
Les banques françaises profitent d’une embellie sans lendemain

Les résultats des banques françaises au troisième trimestre devraient être à l’image de l’économie : soutenus par la reprise de l’activité après un printemps cataclysmique, mais sans que l’on puisse en tirer des conclusions définitives pour l’avenir alors que l’Europe se reconfine. Pour BNP Paribas, qui publie ses comptes le 3 novembre, comme pour Crédit Agricole SA (4 novembre), la Société Générale et Natixis (5 novembre), «l’élément clé de la discussion sera la perspective des prochains mois compte tenu de la résurgence du Covid-19 et des nouvelles restrictions», résume Flora Bocahut, analyste chez Jefferies.
Entre juillet et septembre, dans la banque de détail, «l’activité des clients s’est progressivement rétablie, avec un rebond de la production de prêt et d’assurance», soulignent les analystes de JPMorgan Cazenove. Sur les marchés, le trimestre s’est révélé à nouveau porteur pour les métiers de fixed income (taux, change et matières premières). Les performances dans le trading de Deutsche Bank en témoignent. Et cette fois, les banques françaises n’auront plus à déplorer des centaines de millions d’euros de pertes comme au premier semestre dans leur domaine d’excellence, les produits structurés actions, qui avaient souffert de l’annulation brutale des versements de dividendes. Quant au coût du risque, il pourrait s’orienter légèrement à la baisse : «les provisions collectives ont été largement comptabilisées au premier semestre, et la hausse des provisions spécifiques a été amortie et repoussée grâce au soutien du gouvernement», explique JPMorgan Cazenove.
Restructuration attendue chez Natixis
En dépit de cette embellie, la période estivale constitue traditionnellement un «petit» trimestre pour les banques. Aussi le consensus Factset prévoit-il un recul du bénéfice net de BNP Paribas et de Crédit Agricole SA, à 1,52 milliard d’euros et 790 millions d’euros respectivement, contre 2,3 milliards et 954 millions au deuxième trimestre.
A l’inverse, la Société Générale et Natixis, en perte à fin juin, retrouveraient le chemin des profits avec respectivement 428 et 107 millions d’euros de résultat net, tout en restant nettement en-deçà des performances enregistrées un an auparavant. Convalescentes et distancées par leurs deux concurrentes, la banque rouge et noire et la filiale des Banques Populaires et des Caisses d’Epargne resteront au centre de l’attention.
Natixis et son nouveau directeur général Nicolas Namias doivent dévoiler un plan de restructuration dans la banque de financement et d’investissement. «Nous nous attendons à 200 millions d’euros de réductions de coûts supplémentaires, environ 10% de la base de coûts 2019», anticipe Lorraine Quoirez, l’analyste d’UBS. Les performances du pôle gestion d’actifs, marqué par le gel de certains fonds de son ancienne pépite H2O Asset Management entre fin août et mi-octobre, nourriront aussi les interrogations. Natixis fera également l’actualité dans ces métiers cette semaine en finalisant le rapprochement de sa boutique Ostrum avec les activités de gestion taux et assurantielle de La Banque Postale AM.
Dépression boursière
Du côté de la Société Générale, pas de grandes annonces à attendre. Le groupe dirigé par Frédéric Oudéa avait communiqué début août sur la restructuration de ses activités de marchés suite à l’accident sur les dérivés actions, avec une baisse de coûts de 450 millions d’euros d’ici 2022-2023 et une perte de revenus attendue entre 200 et 250 millions d’euros. Et c’est fin novembre que la banque devrait en dire plus quant au rapprochement annoncé des réseaux Société Générale et Crédit du Nord en France. Les propos de ses dirigeants seront néanmoins disséqués tant l’action reste massacrée en Bourse, avec un cours divisé par trois depuis le 1er janvier, autour de 11,5 euros, et une valorisation à moins de 20% de son actif net tangible.
Cette dépression boursière est commune à tout le secteur bancaire européen. Elle se nourrit, cette année, de l’arrêt du versement des dividendes, préconisé par la Banque centrale européenne. Alors que la zone euro se dirige vers une nouvelle contraction au quatrième trimestre, la question du retour aux actionnaires occupe une place centrale dans les discours des dirigeants de banque. «Les résultats du troisième trimestre ne serviront pas de déclencheur à une revalorisation. Nous continuons à penser que le retour au paiement des dividendes est clé», souligne Lorraine Quoirez. Le superviseur bancaire européen a prévu de se pencher sur le sujet après le 10 décembre.
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