La crise de la dette, remède à l’irresponsabilité politique

En Grèce ou en Italie, les crises de la dette ont toujours sanctionné l’inconséquence et l’incompétence des politiques, et forcé l’Etat à maigrir. Bientôt le tour de la France ? L'éditorial d’Alexandre Garabedian.
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Alexandre Garabedian, directeur de la rédaction de L'Agefi  - 

Comment avez-vous fait faillite ? «Graduellement d’abord, et puis brusquement», répond un personnage d’Ernest Hemingway dans son roman Le soleil se lève aussi. Le soleil risque de se coucher plus tôt que prévu sur le gouvernement Barnier, et sa censure annoncée, sauf rebondissement de dernière minute, signera la faillite bien réelle des politiques de tous bords.

Voilà des semaines que ministres, parlementaires et chefs de partis livrent aux Français le spectacle pitoyable de leur irresponsabilité, tout à leurs ambitions personnelles et à leur stratégie assumée du chaos institutionnel. A peine évoqués, l’hypertrophie de la fonction publique et le poids démesuré des retraites, les deux maux qui affligent la dépense publique, ont été promptement escamotés du débat. Le concours Lépine de la fiscalité a tenu lieu de boussole budgétaire, désignant à la vindicte tous ceux qui, de près ou de loin, s’ingénient à faire tourner l’économie. Comment dans ces conditions imaginer que les ménages consomment, les chefs d’entreprise investissent ? Leur inévitable prudence fragilisera d’autant plus l’hypothèse d’une croissance à 1,1% et d’un déficit à 5% l’an prochain, surtout si celui de l’année écoulée doit être reconduit tel quel.

Les marchés financiers ont déjà sanctionné les entreprises françaises cotées, puisque le CAC 40 affiche cette année la pire performance des grands indices mondiaux. La dette tricolore, elle, bénéficie encore d’une relative mansuétude de la part des investisseurs et des agences de notation. Parce qu’elle est liquide et profonde, parce que la zone euro ne serait plus grand-chose sans la France, parce que le fisc sait taxer et l’épargne domestique abonde, ses rendements encore limités en valeur absolue ne se sont que peu à peu écartés de ceux de l’Allemagne. Les indicateurs de risque ne sont pas aussi tendus qu’en 2012, lorsque la monnaie unique était en perdition. Mais le blocage actuel, inédit dans l’histoire de la cinquième République, projette les vigies du marché obligataire dans l’inconnu.

Combien de temps reste-t-il avant que le spread de la dette ne fasse l’ouverture des journaux télévisés, comme chez nos voisins méridionaux ? A quel niveau de taux d’intérêt faudrait-il que la France emprunte pour se retrouver comme en 1958 devant l’alternative du miracle ou de la faillite, selon la formule gaullienne ? En Grèce, en Italie, en Espagne, les dernières crises de la dette ont toujours sanctionné l’inconséquence et l’incompétence des politiques. Elles ont écarté du pouvoir les démagogues et forcé des mesures de rigueur bien plus brutales pour le corps social que des réformes menées en temps utile. Tel est l’inconvénient d’avoir à agir brusquement, et non graduellement.

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