Pékin éteint l’étoile des BATX

Tencent cède ses parts dans JD.com, dernier exemple des effets du durcissement réglementaire sur les anciennes stars de l’internet chinois.
Olivier Pinaud
Pékin Chine Empire du Milieu. Le parti communiste chinois (PCC) cherche à accroître son emprise sur les grandes entreprises technologiques.
La législation chinoise en matière de numérique et de commerce en ligne, jusque-là parfois trop vague, se précise et se durcit.  -  AdobeStock

Tencent a reçu le message. Le groupe chinois de jeux et de médias sociaux, propriétaire notamment de WeChat, l’application de messagerie la plus populaire en Chine, a annoncé jeudi vouloir se séparer de la quasi-intégralité de sa participation dans JD.com. Il distribuera directement à ses actionnaires une part d’un peu moins de 15% du capital du groupe de commerce en ligne, sous la forme d’un dividende exceptionnel d’une valeur totale de 127,69 milliards de dollars hongkongais (14,5 milliards d’euros).

Après cette distribution exceptionnelle, Tencent ne détiendra plus que 2,3 % de JD.com, contre environ 17% actuellement. Ironie de l’histoire quand on connaît les tensions diplomatiques et commerciales actuelles entre Pékin et Washington, le groupe chinois perdra son statut de premier actionnaire du site de e-commerce au profit de l’américain Walmart détenteur de 9,3% du capital. Prosus, la filiale du sud-africain Naspers cotée à la Bourse d’Amsterdam, principal actionnaire de Tencent avec une participation de 29%, recevra la plus grande partie des actions JD.com distribuées.

Des avertissements au durcissement

Selon Tencent, qui a investi pour la première fois dans JD.com en 2014, le moment était venu pour lui de procéder à cette cession, la société de commerce électronique ayant atteint un stade où elle peut autofinancer sa croissance. Son mouvement est toutefois vu comme la conséquence du durcissement réglementaire des autorités chinoises envers les plateformes numériques et les sites de e-commerce.

Après une série d’avertissements et de sanctions, l’Administration d'État pour la régulation des marchés (State Administration for Market Regulation, SAMR) chinoise, a publié cet été un projet de réglementation visant à empêcher la concurrence déloyale et à mieux encadrer l’usage des données des utilisateurs. Les opérateurs internet «ne doivent pas mettre en œuvre ou aider à mettre en œuvre une concurrence déloyale sur internet, perturber l’ordre de la concurrence sur le marché, affecter les transactions équitables sur le marché», indiquait le SAMR. L’examen du texte suit son cours. D’autres activités numériques sont dans le viseurs. Le SAMR a récemment mis en consultation un projet de régulation de la publicité sur internet.

Un cloud d'État pour les entreprises publiques

Autre exemple des nouvelles préoccupations de Pékin, les autorités ont suspendu mercredi un partenariat avec Alibaba Cloud Computing, accusée de ne pas avoir signalé et corrigé rapidement une vulnérabilité en matière de cybersécurité. Le gouvernement chinois a demandé aux entreprises publiques de migrer leurs données stockées chez des opérateurs privés tels qu’Alibaba et Tencent vers un système de cloud soutenu par l'État d’ici l’année prochaine.

Ces nouvelles règles, qui s’intègrent dans un plan quinquennal plus global dévoilé début août, viennent compléter ou préciser une législation jusque-là parfois trop vague en matière de numérique et de commerce en ligne mais elles ont affaibli les positions des Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi, surnommés les BATX en référence aux Gafa américains.

Le cours de l’action Tencent a chuté de 20% cette année. Alibaba a plongé de 50%, Baidu de 45% et Xiaomi de 47%. Rien à voir avec les Gafa : Apple a gagné 35% cette année et frôle désormais les 3.000 milliards de dollars de capitalisation. Google a bondi de 70%, Microsoft de 50% et Facebook de 23%. Avec son gain de 7%, Amazon ferme la marche.

Les groupes chinois ne peuvent même plus espérer trouver de l’air sur les marchés étrangers. La Bourse américaine a fermé ses portes aux entreprises chinoises sous l’effet d’un durcissement des règles imposées par la Securities and Exchange Commission. Didi en a été la principale victime : le groupe de VTC a quitté Wall Street début décembre, cinq mois seulement après sa cotation.

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