
Risk manager, un métier aux multiples facettes

Agé de 47 ans, avec douze ans d’expérience en gestion des risques, une capacité à porter plusieurs casquettes… Tel est le portrait-robot du risk manager qui ressort du dernier baromètre de l’Amrae sur les métiers du management du risque.
«Ils sont 87% d’entre eux à cumuler plusieurs activités, et sur un périmètre qui s’étend désormais au-delà des trois grandes fonctions du risque : le ‘risk management’, l’assurance et la prévention, et la gestion de crise-continuité d’activité, observe Thibault Bulabois, le responsable risques & contrôles du groupe Française des Jeux (FDJ), qui a piloté ce baromètre pour le compte de l’Amrae. Ils se voient en effet confier de plus en plus de missions en contrôle interne, conformité, juridique et RSE (responsabilité sociétale des entreprises, NDLR).»
Cette montée en puissance est d’ailleurs perceptible dans les organisations. «Parmi les ‘top risk managers’, 99% déclarent pouvoir contacter directement ou indirectement la direction générale en cas de besoin. En 2015, ils n’étaient que 62% à pouvoir le faire, note Thibault Bulabois. Plus de la moitié participent en outre de manière régulière ou ponctuelle aux comités de direction, comités exécutifs ou comités d’audit, où ils éclairent des dirigeants de plus en plus avertis sur les fondamentaux de la gestion des risques : l’identification, l’évaluation, la maîtrise et les plans d’action, et, bien sûr, leur financement.»
Signe des temps : pour la première fois, l’identification des opportunités fait son apparition dans le baromètre. «Cela traduit une forme de maturité chez les entreprises, qui commencent à réaliser que certaines menaces stratégiques peuvent aussi constituer une source d’opportunités de croissance», se félicite le responsable.
La cartographie des périls identifiés par les risk managers n’a en revanche pas changé par rapport à l’édition précédente. Les risques cyber, réglementaires, stratégiques, RH et environnementaux composent toujours le Top 5. «On observe toutefois une montée en puissance du facteur humain, souligne Thibault Bulabois. Avec la pandémie, la capacité des entreprises à recruter, gérer et fidéliser les talents, et à anticiper les besoins en compétences clés de demain, s’est imposée comme un enjeu central. Dans un contexte où beaucoup d’équipes sont fatiguées sur les plans physique et psychique après plus de deux ans de crise sanitaire. »
Des profils plus divers
En deux ans, la sociologie des risk managers a continué d’évoluer. La fonction se féminise à grands pas, les femmes représentant désormais 45% des postes, cette part ayant plus que doublé en treize ans. «En 2009, le ‘risk manager’ était un homme d’une cinquantaine d’années, avec un profil ‘droit’ ou ‘ingénieur’, très orienté sur l’assurance et la souscription de garanties. Aujourd’hui, on s’aperçoit que 38% des nouveaux entrants sont issus des filières commerce, gestion, économie», note Thibault Bulabois.
Malgré l’élargissement du champ de leurs compétence et responsabilités, les risk managers disposent toujours d’effectifs réduits. Ils sont 57% à compter dans leurs équipes entre un et quatre collaborateurs. Un quart d’entre eux travaillent seuls. Ce manque de ressources se retrouve aussi dans les enveloppes qui leur sont allouées : 53% déclarent leur budget insuffisant, ou ne pas en avoir du tout.
«Ce chiffre interpelle, à l’heure où on demande aux ‘risk managers’ d’être vigilants sur de plus en plus de risques et où beaucoup de sondés mettent en avant la nécessité d’investir dans des systèmes d’information de gestion du risque pour optimiser les process et la cartographie des risques», regrette Thibault Bulabois.
Pour assumer toutes ses casquettes, le risk manager doit donc faire feu de tout bois. «Dans beaucoup d’entreprises, il joue le rôle du chef d’orchestre, observe le dirigeant. Il est celui qui anime un vaste réseau de correspondants risques, qui interagit avec les équipes de la conformité, de la RSE ou de l’IT (technologies de l’information, NDLR)…»
Fidèles au poste
Lorsqu’on lui demande quelles qualités il faut pour exercer cette fonction, Thibault Bulabois répond par un trait d’humour. «Mieux vaut avoir deux oreilles et une seule bouche, parce que, dans ce métier, il faut écouter deux fois plus que l’on ne parle, confie-t-il. Nous devons en effet être en permanence à l’écoute de l’écosystème de l’entreprise, de la concurrence et des menaces externes. Il faut également être un bon communicant et aimer le travail collaboratif car nous passons une bonne partie de notre temps à établir des connexions entre les différentes équipes et à porter la parole du risque et de sa maîtrise au sein des métiers. Il faut enfin être doté de solides capacités d’organisation et d’adaptation, dans un monde où les risques sont protéiformes et où les crises climatiques, sanitaires ou géopolitiques s’enchaînent les unes après les autres.»
Le baromètre fait d’ailleurs ressortir que les risk managers aiment leur métier, même si 59% d’entre eux l’estiment encore insuffisamment reconnu. En effet, 47% des sondés indiquent que, pour la prochaine étape de leur carrière, ils entendent rester en poste ; 30% aimeraient prendre des responsabilités complémentaires ; 29%, garder le même poste, mais dans une autre entreprise.
«Tout cela démontre que nous exerçons une profession passionnante et qu’on n’a pas envie de quitter, les départs vers le conseil, le courtage ou l’assurance restant relativement rares. Tout l’enjeu pour la filière est donc de proposer des perspectives aux jeunes qui la rejoignent, de façon à préparer la succession des ‘top risk managers’ qui partiront à la retraite dans les années à venir», conclut Thibault Bulabois.
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