Affaire H2O AM : les porteurs lésés estiment leur préjudice à 674 millions d’euros

L’Association collectif porteurs H2O a estimé le montant total du préjudice subi par ses adhérents depuis le début du conflit qui les oppose à la société de gestion H2O AM. Lors d’une conférence dédiée à ses membres, qui s’est déroulée le 17 novembre, elle a annoncé qu’elle l’avait évalué à 674 millions d’euros. La somme inclut la prise en charge de 30% de frais de justice, les pertes subies et le manque à gagner des montants bloqués dans des fonds cantonnés (fonds SP pour side-pocket, ndlr) de la société de gestion, ex-affilié de Natixis Investment Managers, depuis 2019.
Dans cette affaire, le collectif met ainsi en cause la responsabilité de la société de gestion H2O, mais également les défaillances de contrôle des tiers de confiance. Selon l’association, Natixis IM, l’actionnaire majoritaire à l'époque des faits, Caceis, le dépositaire des actifs, et KPMG, le commissaire aux comptes, ont conjointement joué un rôle direct dans la commission de manquements. «Si une société de gestion investit dans des actifs qui ne sont pas éligibles au portefeuille d’un OPCVM, il appartient au dépositaire de l’empêcher. Si le dépositaire se rend compte du manquement, le manquement disparait. Pendant six ans, Caceis Banque a eu la possibilité de voir et de signaler les anomalies sur les titres illiquides (Tennor), alors qu’il n’y a jamais eu d’alertes de la part du dépositaire», explique Dominique Stucki, avocat associé et fondateur de Legitix. En conclusion, l’ensemble des tiers de confiance seront assignés en justice aux côtés de H2O. Sans doute début décembre.
A lire aussi: H2O AM sabre encore la valeur de ses fonds cantonnés
L’association, accompagnée du litigation fund Deminor, a finalement relevé lors de son enquête plus de 2,3 milliards d’euros de pertes depuis le début de l’affaire. En plus des SP, composés de 1,6 milliard d’euros d’actifs dits illiquides adossés au groupe Tennor, le collectif retient une perte supplémentaire de 714 millions d’euros, réalisée juste avant le transfert des obligations dans les fonds cantonnés. «Cette poche est aujourd’hui invendable, les adhérents n’ont plus d’attentes concernant ces actifs», indique Gérard Maurin, fondateur de l’association. Après avoir subi deux baisses consécutives de valorisation depuis le mois de septembre, la valeur des fonds cantonnés est passée de 1,6 milliard d’euros à environ 301 millions d’euros.
Une holding luxembourgeoise dans le viseur
L’attention du collectif d’investisseurs se tourne aussi vers la holding luxembourgeoise détentrice des entités de la société de Bruno Crastes, H2O AM Holding SA, Luxembourg. «Nous voulions savoir quelles ont été les décisions stratégiques prises par cette holding pour comprendre son rôle, explique Gérard Maurin. Nous pensons que le Luxembourg a joué un rôle important». Une demande de documents référés in futurum a ainsi été déposée. «Nous avons demandé des documents simples, comme les liens entre la holding, ses filiales et les actionnaires, mais aussi les PV d’assemblée générale», ajoute le fondateur de l’association.
A lire aussi: H2O AM fait appel des sanctions de l'AMF
L’association, qui a finalement laissé les inscriptions ouvertes jusqu'à l’assignation en justice auprès du Tribunal de commerce de Paris, compte à l’heure actuelle 5.936 demandeurs. Parmi eux, le collectif compte des milliers d'épargnants, mais aussi des conseillers en gestion de patrimoine, des tiers gérants et des assureurs, dont cinq luxembourgeois et deux français. Le report de cette assignation en justice, pour cause de documents incomplets, a également permis à certains professionnels de rejoindre le mouvement, notamment depuis septembre lors des annonces de baisse de valorisations des fonds cantonnés. Bien qu’ils ne croient plus à la récupération de cette poche de capital, les professionnels financiers ne tirent pas non plus un trait sur une possible procédure à l’amiable avec la société de gestion. «Nous sommes des financiers pragmatiques et nous gardons la porte ouverte à une négociation dans l’intérêt de nos membres», conclut Gérard Maurin.
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