
L’Afep demande à l’Etat de mesurer l’impact de la réforme sur la fiscalité du numérique

Les réflexions de l’OCDE sur la fiscalité du numérique pourraient peser lourd sur les finances publiques françaises et provoquer une hausse du niveau d’imposition des entreprises française, craint l’Afep. Dans un «position paper», le lobby des grandes entreprises demande la publication d’une étude détaillée sur l’impact de la réforme promue par l’OCDE, la sécurité juridique et la garantie d’absence de double imposition.
Pourquoi ? L’accord conclu en début d’année par 129 pays de l’OCDE, dont la France, prévoit de refondre, d’ici 2020, les principes de répartition entre Etats de l’impôt sur les sociétés (IS) par les grandes entreprises, avec pour objectif une répartition «plus équitable», en imposant davantage ces sociétés dans les pays de consommation, même si elles n’y sont pas ou peu présentes.
Actuellement, l’OCDE réfléchit à trois options. L’une ne concernerait que les entreprises numériques, en particulier les médias sociaux, moteurs de recherche et places de marché numériques. L’autre toucherait tous les secteurs d’activité. Et la troisième serait liée à la présence économique (et non physique) dans un pays.
Transferts d’assiette
Alors que les grandes entreprises et ETI supportent 63% de l’IS en France, soit plus de 40 milliards d’euros, l’Afep s’inquiète de l’impact de la réforme de l’OCDE sur les finances publiques françaises. Elle risque de réduire les recettes fiscales et, à terme, en réaction, de provoquer l’augmentation de la fiscalité des entreprises. En effet, la France est le cinquième pays des plus grandes multinationales, mais seulement le vingt-deuxième en nombre d’habitants. Alors que les Etats-Unis occupent la première et la troisième place, et la Chine la troisième et la première. Les entreprises de l’Afep réalisent plus des trois quarts de leur chiffre d’affaires à l’international, voire plus de 90% pour la plupart des sociétés de l’industriel. Or, le principal débouché des entreprises américaines reste leur marché domestique.
Aussi, «toute solution privilégiant la rémunération d’une valeur potentiellement créée par les marchés de consommation […] présente des risques de transferts d’assiette à l’étranger qui pourraient ne pas être assumés par l’administration française et de fait se traduire par une double imposition des entreprises nationales», s’alarme l’Afep. Alors que l’OCDE prévoit une imposition minimale dans l’Etat de résidence – pour compenser la faible imposition des filiales dans certains pays – l’Afep demande que cette mesure soit écartée, rappelant que le Conseil constitutionnel a déjà censuré une mesure similaire en 2014.
En conséquence, l’Afep demande «au plus haut niveau» de l’Etat de suivre «dans le détail» les travaux de l’OCDE, et de réaliser et rendre publique une étude d’impact de ces propositions. Les concepts devront être suffisamment clairs pour ne pas être sources de débats, notamment sur le partage de la valeur entre le consommateur et les fonctions (R&D, …) réalisées par le groupe. Et l’Afep ne veut pas de «création de droits de propriétés nouveaux sur les actifs incorporels reconnus par les travaux OCDE générant la taxation de plus-values dans différents pays».
Pour éviter toute double imposition, l’Afep recommande de mettre en place une nouvelle convention multilatérale rendant l’arbitrage obligatoire, et de prévoir un mécanisme de compensation avec les droits de douane à l’importation.
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