La Banque d’Angleterre s’apprête à enclencher une deuxième hausse de taux

Elle livrera aussi jeudi ses projections économiques et des précisions sur la réduction de son bilan.
Fabrice Anselmi
La Banque  d’Angleterre (BoE) à Londres
La Banque d’Angleterre (BoE) devrait décider jeudi de relever son taux directeur de 0,25% à 0,50%.  -  Bloomberg

Passer la deuxième. Après une première hausse surprise en décembre, plutôt symbolique (de 0,10% à 0,25%), la Banque d’Angleterre (BoE) devrait décider jeudi de relever son taux directeur de 0,25% à 0,50%. Cette deuxième hausse consécutive, une première depuis 2004, ne suscite guère de débat chez les économistes. Mais l’institution sera aussi attendue sur la suite du processus : hausses de taux, réduction du bilan et projections économiques.

Ralentissement

Sur ce dernier point, le Fonds monétaire international (FMI) a estimé le 25 janvier que le Royaume-Uni connaîtra encore la croissance la plus forte du G7, après les 7,2% de 2021 : 4,7% en moyenne en 2022, contre une estimation initiale de 5% révisée à la baisse à cause des perturbations liées au variant Omicron et aux contraintes d’approvisionnement. «L’enquête de décision mensuelle (DMP) de la Banque d’Angleterre a noté de fortes baisses des attentes au premier trimestre 2022 en raison des restrictions Covid, avec -7% sur les ventes, -10% sur les investissements et -4% sur l’emploi», nuance l’économiste Sanjay Raja chez Deutsche Bank. Il note une perte de confiance des consommateurs en ce début d’année, mais anticipe une reprise rapide au deuxième trimestre pour aboutir à 4,25% de croissance en 2022, 1,5% en 2023 et moins de 1% en 2024…

«La vue d’ensemble est que le Royaume-Uni a une demande faible - la production revient tout juste aux niveaux d’avant Covid - et une offre faible (…). Une réduction de la croissance potentielle se traduira par des hausses de taux plus précoces jusqu’à un niveau neutre bas (…). La production devrait rebondir une fois les effets Omicron passés, mais une compression du revenu réel plus intense que celle anticipée par la BoE devrait réduire la croissance au deuxième semestre», juge Robert Wood, économiste UK chez Bank of America (BofA), qui évoque un rythme de croissance à 2,6% fin 2022, 1,1% fin 2023 et 0,9% fin 2024.

Les tensions du côté de l’offre et du marché du travail devraient quand même persister en 2022, avec la possibilité d’un taux de chômage rapidement au-dessous de 4%. Le taux d’inflation, après avoir atteint 5,4% en décembre et un sommet depuis 1992, augmenterait au-dessus de 6% voire 6,5% au printemps. Gita Gopinath, directrice adjointe du FMI, a d’ailleurs déclaré qu’«un soutien bien ciblé pour les ménages très vulnérables sera utile» pour traverser la crise des revenus qui frappera en avril, lorsque les factures d’énergie et les taxes augmenteront. Un début de boucle prix-salaires semblerait se dessiner outre-Manche, et tous ces risques se reflètent dans des points morts d’inflation élevés à 5 ans (4,33%) et 10 ans (4,16%).

Hausses de taux ou QT ?

Dans ce contexte, les marchés de swaps valorisent donc une hausse de 25 pb en février, deux autres jusqu’à 1% d’ici à l’été, puis deux autres encore lors des quatre comités de politique monétaire (MPC) qui se tiendront entre août et décembre. Le relèvement de jeudi devrait être décidé à l’unanimité des neuf membres. Ensuite, «la vigueur et le nombre des hausses en 2022 dépendront de l’équilibre à trouver entre lutte contre l’inflation et coût pour la croissance», reconnaît Sanjay Raja. «Nous partons du principe que le MPC s’en tiendra à son plan, mais il y a une chance qu’il prenne peur», préviennent aussi les analystes de Capital Economics. Avant de voter pour le statu quo en décembre face au variant Omicron, Silvana Tenreyro, membre du MPC, avait prôné la prudence et convaincu ses collègues de minimiser les attentes des marchés en novembre.

Un autre sujet portera probablement dès jeudi sur la réduction du bilan («quantitative tightening», QT). La BoE devrait annoncer rapidement une réduction «passive», consistant à cesser les réinvestissements de l’Asset Purchase Facility (APF) : 38 milliards de livres en moins sur 895 milliards au bilan cette année, «pas un défi majeur pour les taux vu les importantes réductions d’émission du Bureau de gestion de la dette (DMO)», indique l’équipe d’ING. Les choses pourraient changer avec une réduction «active» consistant à revendre des emprunts d’Etat britanniques sur les marchés. «Nous prévoyons que la BoE commencera également ces ventes actives en novembre, à un rythme initial de 5 milliards de livres par mois. A notre avis, ce QT remplacera certaines hausses du taux directeur», conclut Robert Wood.

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