La bulle sur les prêts auto se dégonfle aux Etats-Unis

La remontée des taux et de l’inflation ralentit la demande pour le crédit auto, sans impact important pour l’instant.
Corentin Chappron
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Le montant moyen emprunté en 2022 pour l’achat d’une voiture s’élève à 38.000 dollars, en hausse de 20% par rapport à 2019.  -  AdobeStock.

L’inflation du prix des actifs durant la pandémie n’a pas épargné la dette automobile aux Etats-Unis. En deux ans, le volume de prêts destinés à financer l’achat de voitures a progressé de 9,1%, atteignant 1.469 milliards de dollars au premier trimestre 2022 - juste derrière les prêts étudiants à 1.570 milliards, mais loin des 11.180 milliards d’emprunts immobiliers. Deux facteurs expliquent cette hausse : les aides distribuées durant la pandémie et la hausse du prix des voitures neuves et d’occasion. Résultat, le montant moyen emprunté en 2022 représente 38.000 dollars, une augmentation de 20% par rapport à 2019, plus de la moitié du revenu annuel moyen de 70.000 dollars. Avec la poursuite de la remontée des taux et une probable récession à l’horizon, le secteur apparaît donc sensible, d’autant que les ménages fragiles se sont aussi endettés : selon des données de S&P, les émissions de prêts à risque ont bondi à 44 milliards de dollars sur un an, sur 98 milliards de dollars de nouveaux prêts émis.

Certes, le risque est loin d’être systémique. D’une part, la dette est diversifiée, puisque répartie sur la quasi-totalité des ménages américains. Par ailleurs, «les prêts ne sont pas toujours conservés sur les bilans bancaires, mais souvent titrisés, et leur bonne performance relative depuis le début de l’année (-5% contre -15% pour le crédit américain) maintient l’intérêt des investisseurs», répartissant le risque, rappelle Alexandre Hezez, stratégiste au Groupe Richelieu. Les inquiétudes portent d’ailleurs plutôt sur les acteurs non financiers, comme les vendeurs de voiture, moins bien capitalisés et pouvant avoir pris des risques excessifs, que sur les banques.

Effort financier

Pourtant, si les taux de défauts - aujourd’hui à un plus bas historique de 4% - sont voués à remonter, ils devraient rester soutenables. «Il reste encore de l’épargne accumulée durant le Covid, environ 2.000 milliards de dollars, et l’endettement des ménages est plus faible qu’en 2009, souligne Samy Chaar, chef économiste de Lombard Odier. Surtout, les salaires augmentent, même s’ils ne compensent pas l’inflation, et le marché de l’emploi et l’immobilier restent solides. Ces trois facteurs, pris ensemble, permettent aux ménages de faire face à des coûts de financement plus élevés.» D’autant qu’il s’agit d’une dépense essentielle pour les foyers : disposer d’une voiture est pratiquement obligatoire pour pouvoir travailler. Sans retournement marqué qui mettrait une part importante des emprunteurs au chômage, les défauts devraient rester faibles.

La situation va en revanche peser sur les consommateurs. Les taux de financements des prêts à 48 et 72 mois sont ainsi passés de 4,6% en novembre dernier à 5,2% en mai, le dernier chiffre disponible, emportés par la remontée des taux. Et 25% des échéances, selon une analyse de Consumer Reports portant sur 800.000 prêts, représentent plus de 10% du revenu mensuel du foyer emprunteur. «La capacité des ménages à emprunter s’érode : les pertes de pouvoir d’achat liées à l’inflation, notamment énergétique, et le renchérissement du crédit, vont finir par poser des problèmes de demande», indique Stéphane Déo, directeur stratégie marchés chez Ostrum AM. La croissance sur une année glissante des prêts a d’ailleurs ralenti, passant de presque 10% en début d’année à 6% aujourd’hui. «Mais, à moins d’un ‘hard landing’, le secteur ne devrait pas être confronté à une remontée insurmontable des défauts». Entre ralentissement de la consommation et renchérissement du crédit, l’économie américaine redécouvre la réalité des hausses de taux.

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