Bouger les lignes sur la foi de l’expertise

«Au royaume des clients aveugles, certains seront contents de devenir borgnes…» Cette remarque formulée récemment lors d’un colloque animé par votre serviteur provient d’un responsable d’une société financière et présente à notre avis deux sérieux atouts. Le premier touche à son humour froid sans agressivité, qui n’est pas si courant dans nos milieux civilisés. Le second est d’exprimer en creux ce que, dans le fond, de nombreux acteurs du conseil vivent et ressentent depuis… longtemps.
Au fait, de quoi s’agissait-il? De l’apport des supports Eurocroissance annoncés par leurs concepteurs comme la renaissance de l’assurance vie. Ce dont notre interlocuteur cité plus haut doutait en partie dans la mesure où le stimulus attendu dans la performance des contrats aurait du mal, dans les conditions actuelles, à creuser la différence avec les fonds en euros, à la vie tranquille, certes, mais garantie. Et que, à tout prendre, il faudrait patienter pour devenir «borgne» ou, pour les plus sachants, ouvrir grand les yeux en misant sur les actions en direct, seul ou accompagné.
Des arguments à prendre en compte si l’on observe certains investisseurs avisés et/ou aisés, mais encore plus en se penchant sur le comportement d’une énorme majorité des traumatisés de la vie boursière. Cette armée victime de nombreux revers depuis 2008, mais souvent depuis le début du siècle, et qui renâcle à l’offensive tout en ne souhaitant pas déserter. Ceux que vous-mêmes, experts de la finance, désignez de réfractaires au risque. Ceux que vous autres, juristes et fiscalistes, soulignez aussi être dans le corner du matraquage fiscal, donc contraints à la prudence. Ceux que l’ensemble des conseillers, finalement, entendent couramment se plaindre d’être désorientés.
Le géant BlackRock vient de sortir la troisième édition de son étude mondiale «Investor Pulse» menée auprès de 27.500personnes dans 20pays. Le gros plan sur nos compatriotes est éclairant: ils allouent 56% aux placements liquides alors même que les taux de rendement sont très bas et encore grignotés par une inflation résiduelle. Que dira-t-on de la future rémunération du Livret A en janvier 2015 ? Peu importe finalement quand il reste l’eau tiède de l’assurance vie et des comptes courants.
Tout ceci est la résultante d’une époque sans véritables certitudes et encore moins de convictions. Ce qui peut apparaître comme un levier manifeste pour bouger les lignes sur la foi des expertises les plus sérieusement ficelées.
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