
La surchauffe guette le marché de la dette spéculative

Le marché primaire high yield (HY) euro est en ébullition. Depuis le début de l’année, 45,5 milliards d’euros ont été émis par des entreprises notées en catégorie spéculative, soit plus du double de l’an dernier, selon SG CIB. La semaine passée, neuf émetteurs ont placé plus de 6 milliards. Et le mouvement s’accélère.
«Lundi, nous avons eu huit opérations annoncées. C’est un record absolu en une seule journée», constate Benoit Soler, gérant chez Keren Finance. Adler Group, CBR Fashion, Grünenthal, Oriflame, Louis Dreyfus, Birkenstock, Picard et Mytilineos ont annoncé leur intention d’émettre des obligations.
«Le crédit HY est plutôt bien positionné dans l’environnement actuel un peu plus inflationniste et avec des hausses importantes de bénéfices pour les entreprises», relève Benoist Grasset, gérant chez Generali Investments. Mais il y a aussi une forte demande des investisseurs. «Les investisseurs institutionnels, notamment les assureurs, soutiennent le marché en cherchant à repositionner leurs portefeuilles aujourd’hui très longs en duration et exposés aux obligations détenues par la BCE, vers des actifs plus en ligne avec l’économie réelle», poursuit le gérant.
Cet afflux d’émissions n’est pas sans conséquence sur la qualité moyenne du marché. «Nous avons une petite dégradation, observe Thomas Sanson, gérant chez Muzinich & Co. D’abord, il y a davantage de refinancement de prêts (loans) par des obligations qu’auparavant, ce que l’on n’avait pas vu depuis longtemps. Ensuite, il y a plus de nouveaux émetteurs.» Un avantage en termes de diversification, mais un risque supplémentaire. Le gérant s’étonne notamment de la venue de deux promoteurs espagnols : «Généralement ces opérateurs se financent sur le marché quand les banques sont moins friandes de ce type de risque ou à moins qu’ils ne profitent tout simplement de coûts de financement plus faibles».
Benoit Soler se montre également prudent: «Moins d’émissions, de meilleure qualité et mieux payées serait mieux». Le marché est extrêmement serré et la marge d’erreur très faible. «Des sociétés récemment en restructuration comme CGG ont pu émettre, indique Benoit Soler. Une émission avec une structure compliquée comme celle de TI Fluid Systems a été émise à 3,75% de rendement, ce qui est très serré pour son secteur et son rating, et a tout de suite coté en secondaire nettement au-dessus du pair.» Plus problématiques, les refinancements de Pfleiderer ou de Picard qui sont en partie utilisés pour faire remonter des dividendes aux actionnaires. Un signe de surchauffe qui ne trompe pas.
{"title":"","image":"236737»,"legend":"","credit":""}
Plus d'articles du même thème
-
Le risque de surenchère tarifaire tétanise les marchés
La riposte de la Chine aux tarifs douaniers réciproques de Donald Trump a exacerbé le risque d'escalade et de récession, plongeant les marchés financiers encore davantage dans la tourmente. Wall Street accuse sa pire chute depuis la crise Covid. L'Europe efface ses gains de 2025. Les investisseurs fuient vers les emprunts d'Etat. -
Les gérants de crédit continuent de s’ajuster à la nouvelle donne
Les panélistes de L’Agefi sont de plus en plus prudents face au risque d’écartement des spreads, toujours serrés, en cas de fort ralentissement de la croissance suite au choc des tarifs douaniers. -
EXCLUSIF
Les gestionnaires de taux contiennent leur panique
Les prévisionnistes de L’Agefi tendent à ajouter une baisse de taux à six mois tout en diminuant leurs prévisions pour les taux longs aux Etats-Unis et en augmentant celles sur la zone euro.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions