
La France doit encore convaincre à Bruxelles au sujet de Solvabilité 2

À Bruxelles, Bercy et les assureurs français sont en pleine campagne de lobbying. Objectif : utiliser la revue de Solvabilité 2 attendue à l’automne pour réorienter l’investissement des assureurs européens vers les actions. Pour 100 euros investis en actions, ils doivent en mettre 49 ou 39 de côté, selon qu’elles sont ou non cotées – des conditions «punitives» pour l’industrie.
Bercy pousse ainsi à créer un nouveau calibrage à 22% pour les actions détenues sur le long terme. D’autres pistes circulent, comme des conditions plus souples pour cocher la case «investissement stratégique» – un calibrage à 22% si l’assureur possède 20% de l’entreprise – ou des calculs plus simples de la volatilité des actions – pour éviter des chocs trop forts quand les marchés bougent.
Pour le Trésor, Solvabilité 2 a fait perdre 50 milliards d’euros d’investissement en actions en France. De fait, les assureurs européens investissent majoritairement en obligations. Selon l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (Eiopa), elles constituaient 84% de leur portefeuille en 2016, contre 9% pour les actions. Mais pour l’Eiopa, les investissements en actions sont à ce niveau depuis 2011, avant l’entrée en vigueur de Solvabilité 2 en 2016. Argument contesté à Paris, selon qui il faut remonter à 2009 – les assureurs préparaient alors déjà l’entrée en vigueur de la directive. Toujours est-il que l’avis de l’Eiopa, publié en février dans l’optique de la révision de cet automne, est conservateur : il propose seulement de faire bénéficier certaines actions non cotées du calibrage à 39%. D’autres Etats, comme l’Allemagne, paraissent également réticents à toute baisse des fonds propres.
Au milieu, la Commission européenne – qui fera la proposition juridique – reste prudente, sur les moyens d’action comme sur les chiffres. Sur le premier point, la révision ne concerne que l’acte délégué de Solvabilité 2, qui fixe les calibrages. Des modifications ambitieuses peuvent nécessiter de modifier la directive elle-même – ce qui n’est prévu que pour 2020. Sur les chiffres, les services de la Commission ont lancé une étude d’impact et commandé une analyse sur l’investissement des assureurs en actions. Elle n’arrivera que fin 2018. Trop tard pour le règlement délégué, mais encore à temps pour la révision complète de 2020.
Plus d'articles du même thème
-
Le nouveau dilemme européen du déploiement de Bâle 3
Sans parler de retour en arrière ou de dérégulation, l’Europe semble désormais consciente d’être allée plus vite et plus loin que les autres juridictions en matière de règlementation bancaire. L’optimisation des règles qui restent encore à produire dans le cadre de la transposition du dernier paquet bancaire de Bâle 3 et de la mise en œuvre de la FRTB cristallise l’attention du secteur. -
Thomas Verdin (BM&A Reg Tech) : «L’application des règles de Bâle a un coût opérationnel important»
La finalisation des règles de Bâle obligera les banques, qui étaient habilitées à n’utiliser que des méthodes internes de mesure des risques, à comparer ces résultats avec une méthode dite standard, à partir de données externes. Thomas Verdin, directeur associé de BM&A Reg Tech, explique simplement quelles sont les implications opérationnelles de ces changements. -
Le Parlement européen vote un report de CSRD
Le Parlement européen a voté le report des dates d’application des nouvelles législations de l’UE sur le devoir de vigilance et la publication d’informations en matière de durabilité pour certaines entreprises.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions