Bruno Le Maire élargit le prêt à taux zéro pour dégripper le marché immobilier

Le dispositif, qui devait prendre fin en décembre, est prolongé jusqu’en 2027. Réservé aux primo-accédants, il est recentré sur les logements neufs en zone tendue. Un marché à l’arrêt avec la remontée des taux.
Une maison en construction
Le gouvernement veut relancer l'acquisition immobilière dans le neuf en donnant un coup de pouce aux primo-accédants modestes.  -  paulbr75 / Pixabay

Le gouvernement veut sortir de l’impasse sur le marché immobilier. Depuis la remontée des taux qui pèse sur la capacité d’emprunt des ménages, la production de crédit chute et la promotion sur le marché du neuf a subi un sérieux coup d’arrêt. Pour encourager l’accession à la propriété des ménages les plus modestes, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a confirmé ce mercredi 18 octobre que le dispositif du prêt à taux zéro (PTZ), censé prendre fin le 31 décembre, serait prolongé jusqu’en 2027.

Comme l’avait précédemment annoncé la Première ministre Elisabeth Borne lors du conseil national de la refondation sur le logement, le PTZ qui est accordé, sous conditions de ressources, aux primo-accédants uniquement, sera aussi recentré sur l’acquisition de logements neufs collectifs en zone tendue et de logements anciens dans le cadre de projets de rénovation hors zone tendue. 209 communes supplémentaires seront reconnues comme étant en zone tendue dans le cadre du dispositif.

Le montant maximal du PTZ devrait, par ailleurs, être revu de 80.000 à 100.000 euros, a annoncé le ministre sur RTL. Le gouvernement veut aussi étendre la quotité du projet immobilier financée par le PTZ : elle représentera 50% du total du financement des ménages, contre 40% aujourd’hui. Cela constitue «une aide par ménage pouvant atteindre jusqu'à 10.000 euros de subvention», estime Bercy dans un communiqué.

Pour élargir l’accès du PTZ au plus grand nombre de ménages, le barème des revenus pour y être éligible a également été revu, avec une hausse du plafond des revenus sur les deux premières tranches et l’ajout d’une quatrième tranche. Au total, Bercy estime à 29 millions le nombre de Français éligibles au dispositif, contre 23 millions aujourd’hui. Le PTZ est financé par l’Etat puisque ce dernier subventionne intégralement le taux zéro. L'élargissement du dispositif devrait ainsi coûter 800 millions d’euros par an aux finances publiques.

Un «pas positif «pour les banques

Interrogée par L’Agefi, la Fédération des banques françaises (FBF) se félicite de ces annonces. «Tout ce qui va dans le sens pour faciliter le financement des projets immobiliers de nos clients est positif et la profession avait fait des propositions sur le logement aux pouvoirs publics pour contribuer à répondre aux attentes de nos concitoyens qui sont fortes. L’élargissement du PTZ annoncé est un pas positif et les banques mettront en œuvre ce nouveau cadre quand il sera définitivement fixé par les textes. C’est une possibilité de plus qui sera offerte aux personnes qui souhaitent accéder à la propriété, notamment pour celles et ceux qui ont des revenus plus intermédiaires, dans le cadre de prêts responsables des banques.»

Le Crédit Agricole, qui détient une part de marché de 40% avec 1 milliard d’euros de PTZ financés en 2022, n’a pas tardé à emboîter le pas à ces annonces en proposant à ses clients une nouvelle offre «booster PTZ» qui leur redonnera encore davantage de pouvoir d’achat dans leur projet d’accession immobilière. Concrètement, les caisses du Crédit Agricole et LCL proposeront à leurs clients un prêt à taux zéro sans frais de dossier, sur une durée maximale de 20 ans, dont le montant sera doublé par rapport à celui du PTZ accordé. L’offre du Crédit Agricole est tout de même plafonnée à 20.000 euros.

Mais un impact limité à 40.000 accédants

Le maintien et l’élargissement du PTZ suffira-t-il, pour autant, à relancer le marché du neuf ? «Comme dans tout projet, il y a du bon (nouvelle tranche, prolongation, nouvelles villes éligibles…) et du moins bon pour certains, notamment la confirmation de la suppression du PTZ dans la construction de maisons individuelles», réagit Maël Bernier, porte-parole du courtier Meilleurtaux. En recentrant le dispositif sur les logements collectifs neufs en zones tendues, le gouvernement souhaite être cohérent avec ses «objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols», a fait savoir Bercy dans un communiqué. La loi ZAN - pour «zéro artificialisation nette des sols» - du 20 juillet 2023 vise notamment à réduire de moitié la consommation d’espaces naturels agricoles et forestiers par rapport à la décennie précédente. «Le recentrage du PTZ est certes tout à fait cohérent avec la Loi ZAN, mais il fait que très peu de ménages seront en réalité concernés», analyse Maël Bernier. Le gouvernement estime que la nouvelle mouture du PTZ pourra bénéficier à 40.000 accédants à la propriété.

«Le nœud du problème réside dans le fait que les prix de l’immobilier ne baissent pas assez vite. C’est surtout dû au fait que nous ne construisons pas assez de logements neufs en France», estime un grand banquier de la place. Les banques françaises militent depuis plusieurs mois pour un assouplissement de la norme du Haut Conseil de la stabilité financière (HCSF) qui impose un taux d’endettement maximal de 35% sur une durée maximale de 25 ans. Les banques ont la possibilité de déroger à cette règle pour 20% de la production, la majeure partie de cette flexibilité étant réservée aux acquéreurs d’une résidence principale.

La norme HCSF toujours dans le collimateur des banques

Pour relancer l’investissement locatif et donc la promotion dans le neuf, le HCSF, présidé par Bruno Le Maire, a déjà consenti il y a quelques mois à élargir la part de cette flexibilité bénéficiant aux acquéreurs de résidences secondaires. Elle représente désormais 6% de la production trimestrielle contre 4% précédemment. Ce que les professionnels du crédit jugent encore trop faible pour avoir un impact.

Lors de sa dernière réunion, le HCSF s’est prononcé pour un statu quo sur ces critères tandis que Bruno Le Maire s’est déclaré «ouvert à un assouplissement» de la norme dans un entretien au Parisien. Fera-t-il sauter le verrou du taux de 35% ou de la durée d’emprunt pour certaines catégories de ménages ? Pour l’heure, le HCSF préfère inviter les banques à se saisir pleinement de la capacité de dérogation qui n’est utilisée que pour 14% de la production, au lieu des 20% accordés. Les banques françaises, elles, espèrent plus de souplesse au sein de cette marge de flexibilité en faisant sauter ses contraintes d’allocation pour en simplifier le pilotage dans les réseaux. Verdict en décembre.

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