
La danse des baisses de taux s’accélère

Les graines d’agitation semées par la Fed fin juillet et par la reprise des tensions entre les Etats-Unis et la Chine commencent à pousser. Hier, c’est l’Asie-Pacifique qui a surpris les marchés, non pas avec une baisse des taux directeurs, attendue, mais par l’ampleur de cette baisse dans trois des économies les plus importantes de la région.
Ainsi, la banque centrale néo-zélandaise (RBNZ) a baissé de 50 points de base son taux directeur, contre une anticipation des experts de 25 points de base, ramenant le taux à 1%, son plus bas niveau historique. La Banque de réserve d’Inde (RBI) a baissé ses taux de 35 points de base, faisant passer son taux des prises en pension (repo) de 5,75% à 5,4% alors que 80% des économistes et analystes interrogés par Reuters planchaient sur un taux de 5,5%. Enfin, la Banque centrale de Thaïlande (BoT) a procédé à une diminution de 25 points de base de ses taux directeurs, qui passent de 1,75% à 1,50%, allant à l’encontre des prévisions de neuf économistes sur onze interrogés par le Wall Street Journal prévoyant un statu quo.
Les trois économies partagent des difficultés communes. La faiblesse des perspectives économiques, dans un contexte de guerre commerciale, est criante pour ces pays dépendant des exportations. La Thaïlande a connu sa plus faible croissance économique au premier trimestre de 2019 depuis quatre ans, à tel point que la BoT a diminué sa prévision de croissance économique pour l’année, la passant de 3,8% à 3,3%. Titanum Mallikamas, secrétaire du comité de politique monétaire de la Banque, a déclaré lors d’une conférence de presse que la baisse avait pour but «de gagner du temps» pour pouvoir évaluer les risques liés à la guerre commerciale et aux facteurs extérieurs. L’Inde fait aussi face à une croissance de son PIB fortement ralentie, 6,8% lors de l’exercice terminé le 31 mars, au plus bas depuis cinq ans.
Interrogations au Japon
Si la Nouvelle-Zélande apparaît à première vue en meilleure forme avec un PIB en hausse au premier trimestre de 2019, d’autres indicateurs témoignent d’une plus grande difficulté comme un climat des affaires au plus bas depuis onze mois et une baisse de la confiance des consommateurs. «Au vu de la volonté clairement affichée du Comité de réduire les taux, et de notre scénario intégrant un ralentissement supplémentaire de l’économie à court terme, nous prévoyons désormais une nouvelle baisse de 25 points de base en novembre», affirme même Dominick Stephens, chef économiste de la banque Westpac.
Car si ces baisses sont déjà exceptionnelles, elles devraient s’inscrire dans le moyen terme. Les conséquences sont pourtant bien présentes : le dollar néo-zélandais, qui a déjà perdu 4% au cours des deux dernières semaines, baisse encore face au dollar américain. La BoT s’inquiète du baht, qui a gagné 5,6% face au dollar cette année. Pour Kobsidthi Silpachai, chef de la recherche sur les marchés de capitaux de Kasikornbank, la décision sur les taux «suggère que la grande surperformance du baht cette année et les maux de tête liés à l'économie étaient trop importants pour être ignorés», admettant ainsi l’installation de difficultés dans le temps.
Proche voisin, le Japon s’interroge de plus en plus sur la marche à suivre. Les débats sont animés au sein de ses instances monétaires : assouplir encore plus ou non sa politique monétaire. La danse est donc loin de prendre fin.
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