
La crise casse la dynamique de financement des fintech françaises

Les fintech ont tenu bon en 2020. Le financement des fintech s’y établit à 664 millions d’euros de fonds levés, en augmentation de 4% par rapport à 2019, avec 58 opérations, contre 85 il y a un an. Le ticket moyen des opérations a par ailleurs progressé de 52%, s’établissant à 11,4 millions d’euros en 2020, contre 7,5 millions d’euros en 2019.
«On s’attendait à friser le milliard de financement en 2020 car on était sur une belle dynamique. L’augmentation de 4% reste donc à relativiser au regard du contexte de la crise sanitaire», explique à L’Agefi Mikaël Ptachek, président de l’Observatoire de la fintech. «Une à deux autres opérations importantes sont néanmoins attendues d’ici à la fin de l’année – supérieures à 50 millions –, ce qui pourrait avoir une incidence significative sur la tendance de l’année», ajoute-t-il.
Au premier semestre, les fintech ont levé 496 millions d’euros, contre «seulement» 168 millions sur la seconde partie de l’année. «On voit que la crise est passée par là. On aurait dû avoir quelques grosses opérations au second semestre, qui ont été décalées», note Mikaël Ptachek.
L’étude révèle par ailleurs une diminution des tours d’amorçage en série A, avec 25 opérations qui ont levé 3 millions d’euros, contre 50 opérations en 2019, représentant 60% des opérations. «C’est inquiétant. Il faut espérer que ça reparte, car l’écosystème du financement de la tech et de la fintech, c’est aussi financer des sociétés qui seront matures demain», explique-t-il.
Dans le contexte de la crise, «les investisseurs veulent prendre moins de risques. Ils regardent de plus près les indicateurs de prévision de rentabilité. Cela dépriorise les acteurs en début de cycle», ajoute Mikaël Ptachek. En manque de financement, certaines sociétés ont eu recours à des PGE (prêts garantis par l’Etat). «C’est une bonne mesure transitoire pour limiter les effets conjoncturels d’une crise qui touche tous les acteurs, estime-t-il. Le PGE vient pallier cela en partie en rendant les acteurs moins dépendants de l’immédiateté d’un financement qui serait déclenché pour de mauvaises raisons : il doit être déclenché pour des raisons de croissance et non pas de trésorerie.»
Le paiement est le secteur qui a attiré le plus d’investisseurs, pour 199 millions d’euros de fonds levés avec des acteurs comme Swile, Lydia ou encore Ibanfirst. L’assurtech figure en deuxième position, avec 165 millions d’euros levés par Alan ou encore Luko. A terme, dans le contexte de crise sanitaire, ce pourrait être un «secteur gagnant».
En 2020, Tencent a par ailleurs marqué l’arrivée des BATX dans la fintech française, en investissant dans Qonto et Lydia en début d’année. «Les Gafa travaillent un peu plus en interne, les BATX en externe car chacun n’a pas le même marché domestique. Peu de BATX se sont internationalisés, ils prennent donc des participations dans les fintech», explique Mikaël Ptachek. Fin mars 2020, 15 investissements ont été réalisés par les Gafa (uniquement par Amazon), contre 48 investissements par les BATX.
«Il n’y a pas encore un mécanisme de collaboration étroite mis en œuvre avec l’investisseur, mais c’est ce qui peut arriver à horizon deux ans. On peut imaginer que Tencent crée une néobanque présente sur trois ou quatre continents. Le sujet de la souveraineté des données est un facteur que l’on ne peut pas non plus ignorer», ajoute-t-il.
Les financements de fintech en 2021 dépendront surtout «du mois où on sortira de la crise. Si on va vers un scénario où on se vaccine dès le premier trimestre, on peut imaginer que les cycles repartent. Si on perd six mois, ce sera difficile de refaire une année importante», conclut l’expert.
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