
Vu ses progrès, Airbus mérite d'être surclassé face à Boeing

La distance séparant Airbus de Boeing s'élargit. Contrairement à son rival américain qui avait livré la veille une copie décevante, le groupe européen d’aéronautique et de défense a publié jeudi des résultats trimestriels solides, dépassant des attentes pourtant élevées.
Airbus a multiplié par plus de deux son résultat opérationnel ajusté sur les trois premiers mois de l’année, à 694 millions d’euros, soit 9% de plus que les 635 millions en moyenne anticipés par les analystes. La génération de trésorerie impressionne également : Airbus a dégagé un cash-flow libre avant financements-clients et opérations de fusions-acquisitions de 1,2 milliard d’euros, alors que les bureaux d'études anticipaient un chiffre proche de l'équilibre. Le groupe n’avait plus généré de trésorerie positive au premier trimestre depuis 2011. En comparaison, Boeing a brûlé 3,4 milliards de dollars de cash sur la même période.
Le marché apprécie ces résultats. L’action Airbus a pris plus de 3% à l’ouverture du marché avant de céder une partie de ses gains. En milieu d’après-midi le titre gagne encore 1,2% à 100,5 euros.
Une forte exposition aux low-costs
La robuste performance d’Airbus ne peut être totalement extrapolée. « L’amélioration des résultats au premier trimestre est en partie due à des éléments exceptionnels, notamment des effets positifs tirés des couvertures de changes », souligne Romain Pierredon, analyste auprès du bureau d'études indépendant AlphaValue.
Cette publication démontre néanmoins que les initiatives prises par le groupe pour renforcer sa compétitivité et moderniser son outil de production paient. « Airbus est récompensé de ses efforts pour réduire structurellement ses coûts sur ses programmes, en particulier sur [le gros porteur] A350 », constate Yan Derocles, analyste chez Oddo BHF. « La crise a permis à Airbus de négocier avec les syndicats pour améliorer les coûts de main-d’oeuvre et lui a aussi donné du temps pour mettre en place des processus de production plus performants. Le groupe en récolte les fruits », abonde un analyste basé à Londres.
UBS remarquait dans une récente note que les investisseurs se montraient sceptiques sur la capacité d’Airbus à « réduire ses coûts rapidement et en profondeur » pour gagner en agilité. Ces doutes paraissent à présent infondés.
L’attention du marché doit donc se porter sur les atouts d’Airbus, qui ne sont pas encore appréciés à leur juste valeur, selon UBS, qui cite notamment sa forte exposition aux compagnies low-cost et son portefeuille de produits. La banque suisse prévoit par ailleurs que les livraisons du groupe dépasseront chaque année celles de Boeing pour parvenir à 960 avions en 2025 contre 730 pour le groupe américain. « Airbus devrait tirer parti d’une forte reprise sur les avions monocouloirs d’ici à 2023. Le groupe possède un avantage compétitif fort sur ce segment par rapport à Boeing auquel il ne cesse de prendre des parts de marché », développe Romain Pierredon, d’AlphaValue. L’analyste cite pour exemple la commande de 25 A321 neo remportée la semaine dernière auprès de la compagnie américaine Delta Airlines.
Vers une montée des cadences de production de l’A320
Outre ses avantages compétitifs, la reprise de la production d’Airbus pourrait surprendre. Guillaume Faury, le président exécutif, a confirmé la trajectoire prévue pour 2021 sur la famille A320, soit une production mensuelle qui passerait d’environ 40 avions actuellement à 43 au troisième trimestre puis à 45 au quatrième. Le dirigeant a également indiqué aux analystes que le groupe discutait avec ses fournisseurs d’une nouvelle hausse soutenue des cadences pour 2022 et 2023. « L’accélération pourrait être très forte », juge l’analyste basé à Londres. « Airbus pourrait dès la fin 2023 retrouver son rythme de production antérieur à la crise sur la famille A320, d’environ 60 avions par mois », ajoute-t-il.
L’industriel reste prudent. Malgré son excellent début d’année, le groupe a maintenu et non relevé l’ensemble de ses objectifs pour 2021. Guillaume Faury a prévenu que la crise n'était « pas finie », évoquant des inquiétudes sur la situation sanitaire en Inde et sur le manque de coordination des Etats européens concernant les restrictions aux voyages.
Les atouts et les efforts de compétitivité d’Airbus plaident néanmoins pour que les investisseurs misent dès maintenant sur le groupe européen. Selon FactSet, 80% des analystes recommandent d’acheter son action contre moins de la moitié pour Boeing. Le groupe de Chicago n’a probablement pas fini de souffrir de la comparaison avec son éternel concurrent européen.
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