Proposition de directive sur les sociétés personnelles : les notaires formulent des mises en garde

La Commission européenne a présenté le 9 avril dernier une proposition de directive sur les sociétés personnelles. Le projet de « societas unius personae» ou SUP doit permettre, selon la Commission, de lever les obstacles à l’activité économique transfrontalière des PME au sein du marché unique. La proposition vise à harmoniser les exigences pour la création d’entreprises à un seul associé.
Parmi les dispositions prévues:
- l’obligation pour les États membres d’autoriser l’immatriculation directe en ligne des SUP, sans que le fondateur ne soit obligé de se rendre dans le pays concerné,
- la mise en place d’un modèle de statuts, identique dans toute l’Union et disponible dans toutes les langues de l’Union,
- l’exigence d’un capital minimum de 1 euro.
Les notaires d’Europe s’inquiètent cependant de cette proposition qui affaiblirait «les contrôles dans le processus de fondation dont le but est de prévenir les risques de financement du terrorisme et la fraude fiscale». Le Conseil des notariats de l’Union européenne (CNUE) formule différentes mises en garde:
- le projet inclut l’obligation pour les Etats membres de prévoir la procédure d’enregistrement des SUP par des moyens électroniques, sans présence physique du fondateur dans le pays de l’enregistrement. Dès lors, il ne sera plus possible d’effectuer une véritable vérification, entre autres, de l’identité des fondateurs. Pourtant, ce contrôle est une obligation imposée par les règles internationales et européennes pour la lutte contre le blanchiment de capitaux.
- Les Notaires d’Europe sont également inquiets de l’interdiction de conditionner l’enregistrement de la SUP à l’obtention de certaines licences ou autorisations, par exemple pour l’exercice d’activités financières. Ainsi, ils constatent que, plutôt que de construire des mécanismes préventifs solides afin d’obtenir des informations vérifiées, la proposition donnera inévitablement lieu, sous un vernis de modernité technique, à plus d’anonymat pour les structures de sociétés nationales et transnationales.
- De plus, la proposition de la Commission affaiblira considérablement la qualité des registres de commerce dans les Etats membres qui connaissent l’acte authentique pour la constitution des sociétés et donc un véritable contrôle de légalité effectué par les autorités publiques comme les juges et les notaires. Or, les opérateurs économiques ont une grande confiance par rapport aux données contenues dans ces registres. Dès lors, la proposition de la Commission pourrait avoir un impact négatif sur l’économie des Etats membres ayant pris le parti de la sécurité juridique.
- Enfin, les Notaires d’Europe regrettent que la proposition réintroduise les principes de dissociation des sièges réel et statutaire, ainsi que l’absence de capital minimum ; principes qui avaient déjà été proposés dans le projet de Société privée européenne (SPE). Pour les Notaires d’Europe, ces mesures affaibliront la protection des consommateurs et des créanciers et favoriseront les systèmes moins contraignants en ce qui concerne le droit social et les régimes de participation des travailleurs.
Communiqué CNUE, 9 avril 2014 et 11 avril 2014
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