
Scor et Covéa enterrent la hache de guerre

Scor et Covéa ne seront peut-être pas les meilleurs amis du monde, mais ils ne sont officiellement plus ennemis. Les deux sociétés ont mis fin à un litige qui durait depuis 2018, lorsque Covéa avait voulu mettre la main sur Scor contre son gré. Les deux protagonistes ont annoncé jeudi soir dans un communiqué commun un protocole transactionnel en plusieurs points. Celui-ci prévoit une sortie de Covéa du capital de Scor à la main du réassureur, la fin de toutes les procédures judiciaires en cours entre les deux entreprises, le versement par Covéa à Scor d’une indemnité de 20 millions d’euros et la cession par Scor d’un portefeuille de réassurance à Covéa pour un montant d’un milliard d’euros. Ce protocole est engageant pour les deux signataires et son non-respect entrainerait des poursuites judiciaires.
Sortie organisée
Concrètement, Scor disposera d’une option d’achat des titres détenus par Covéa (environ 8% du capital du réassureur), transférable à tout tiers, à un prix d’exercice de 28 euros par action et pendant une durée de 5 ans. Ce prix affiche une prime d’environ 7% par rapport au cours de clôture de Scor le 10 juin. Lors de sa tentative de prise de contrôle de Scor en 2018, Covéa se disait prêt à payer 43 euros par action. Cette sortie de Covéa est donc à la main du réassureur qui pourra décider quand et à quel rythme elle aura lieu. Dans le même temps, Covéa s’engage à ne pas acheter, directement ou indirectement, seul ou de concert, pendant une durée de 7 ans, d’actions Scor, même après la cession totale ou partielle de sa participation. Covéa s’engage aussi, pendant cette même durée, à voter en faveur de tous projets de résolution soumis ou approuvés par le Conseil d’administration de Scor. Covéa devient donc allié pour Denis Kessler, qui prépare sa succession en cédant la direction générale du groupe à Laurent Rousseau mais atteindra en 2022, si aucune mesure n’est prise, la date limite statutaire pour exercer la fonction de président.
Fin des litiges
Concernant les litiges en cours, les deux signataires se sont engagés à stopper toutes les actions judiciaires en rapport avec la tentative de prise de contrôle de Scor par Covéa en 2018. Les 5 et 6 juillet devait se tenir devant le tribunal de Paris le procès au pénal intenté par Scor contre Covéa et son PDG Thierry Derez pour abus de confiance. Cette audience n’aura donc pas lieu.
En revanche, l’accord ne stipule pas si le procès intenté par Scor contre Barclays au Royaume-Uni pour violation de la confidentialité et du secret des affaires se tiendra. Barclays avait conseillé Covéa dans sa tentative de prise de contrôle de Scor et le procès devait s’ouvrir le 17 juin prochain. « Cet accord ne peut qu’aider à mettre un terme à tous les litiges », déclare une source proche du dossier. Scor pourrait donc, même si rien n’est annoncé à ce stade, abandonner aussi ses poursuites contre Barclays.
Si l’avenir s’annonce dégagé concernant les relations futures entre Scor et Covéa, le passé n’est pas totalement oublié. Les 20 millions d’indemnités que s’est engagé à payer Covéa à Scor correspondent au montant des dommages et intérêts infligés par le tribunal de commerce le 10 novembre 2020. Si Covéa ne fera pas appel de cette décision, en accord avec le protocole signé, il règlera tout de même la somme.
Retour aux affaires
Enfin, un des points importants du protocole concerne la reprise des relations d’affaires entre les deux groupes. Scor cèdera 30 % de tout le portefeuille d’affaires en cours Vie détenu en Irlande au 31 décembre 2020. Cette transaction d’un milliard de dollars (environ 820 millions d’euros) « permettra à Scor de redéployer son capital vers la (ré)assurance P&C (assurance dommages, ndlr) et à Covéa d’accélérer sa stratégie de développement vers la réassurance vie », indique le communiqué. Cette cession s’accompagne aussi de la reprise des relations de réassurance entre Covéa et Scor.
Les régulateurs à la manœuvre
Les deux sociétés expliquent que cet accord a été signé sous l’égide de Jean-Paul Faugère, vice-président de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), et a été approuvé par les conseils d’administration de Covéa et de Scor, réunis respectivement les 9 et 8 juin. Si l’action apaisante de l’ACPR a œuvré pour que le dialogue entre les deux ennemis soit renoué, l’Autorité des marchés financiers (AMF) pourrait aussi avoir part de responsabilité dans le dénouement rapide du litige. A la fin du mois de mars, Covéa avait déposé une plainte au Parquet national financier contre Denis Kessler, le PDG de Scor, pour manipulation de cours et abus de biens sociaux - elle aussi éteinte par le protocole. Or, contrairement à son habitude, l’AMF avait communiqué rapidement, à la fin du mois de mai, pour écarter tout soupçon de manipulation de cours de la part du réassureur. Par ce communiqué, l’Autorité a donc douché les espoirs de Thierry Derez et Covéa d’avoir gain de cause sur ce volet. Après ce communiqué de l’AMF, il n’aura pas fallu quinze jours à Covéa et Scor pour s’entendre.
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