
ASSURANCE - La pression salariale s’accroît

La hausse générale des prix n’épargne pas les salariés de l’assurance. « La problématique, c’est bien sûr l’inflation, qui continue de déraper. Le thème du pouvoir d’achat est récurrent et très mal vécu par les ménages qui se rendent compte de l’envolée de certaines denrées », explique Thierry Tisserand, secrétaire général de la fédération banque et assurance de la CFDT, première organisation de la branche avec une représentativité de 34,52 %.
C’est pourquoi l’accord sur la rémunération minimale annuelle (RMA) 2022, qui porte sur la revalorisation des minima de branche et pas sur les salaires réels, était encore plus attendu qu’à l’accoutumée. « Plus que jamais cette année, il était essentiel de trouver un accord sur la revalorisation des rémunérations minimales de branche », reconnaît Florence Lustman, présidente de France Assureurs. Sur les six organisations représentatives, seules deux, la CFE-CGC (21,37 %) et l’Unsa (10,77 %), ont finalement signé les trois accords : ceux-ci prévoient une augmentation de 5 % pour le personnel administratif des classes 1 et 2 et les commerciaux de niveau 1, et une augmentation comprise entre 2,5 % et 1,8 % pour les autres, qui représentent la majorité des salariés.
Bien que les autres organisations aient indiqué qu’elles ne s’opposeraient pas à l’accord, l’intersyndicale qui s’était formée a volé en éclats, à l’image de la CFDT qui n’a finalement pas signé, une première en vingt ans. FO (9,72 % de représentativité pour CGT-FO) regrette par exemple que l’accord « valide la perte de pouvoir d’achat pour tous les salariés quelle que soit leur classe », alors que l’inflation devrait être comprise entre 6,5 % et 7 % d’ici à la fin de l’année, selon l’Insee. Cette intersyndicale réclamait notamment une augmentation de 8 % pour la première tranche. « Une honte pour une branche dont les entreprises engrangent des milliards de bénéfices. On ne peut pas dire que cet accord représente une victoire du dialogue social », conclut le syndicat. « Dans cet environnement, une seule chose est stable : les bénéfices des entreprises. Nous restons sur ce problème de partage des richesses », déplore Alban Scamorri, coordinateur CGT.
« Ce n’est pas tant cet accord en particulier qui est significatif mais plutôt la régularité avec laquelle nous signons chaque année des revalorisations permettant de maintenir les minima au-dessus du Smic. Et aussi notre capacité à nous adapter à l’évolution du contexte macroéconomique », défend Véronique Jolly, présidente de la commission sociale de France Assureurs (FFA). Cette adaptation est notamment symbolisée par une clause de revoyure qui devrait permettre aux différentes parties de se retrouver autour de la table en septembre. « Nous avons signé, après évolution de la négociation et l’obtention notamment pour les classes 1 et 2 d’une augmentation de 5 %. Cependant, nous savons que la donne ne peut pas se changer uniquement sur les RMA. A ce titre, la clause de revoyure qui a été obtenue dans le cadre de cet accord nous permet symboliquement de justifier le fait de nous retrouver autour de la table au mois de septembre », explique Francky Vincent, président de la fédération CFE-CGC de l’assurance. Outre l’absence de présentation d’une analyse des impacts des augmentations des RMA de branche sur les rémunérations effectives, la CGT regrette que cette clause soit conditionnée à une nouvelle hausse du Smic, « alors qu’elle doit être automatique au vu de la situation économique caractérisée par l’inflation galopante ».
NAO
Les syndicats commencent surtout à regarder vers les négociations annuelles obligatoires (NAO), dont certaines commenceront rapidement après septembre dans le monde de l’assurance. Déjà, début 2022, FO avait demandé que les échanges entre les directions et les syndicats sur les hausses des salaires reprennent. Un credo de plus en plus partagé : « Nous demandons systématiquement la réouverture des négociations au sein des entreprises, notamment si elles ont lieu à l’automne et ne tiennent en aucun cas compte de l’inflation », insiste Thierry Tisserand. Depuis le début de l’année, de multiples manifestations ou événements ont été organisés par des organisations syndicales pour réclamer des hausses de salaires : chez Crédit Agricole Assurances, Groupama, CNP Assurances, Vyv ou AG2R La Mondiale.
Si plusieurs assureurs attendent la loi pouvoir d’achat de la part de l’exécutif pour profiter de mesures de défiscalisation, les organisations syndicales escomptent des hausses collectives. « La fédération assurance CFE-CGC revendique systématiquement ces ouvertures de négociations à la rentrée de toutes les entreprises de la profession. Notre objectif sera d’obtenir des augmentations générales, des évolutions concernant les accords de participation et d’intéressement, ainsi que des accords concernant les forfaits mobilités durables (FMD). Si, à la rentrée, le niveau souhaité par notre organisation n’est pas atteint en termes de revalorisation salariale, nous aurons la capacité de structurer notre contestation », abonde Francky Vincent, qui prévient : « Nous sommes sans doute à un tournant. De manière plus générale, si l’inflation devient structurelle, il faudra revoir plus spécifiquement un mécanisme de hausse générale automatique. »
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