
Les OPA en deux temps suscitent un débat boursier

Durant les deux dernières années, plusieurs sociétés françaises cotées en Bourse ont fait l’objet d’offres publiques d’achat (OPA) en deux temps ayant abouti à des écarts de prix très importants entre le premier et le second tour. Le secteur technologique a été tout particulièrement concerné par cette évolution, comme en témoignent les offres ayant visé le groupe informatique Open, la société de conseil en technologiesDevoteam ou l’éditeur de logiciels IGE+XAO. Certains observateurs mettent en avant l’existence d’une inégalité de traitement entre actionnaires liée à cette pratique.
«Lorsque le relèvement du prix a lieu avant l’ouverture de l’offre, ce qui est le cas pour le projet de rapprochement en cours entre Vivendi et Lagardère, tous les actionnaires apportant leurs titres sont traités de la même façon», indique à L’Agefi Pierre Tourres, associé au cabinet Linklaters.
Dans les autres cas, la volatilité importante des marchés boursiers durant la crise sanitaire a favorisé des écarts de valorisation pouvant aller du simple au double. «Depuis le début de l’année 2020, la réglementation boursière encourage des échanges directs entre actionnaires minoritaires et experts indépendants dès l’annonce de l’opération», souligne Pierre Thomet, également associé chez Linklaters. Ces experts, rémunérés par la cible, sont nommés par un comité d’administrateurs indépendants formé au sein de son conseil d’administration.
«Historiquement, lorsque le seuil nécessaire au lancement d’un retrait obligatoire n’était pas atteint, cela provenait notamment de fonds activistesayant pris une participation au capital de la cible en vue de maximiser leur mise, ce qui les incitait à ne pas apporter immédiatement leurs titres à l’offre. Toutefois, l’abaissement de ce seuil de 95% à 90% du capital et des droits de vote a rendu cette pratique plus coûteuse», relève Pierre Tourres.
Une période de 12 mois alignée sur les intentions de l’acquéreur
«Le recours à un expert indépendant est obligatoire dans le cas d’une OPA simplifiée initiée par l’actionnaire majoritaire d’une société ou d’une OPA volontaire qui sera suivie d’une offre publique de retrait», explique Annie Maudouit-Ridde, avocate of counsel au sein du cabinet Winston & Strawn. C’est également le cas si l’initiateur de l’offre a signé un accord avec certains administrateurs pouvant déboucher sur des conflits d’intérêts.
Par ailleurs, «tant que l’offre n’est pas clôturée, l’initiateur peut décider d’augmenter le prix de son offre de 2% au minimum, même en l’absence d’offre concurrente», ajoute-t-elle. «Le relèvement d’une offre à l’issue d’une période d’un an coïncide avec les intentions que doit présenter l’acquéreur dans la note d’information afférente à l’opération et qui sont valables 12 mois», souligne l’avocate.
«Le choix d’apporter les titres à l’offre au premier tour ou au deuxième tour dépend du nombre et de la nature des investisseurs présents au capital», ajoute celle-ci. L’intérêt respectif des actionnaires particuliers ou des investisseurs institutionnels n’est pas toujours identique, il dépend notamment de la durée de détention des titres dans les portefeuilles.
«Même si le nouveau prix est bien au-dessus du précédent, cela ne signifie pas que la première offre était inéquitable car la situation opérationnelle et financière de l’entreprise a pu évoluer dans l’intervalle», juge Annie Maudouit-Ridde. Pour évaluer l’entreprise, l’expert indépendant procède d’ailleurs à une analyse multicritères qui tient compte non seulement de son cours de Bourse, mais aussi de sa valorisation par rapport aux concurrents ou des prévisions de cash-flows actualisés.
Plus d'articles du même thème
-
Carrefour relève de 10% son offre sur sa filiale brésilienne
Le distributeur propose désormais 8,5 reals par titre aux actionnaires minoritaires de Grupo Carrefour Brasil. -
BDL Capital Management se dresse face à Prosus sur la route du rachat de Just Eat Takeaway
Le gestionnaire d’actifs parisien critique les conditions de l’offre sur la plateforme de livraison de repas. Il juge le prix proposé de 20,3 euros par action bien trop décoté face à une valeur intrinsèque de la cible dont il détient 2% du capital. -
Brookfield envisagerait une nouvelle offre sur l’espagnol Grifols
Quelques mois après avoir essuyé une fin de non-recevoir des dirigeants du laboratoire pharmaceutique, la société de capital-investissement aurait repris les discussions sur la base d’une valorisation de 7 milliards d’euros.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions