de finances 2025 a laissé aux banques un sentiment aigre-doux
Par souci de justice fiscale, la loi de Finances 2025 a apporté un certain nombre de modifications dont plusieurs touchent les banques de façon directe ou indirecte. Certaines dispositions ne sont pas à l’avantage du secteur bancaire mais d’autres sont plutôt bénéfiques. Zoom sur deux exemples concrets. -
Le fisc belge abandonne le double précompte sur les dividendes français
Les investisseurs belges pourront récupérer, sous forme de crédit d’impôt, une partie du précompte sur leurs dividendes français reçus avant 2020. -
Jérémie Jeausserand (Jeausserand Audouard) « La réforme des management packages recrée de l’insécurité fiscale»
Co-fondateur de Jeausserand Audouard, spécialisé dans l’accompagnement des dirigeants et des entrepreneurs à l’occasion d’opérations capitalistiques, Jérémie Jeausserand livre son regard sur la réforme de la fiscalité des management packages issue de la loi de finances pour 2025 et sur ses éventuelles conséquences sur l’économie française.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions