Le conflit russo-ukrainien bouleverse la stratégie de ThyssenKrupp

Les investisseurs ont mal réagi jeudi à la décision du conglomérat allemand d’ajourner le projet de scission de sa division acier.
Yves-Marc Le Réour
Thyssenkrupp
Le conglomérat industriel allemand ThyssenKrupp doit se résoudre à ajourner le projet de scission de sa division acier en raison de la guerre en Ukraine.  -  Bloomberg

ThyssenKrupp est une nouvelle fois victime de contraintes externes. Après avoir enterré en 2019son projet de coentreprise avec l’indien Tata Steel, le conglomérat industriel allemand doit se résoudre à ajourner le projet de scission de sa division acieren raison de la guerre en Ukraine. «La mise en œuvre de cette solution d’autonomie dans le contexte d’instabilité actuel n’est pas possible pour le moment», a indiqué la présidente du directoire, Martina Merz, dans un communiqué publié mercredi soir. Si la scission, attendue à la mi-2022, n’est plus réalisable à cette échéance compte tenu des incertitudes géopolitiques et macroéconomiques, «cette solution continue d’offrir d’excellentes perspectives d’avenir pour la division sidérurgique», a ajouté la dirigeante.

L’exposition directe du groupe à la zone de conflit est peu importante, puisque ses ventes en Russie et en Ukraine représentent moins de 1% de son chiffre d’affaires. Mais ThyssenKrupp, qui a déjà constaté depuis début mars des problèmes d’approvisionnement dans l’automobile et la sidérurgie, table sur une persistance de ces difficultés durant les prochains mois. En parallèle, le groupe, qui est parvenu à vendre sa division ascenseursen 2020, a abandonné sa prévision d’un flux de trésorerie disponible à l’équilibre, avant fusions et acquisitions, sur son exercice se terminant le 30 septembre prochain. A plus court terme, il anticipe toujours pour la période de janvier à mars 2022 un résultat d’exploitation ajusté supérieur à celui du trimestre précédent. Ces annonces ont déplu aux investisseurs qui ont fait dévisser jeudi l’action de 9,4% à 8,54 euros en clôture.

Hausse du besoin en fonds de roulement

«Il est clair que le besoin en fonds de roulement du groupe va s’accroître à court terme en raison de la hausse des prix des matières premières, mais la suspension de sa prévision de cash-flow libre n’en constitue pas moins une déception», juge Bastian Synagowitz, analyste chez Deutsche Bank. Le report sine die de la déconsolidation de l’activité sidérurgique du groupe éloigne en outre la perspective d’une diminution supplémentairede son endettement financier et des passifs afférents à ses fonds de retraite. ThyssenKrupp disposait néanmoins de 8,3 milliards d’euros de liquidités au 31 décembre dernier, un matelas de sécurité bienvenu dans l’environnement actuel. Dans l’attente de pouvoir répercuter les hausses de prix sur ses clients, Martina Merz envisage de réduire les heures de travail des ouvriers dans certaines parties de l’entreprise pour mieux contrôler ses coûts, selon une note interne consultée par Reuters.

A l’échelle européenne, les récentes baisses de production d’ArcelorMittalet d’Acerinox en Espagne devraient renforcer les goulets d’étranglement auxquels le secteur sidérurgique était déjà confronté dans le sillage de la pandémie de Covid-19. Acerinox, quatrième producteur mondial d’acier inoxydable, a décidé de suspendre l’achat de nickel dont les prix ont augmenté de 250% en deux jours la semaine dernière, jusqu’à dépasser brièvement 100.000 dollars la tonne. Le nickel est utilisé dans la production d’acier inoxydable afin d’améliorer les propriétés mécaniques de cet alliage qui contient par ailleurs du titane et du cuivre. Dans la foulée, le groupe espagnol a temporairement mis à l’arrêt deux usines andalouses. Selon les analystes de Citigroup, Acerinox «devrait être en mesure de gérer ses livraisons à court terme grâce à une politique de déstockage, à condition que ces arrêts de production ne durent pas trop longtemps».

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