
L’Europe se perd en grands débats

Ils vont venir, ils seront tous là, au moins en vidéo. La Conférence sur l’avenir de l’Europe sera lancée en grande pompe le 9 mai à Strasbourg, avec un an de retard sur le calendrier initial. C’est Emmanuel Macron, enivré du Grand débat national, qui avait émis en 2019 l’idée de cet exercice inédit de démocratie participative, où tous les citoyens européens seront appelés à formuler leurs attentes et propositions sur une plateforme numérique.
Changement climatique, relance économique, politique migratoire, nul ne sait ce qui sortira du tonneau. Mais l’on peut faire confiance au zèle procédurier des institutions européennes pour transformer l’alcool fort en eau claire. Beaucoup d’Etats membres souhaitent éviter toute réforme des Traités. Le délai pris pour lancer le projet tient d’ailleurs autant à la crise sanitaire qu’aux interminables tractations qu’il a fallu mener pour en déterminer la gouvernance. Celle-ci sera simple, forcément. Le Conseil, le Parlement et la Commission se sont accordés sur une présidence tripartite, ce qui devrait éviter à leurs représentants d’avoir à choisir entre le sofa et le fauteuil. Elle sera épaulée par un comité exécutif, tandis qu’une assemblée plénière composée d’officiels européens et de parlementaires nationaux servira de filtre avec la plateforme citoyenne. Chacun de ces cercles de pouvoir n’aura qu’un objectif : circonscrire les recommandations du voisin et imprimer sa marque sur les conclusions. Toute ressemblance avec le Comité pour l’Action parallèle, l’entreprise vaine et grandiloquente qui compose l’intrigue de L’Homme sans qualités, est purement fortuite.
A la différence du roman inachevé de Musil, la Conférence sur l’avenir de l’Europe compte bien aboutir d’ici un an. Un an, c’est presque la distance qui nous sépare d’un autre temps fort, la proposition franco-allemande du printemps 2020 pour une relance commune, concrétisée quelques semaines plus tard par l’accord historique sur NextGeneration EU. Loin des agoras et tables rondes, la construction européenne y réalisait là une avancée majeure, autant par les 750 milliards d’euros à déployer dans l’économie que par le financement de ce plan, amorce d’une capacité budgétaire permanente. La réalité a depuis rattrapé le rêve, et la manne met encore plus de temps que les vaccins à toucher ceux qui en ont besoin. Sans doute Bruxelles doit-elle prendre toutes les précautions nécessaires : les gouvernements sont toujours tentés de sacrifier les investissements d’avenir sur l’autel du clientélisme électoral, et il n’est pas question de dilapider cette chance unique de réformer pour retrouver de la croissance. La séquence des douze derniers mois justifierait pourtant un vrai débat sur la réforme des institutions européennes et leur efficacité. Malheureusement, la grande machine participative que l’Europe met en branle risque fort de laisser ce sujet de côté.
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