
La BCE augmente une nouvelle fois ses taux de 25 points de base

La Banque centrale européenne (BCE) a une nouvelle fois relevé ses taux directeurs de 25 points de base (pb) jeudi, poursuivant son cycle de resserrement monétaire en dépit du ralentissement de l'économie de la zone euro et de la pause décidée par la Réserve fédérale (Fed) mercredi.
Le conseil des gouverneurs de la BCE a porté le taux de ses opérations principales de refinancement à 4%, contre 3,75% précédemment, tandis que le taux de rémunération des dépôts a été relevé à 3,5%, au lieu de 3,25% auparavant. Le taux de la facilité de prêt marginal a été relevé de 4% à 4,25%.
En réaction, les taux souverains européens ont légèrement rebondi jeudi après-midi. A 14h30, le rendement du Bund allemand à 10 ans montait de 9 points de base à 2,53% et l’OAT française avançait de 9 pb également à 3,07%. Le taux italien augmentait de 12 pb à 4,22%.
«L’inflation ralentit, mais devrait rester trop forte pendant une trop longue période», a indiqué la BCE dans un communiqué pour justifier sa décision.
4 points de pourcentage en moins d’un an
Depuis juillet 2022, la BCE a augmenté ses taux de 400 points de base afin de contenir une inflation qui reste supérieure à son objectif de 2% en zone euro.
L’inflation de base, qui exclut certains éléments volatils comme l’alimentation et l'énergie est surveillée de près par la BCE, s’est établie à 5,3% sur un an en mai, après 5,6% en avril. L’inflation globale a parallèlement ralenti à 6,1% sur un an, contre 7% en avril.
Comme en mai, la banque centrale a souligné que «les décisions futures du conseil des gouverneurs feront en sorte que les taux directeurs soient fixés à des niveaux suffisamment restrictifs pour assurer un retour au plus tôt de l’inflation au niveau de l’objectif de 2% à moyen terme, et qu’ils soient maintenus à ces niveaux aussi longtemps que nécessaire».
A lire aussi: Politique monétaire, les conditions du pivot
«Plus particulièrement, les décisions du conseil des gouverneurs relatives aux taux directeurs resteront fondées sur son évaluation des perspectives d’inflation compte tenu des données économiques et financières, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire», a-t-elle également répété.
La BCE a par ailleurs confirmé qu’elle cesserait les réinvestissements réalisés dans le cadre de son programme régulier d’achats d’actifs, ou APP, en juillet 2023. L’institution a déjà réduit, depuis mars, de 15 milliards d’euros par mois ces réinvestissements.
Récession technique
La hausse des taux annoncée par la BCE ce jeudi était très largement anticipée par les investisseurs. Sa présidente, Christine Lagarde, avait déclaré au début du mois que la politique monétaire avait encore besoin d'être resserrée dans un contexte d’inflation toujours trop élevée, mais plus progressivement qu’au cours de l’année écoulée. Les investisseurs estiment qu’un relèvement supplémentaire de 25 pb interviendra probablement en juillet.
Au-delà de l'été, la volonté de la banque centrale de ramener l’inflation à 2% risque de se heurter au ralentissement de l'économie. La zone euro est en effet entrée en récession technique au premier trimestre, le produit intérieur brut (PIB) s'étant contracté en glissement trimestriel de 0,1% sur les trois premiers mois de l’année et d’autant au quatrième trimestre 2022.
«Le mouvement [de hausse des taux] s’arrêtera bientôt, car des taux trop élevés auraient des conséquences négatives sur l'économie et la dette de beaucoup de pays de la zone», estimait ainsi Emmanuel Auboyneau, gérant associé d’Amplegest, dans une note publiée en amont de la réunion de la BCE.
Dans ce contexte, les nouvelles prévisions de croissance et d’inflation des équipes de la BCE, également dévoilées ce jeudi, seront décortiquées par les marchés.
3% l’an prochain
La BCE anticipe désormais une inflation de 5,4% en 2023, de 3% en 2024 et de 2,2% en 2025. En mars, ses économistes prévoyaient une inflation de 5,3% cette année, puis de 2,9% en 2024 et de 2,1% en 2025.
«Les indicateurs des tensions sous-jacentes sur les prix demeurent robustes, même si certains laissent transparaître quelques signes d’affaiblissement», a souligné la BCE. «Les services de l’Eurosystème ont révisé en hausse leurs projections relatives à l’inflation hors énergie et produits alimentaires, en particulier pour cette année et la suivante, en raison d'évolutions haussières antérieures non anticipées et des effets de la vitalité du marché du travail sur le rythme de la désinflation», a-t-elle poursuivi.
Ainsi, l’inflation hors alimentation et énergie est pour sa part attendue à 5,1% en 2023, 3% en 2024 et 2,3% en 2025. En mars, la BCE l’anticipait à 4,6% en moyenne en 2023, 2,5% en 2024 et 2,2% en 2025.
En raison des hausses de taux déjà réalisées, «les coûts d’emprunt ont nettement augmenté et la croissance des prêts se ralentit. Dans la mesure où il devrait de plus en plus freiner la demande, le durcissement des conditions de financement est l’une des principales raisons pour lesquelles l’inflation poursuivrait son repli vers l’objectif», a indiqué la BCE.
Les projections de croissance ont été revues à 0,9% en moyenne pour cette année, 1,5% pour 2024 et 1,6% pour 2025. Les précédentes prévisions de la BCE faisaient état d’une croissance de 1% en 2023 et de 1,6% en 2024 et 2025.
Plus d'articles du même thème
-
EXCLUSIF
Les gestionnaires de taux contiennent leur panique
Les prévisionnistes de L’Agefi tendent à ajouter une baisse de taux à six mois tout en diminuant leurs prévisions pour les taux longs aux Etats-Unis et en augmentant celles sur la zone euro. -
L’emploi américain, une bonne nouvelle dans une période troublée
Les chiffres du rapport mensuel sur le marché du travail ressortent plutôt bons pour le mois de mars. Le détail confirme encore une dynamique faible de l’économie américaine, sans prendre encore en compte les effets des licenciements déjà effectués dans le secteur public, ni ceux liés aux risques économiques résultant de la hausse des droits de douane. -
Les craintes d’inflation s’emballent aux Etats-Unis
La perspective d’une vague de tarifs douaniers à compter du 2 avril inquiète les entreprises et les ménages américains qui anticipent une nouvelle hausse de l’inflation. Les prévisions à court terme des marchés atteignent un plus haut de deux ans. Tout dépendra de l’impact du ralentissement.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions