
Les entreprises se pressent au chevet de Notre-Dame

Moins de deux jours après l’incendie de Notre-Dame, le conseil des ministres sera entièrement consacré ce matin au sinistre. Les questions sur le coût et les délais du chantier de reconstruction de la cathédrale, qui incombe à l’Etat, le propriétaire de Notre-Dame, seront abordées. Hier, le président de la République a promis que la reconstruction sera achevée en cinq ans. De nombreuses interrogations se posent aussi sur l’organisation du chantier, notamment sur la gestion des centaines de millions d’euros de promesses de dons qui affluent depuis lundi soir et l’appel à une souscription nationale lancée par Emmanuel Macron.
L’incendie a fait naître une mobilisation financière inédite parmi les entreprises. En une seule journée, les grands groupes français et/ou leurs principaux actionnaires (LVMH-Arnault, L’Oréal-Bettencourt Meyers, Total, Kering-Pinault, Bouygues, Decaux…) se sont engagés à donner plus de 700 millions d’euros pour aider à la reconstruction de Notre-Dame. Ce total ne tient compte que des initiatives rendues publiques hier et le montant final sera très largement supérieur, les organisations patronales (Medef, Afep et CPME) ayant appelé leurs adhérents à donner.
Le Crédit Agricole, via sa fondation, a annoncé vouloir donner 5 millions d’euros, dont 1 million pour la caisse d’Ile-de-France. La Société Générale a promis 10 millions d’euros et « étudie également les moyens d’associer ses collaborateurs et ses clients qui ont à cœur de participer à cette mobilisation collective sans précédent ». BNP Paribas, le Crédit Mutuel et le CIC ont aussi prévu de participer à l’effort. Axa a annoncé vouloir mobiliser «10 millions d’euros pour la souscription nationale lancée par le président de la République».
Le total calculé hier ne tient pas non plus compte des initiatives plus matérielles que le simple don d’argent. «La Caisse des dépôts offrira des chênes issus de ses forêts gérées par la Société forestière nécessaires à la reconstruction de la charpente de la cathédrale», a annoncé son directeur Eric Lombard sur Twitter. Groupama va offrir «les 1.300 chênes centenaires nécessaires à la reconstruction de la charpente de Notre-Dame de Paris». «Pour respecter le travail des Compagnons de l'époque, ces chênes seront prélevés dans ses forêts normandes», a ajouté l’assureur.
Fiscalité favorable
De son côté, Vinci a lancé un appel à une union du secteur français du BTP dans le cadre d’un mécenat de compétence pour travailler sur la reconstruction de la cathédrale. «Cette opération de mécénat de compétence, menée par une profession tout entière, pourrait s’organiser sous l'égide de la Fondation du patrimoine et permettrait d’engager la reconstruction dans les plus brefs délais, afin que Paris retrouve sa cathédrale», a expliqué Vinci. Le groupe prévoit d’apporter une partie du financement du futur chantier dans le cadre de la souscription nationale prévue et proposera à ses salariés de s’associer au projet. EDF a également proposé ses services techniques.
Cet afflux de dons est favorisé par la fiscalité. La loi Aillagon de 2003 permet aux entreprises de déduire 60% de leurs dépenses de mécénat, dans la limite de 5‰ (cinq pour mille) de leur chiffre d’affaires annuel hors taxes. Cette déduction peut monter jusqu’à 90% lorsque le mécénat porte sur l’achat de biens culturels considérés comme des «trésors nationaux» ou présentant «un intérêt majeur pour le patrimoine national».
La restauration de Notre-Dame n’entre pas dans ce dernier cas. Mais hier, l’ancien ministre de la Culture, Jean-Jacques Aillagon, aujourd’hui directeur général de la Pinault Collection, a plaidé pour que «l’Etat décrète vite Notre-Dame comme Trésor national, de façon à ce que les dons faits pour sa reconstruction bénéficient de la réduction d’impôt de 90%». «Nous allons voir avec le gouvernement quel dispositif spécifique nous mettons en œuvre, mais bien évidemment l’Etat sera là auprès de tous nos compatriotes pour reconstruire», a assuré sur France Inter Franck Riester, l’actuel ministre de la Culture.
Ce dispositif est coûteux pour l’Etat. Dans un rapport publié à l’automne, la Cour des comptes avait appelé à «mieux encadrer» le mécénat d’entreprise. Selon les calculs des magistrats, la dépense fiscale est passée de 90 millions en 2004 à plus de 900 millions d’euros en 2016 et 2017, dépense dont «l’analyse et le pilotage par l’État sont particulièrement lacunaires».
Mobilisation internationale
La mobilisation dépasse largement le cadre des frontières françaises. Le président du Conseil européen, Donald Tusk, a annoncé que la Commission européenne appuierait les efforts de reconstruction. La Banque centrale européenne a également indiqué sur Twitter vouloir «participer aux efforts de restauration» sous une forme non précisée. La French Heritage Society, organisation installée à New York qui se consacre à la préservation des trésors architecturaux et culturels français, a elle aussi lancé une page Web pour collecter des fonds.
Henry Kravis et sa femme débourseront 10 millions de dollars, a annoncé le fonds américain KKR. Tim Cook, le PDG d’Apple, première capitalisation boursière mondiale, a annoncé que le groupe donnera pour la reconstruction de la cathédrale.
Plus d'articles du même thème
-
Groupama enregistre le résultat le plus élevé de son histoire
L’assureur mutualiste affiche des résultats 2024 en nette progression par rapport à l’exercice précédent grâce à la bonne tenue de l’ensemble de ses activités d’assurance et une sinistralité "climatique" clémente. Toutefois, le ratio de solvabilité pâtit d’effets de marché défavorables et d’exigences en capital plus élevées. -
Harvest commence à sortir du bois après sa cyber-attaque
Sonia Fendler, directrice générale adjointe chez Harvest, est intervenue à la Convention annuelle de l’Anacofi, quelques jours après s'être exprimée lors d'une réunion organisée par la CNCGP. Elle a donné des premiers éléments d’explications sur l’origine de la fuite de données et confirmé que la période d’indisponibilité des services ne sera pas facturée. -
Le courtier en assurances Adélaïde confirme ses ambitions de croissance
Le groupe de courtage familial indépendant boucle une belle année 2024 et entend bien continuer sur cette lancée. Un nouveau directeur général pour Verlingue attendu fin avril viendra renforcer encore la dynamique de croissance de la filiale historique du groupe.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions