
La BCE aura une nouvelle stratégie avant la fin 2020

Christine Lagarde a pris rendez-vous. La présidente de la Banque centrale européenne (BCE) a déclaré hier qu’un examen de la stratégie débuterait «dans le courant du mois de janvier» et devrait s’achever avant la fin 2020. Il n’existe pas encore de cadre pour cet examen et «aucun point d’arrivée n’est prédéterminé», a ajouté Christine Lagarde au cours de la conférence de presse tenue à l’issue de la première réunion du conseil des gouverneurs de la banque centrale qu’elle a présidée.
Certains responsables de la BCE se sont récemment inquiétés des effets secondaires possibles de la politique monétaire ultra-accommodante menée par la BCE depuis de nombreuses années. De ce fait, Christine Lagarde avait annoncé dès septembre que la BCE réaliserait un examen approfondi de sa stratégie et de ses instruments de politique monétaire.
Les économistes pensent que cette évaluation pourrait entraîner une modification de l’objectif d’inflation de la BCE, actuellement «proche de mais inférieur à 2%», ou limiter le recours aux taux d’intérêt négatifs et aux rachats d’actifs.
La responsable a indiqué que l’examen porterait également sur le changement climatique et les inégalités. «Il examinera tous les enjeux», «ne laissera aucun recoin inexploré et ne durera pas trop longtemps», a déclaré Christine Lagarde. Elle a également promis que l’examen stratégique irait «au-delà des suspects habituels» dans les milieux universitaires, gouvernementaux et financiers.
«Ni une colombe ni un faucon»
Les investisseurs anticipaient jusqu'à récemment de nouvelles baisses des taux de la BCE l’année prochaine, mais l’apparition de dissensions au sein du conseil des gouverneurs sur les dernières mesures adoptées, notamment la reprise des achats d’actifs, les a amenés à revoir leurs anticipations.
Les observateurs de la BCE s’attendaient à ce que Christine Lagarde adopte une communication plus directe que celle de ses prédécesseurs. «J’aurai mon propre style», a-t-elle déclaré en préambule de sa conférence de presse. «Je ne suis ni une colombe ni un faucon», a par ailleurs affirmé l’ancienne présidente du Fonds monétaire international (FMI), refusant ainsi de rallier les partisans de l’orthodoxie monétaire au sein du conseil des gouverneurs ou ceux préférant une politique accommodante. «L’indépendance d’une banque centrale est d’une importance cruciale», a-t-elle martelé.
Christine Lagarde a tenu ces propos alors que la BCE a laissé ses taux directeurs et ses indications prospectives inchangés jeudi. La BCE a indiqué qu’elle laissait son principal taux de refinancement à 0%, soit le niveau auquel il se trouve depuis mars 2016, et son taux de rémunération des dépôts à -0,5%. Ce dernier taux avait été réduit de 10 points de base le mois dernier.
La banque centrale a également confirmé ses indications prospectives (forward guidance) sur les taux, indiquant qu’ils resteraient à leurs niveaux actuels ou plus bas jusqu’au retour de l’inflation à un niveau «proche de mais inférieur à 2%».
Pas de japonisation de la zone euro
La BCE a par ailleurs ajusté ses prévisions de croissance et d’inflation pour les prochaines années, dans un contexte caractérisé par l’affaiblissement des échanges commerciaux internationaux et les incertitudes économiques mondiales.
Il existe cependant « des signes de stabilisation du rythme de ralentissement de la croissance et d’accélération de l’inflation », a indiqué Christine Lagarde.
L’institution a relevé sa projection de croissance pour 2019 à 1,2%, contre 1,1% attendu précédemment, mais elle a abaissé son estimation pour l’année prochaine de 1,2% à 1,1%. Pour 2021, la BCE anticipe toujours une croissance de 1,4%.
Concernant l’inflation, la banque centrale a relevé sa prévision pour 2020 de 1% à 1,1%, mais abaissé celle pour 2021 de 1,5% à 1,4%. Pour 2022, la BCE anticipe une inflation de 1,6% et une croissance de 1,4%. Il s’agit des premières prévisions économiques de la banque centrale pour cette année-là.
« A 1,4% en 2022, la croissance de la zone euro sera proche de son potentiel », mais la prévision d’inflation de 1,6% pour la même année « ne correspond pas à l’objectif que nous poursuivons », a précisé la responsable.
Christine Lagarde a souligné que contrairement aux craintes exprimées par certains opérateurs de marché et économistes, la japonisation - caractérisée par une faible croissance et une inflation atone - ne guettait pas la zone euro.
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